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J-675...

Je trépigne d'impatience dans mon hall d'entrée, attendant que le chauffeur vienne me chercher pour m'amener au palais. Je n'ose jeter un il à l'heure sachant que je l'ai demandé une bonne vingtaine de fois à mon père depuis que j'attends. J'ai senti sa pointe d'agacement lorsqu'il m'a fait comprendre que le temps ne passerait pas plus vite en demandant l'heure toutes les deux minutes. Je ne peux que le comprendre, je suis imbuvable ! Ma seule excuse n'est autre que je le fais que je sois totalement paniquée par la soirée que je m'apprête à vivre.

Je lorgne une nouvelle fois la photographie que mon père a retrouvé dans un album photo. J'essaye de prendre de la force et du courage en voyant Colette avant le Bal des masqués. J'ai toujours envié le caractère inébranlable de ma grande sur. Elle est un peu comme le roseau dans la fable de La Fontaine. Elle se tort sous les épreuves les encaissant sans broncher mais jamais ne rompt.

Sur la photographie que je contemple, je ne reconnais presque ma sur tellement elle est magnifique. Elle est somptueuse dans sa robe d'époque, digne des plus grandes descendantes des monarchies d'Europe. Elle pose telle une mannequin affichant un air sérieux. Elle semble à des années lumières de moi. Ma sur semble sereine, concentrée, prête. De mon côté, je suis plutôt anxieuse, stressée, tendue. 

Je souffle un bon coup. Si ma sur a survécu à cette soirée - et même avec brio – je devrais au moins m'en sortir si ce n'est réussir.

- Le chauffeur vient de passer le portail, m'annonce mon père ayant quitté son bureau pour me rejoindre

J'hoche de la tête pour lui faire comprendre que j'ai entendu.

- Chérie, viens ! Hariette ne va pas tarder à partir, appelle-t-il.

Rapidement ma mère déboule dans le hall un appareil à la main. Elle veut improviser une séance photo pour se souvenir à vie de ce moment, moi, je n'en ai pas envie. Pourquoi me fait-elle subir cela ? Me photographier la première fois que j'ai vu le jour, je veux bien. Me photographier prête pour mon premier jour d'école, je le comprends aussi. Me photographier sur mon pot la première fois que j'ai été propre, pourquoi pas. Toutefois, me photographier à cet instant, non je ne le souhaite pas. Ce n'est pas le moment de ma vie. Je ne suis pas entrain d'accomplir quelque chose d'extraordinaire. J'accomplis une tâche que l'on m'a forcé à faire. Je ne ressens aucune joie à l'instant présent, seulement le poids des charges qui m'incombent.

- Hari fait un effort s'il te plait, me supplie-t-elle face à mon refus, nous avons pris Colette dans ce hall chaque année avant qu'elle parte au Bal des masqués !

Malheureusement son argument n'est pas le bon. Me rappeler que je me trouve à la place de Colette, ne fait que remuer le couteau dans la plaie et attise la colère qui gronde en moi contre mes parents.

- Oui très bonne idée ! Tu pourras mettre ma photo à côté de toutes celles de Colette en écrivant la date et « Hariette remplace Colette »

- Hariette ! Me réprimande mon père.

- Je sais que tu es anxieuse et que tu nous en veux toujours, mais ce n'est pas une raison pour être méchante gratuitement, affirme ma mère.

J'abdique face au regard penné de ma mère. C'est partie pour une séance photographie improvisée dans le hall. Souris Hariette ! Ce n'est que le début...

Heureusement, le chauffeur me sort de cette situation épineuse en klaxonnant. Je m'empresse de sortir pour monter dans sa voiture. La tâche est plus compliquée qu'habituellement. Il faut dire que ma robe n'est pas des moindre, elle prend beaucoup de place et me gêne dans mes mouvements. Je reste paralysée tout le long du trajet, entourée du silence pesant qui règne dans la voiture.

Royal WeddingWhere stories live. Discover now