CHAPITRE 4

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SÉFIA

 Le réveil retentit dans la chambre et me tire de mon sommeil. J'éteins l'alarme et reste allongée, le temps de quelques secondes, à fixer le plafond. La rentrée scolaire. Les salles de classe propres, l'odeur des cahiers neufs et le teint matte des élèves après les vacances d'été me reviennent en tête, et me font malgré moi sourire.

Je me redresse, et Silný saute sur les draps pour venir réclamer des caresses.

— J'adorerais rester avec toi, mais je dois aller étudier...

Il entame sa toilette tandis que je me lève. J'ouvre mon placard, choisis un sweat rose pâle et un jean clair et enfile le tout. Dans la salle de bain, j'observe mes boucles blondes, qui serpentent le long de mon dos, et les ordonne d'un coup de brosse. Je croise mon propre regard dans le miroir, et le mouvement de mon bras ralentit, pour se stopper complètement. Toute trace de confiance ou d'euphorie a disparu. La fougue de la petite Séfia de l'école élémentaire s'est échappée il y a déjà bien longtemps, pour laisser place à un calme béant. La cacophonie du silence. Et malgré le temps qui passe, rien ne s'efface. J'ai l'impression que mon visage est figé, qu'il ne laisse passer aucune émotion. Que sur mon front est écrit tout ce qui m'a poussé à quitté Little Rock. Et ça, c'est terriblement oppressant.

— Séfia ! Petit Déjeuner !

Je baisse brusquement la tête, comme si mon propre regard m'avait brûlé la peau. J'enfile rapidement mes baskets, et rejoins mes parents dans la cuisine. Mon père boit son café, tandis que ma mère enfile sa veste, ajuste son col, et vérifie qu'elle est présentable dans le miroir de l'entrée.

— Bonjour ma chérie. Tu vas bien ?

— Oui... Tu vas déjà travailler ?

Elle m'observe avec une pointe d'inquiétude et hoche la tête.

— Je n'ai pas le choix, l'hôpital a besoin de moi... Et j'aimerais que tu restes près de Chani, au moins pour aujourd'hui. C'est une gentille fille, et elle t'aidera, j'en suis certaine... Cependant, s'il y a le moindre problème, tu as mon numéro de téléphone, ainsi que celui de ton père. Et si tu n'arrives pas à me contacter, j'ai mis le numéro de mon service dans ton répertoire. Ça va aller ?

Je la fixe sans ciller. Elle est réellement très prévoyante. Elle ne s'inquiétait pas autant avant... Quand j'étais plus jeune, elle me laissait libre, et ne se préoccupait pas de savoir si j'avais besoin de lui téléphoner ou non. Désormais, cette protection qu'elle met en place me rassure tout autant qu'elle.

— Je pense que oui, maman... je réponds, sous son regard qui me materne.

Elle soupire et m'embrasse le front avant d'ajuster son sac à main, et d'embrasser mon père.

— Bien ! Bonne journée mes chéris !

Elle claque la porte d'entrée derrière elle, tandis que je tourne les talons pour retourner à l'étage.

— Tu ne manges pas Séfia ? demande mon père, sans quitter les yeux de son journal quotidien.

— Non, après les cours, Chani et moi allons au Memphis Diner, alors je mangerai plus là-bas.

Il hoche la tête et me laisse aller dans ma chambre. J'enfile ma veste en jean et attrape mon sac à dos au passage. Après un dernier bisou sur le museau de mon chat, je quitte la pièce. Chani doit m'attendre, à l'heure qu'il est. Je cours dans les escaliers et adresse un signe de main à mon père.

— Bonne journée !

— Toi aussi papa !

Il fait beau ce matin, et la température est agréable. Chani m'attend, appuyée contre la voiture grise de son père. Elle porte un haut blanc décolleté et un pantalon large orné d'une ceinture doré. Ses cheveux sont lâchés, mais je distingue sans mal ses épaisses créoles dorées. Ses lèvres, colorées d'un rouge matte, s'étirent dans un immense sourire, et elle vient me prendre dans ses bras.

Quelqu'un Pour ToiWhere stories live. Discover now