CHAPITRE 32

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SÉFIA

Les jours suivant le Bal d'Hiver sont les plus doux que j'ai connus. Kenzo et moi nous voyons fréquemment. Chaque sortie est devenue le prétexte idéal pour fondre l'un sur l'autre. Ce qui était il y a quelques semaines des séances de révision s'est transformé en moments de tendresse. Les après-midi passent à une vitesse folle, lorsque je suis allongée dans son lit, la tête posée sur son torse à lire les romans de sa bibliothèque. Les soirées semblent ne durer qu'une seconde, quand, enlacés sur le canapé de mon salon, nous regardons l'entièreté de la saga Star Wars en compagnie de Silný. J'aime la présence de Kenzo autant qu'elle me rassure...

Je me réveille avec difficulté. La lumière aveuglante du soleil filtre à travers mes rideaux et me force à me cacher sous mon oreiller. L'idée de quitter mon lit pour affronter le froid qui règne dans ma chambre me dissuade totalement de mettre ne serait-ce qu'un orteil dehors. Cependant, l'odeur alléchante du pain d'épice et des pancakes me fait sourire. Après m'être redressée sur les coudes, je hume les effluves délicieux qui s'échappent de la cuisine. La nourriture aura toujours raison de moi... À contrecœur, j'enfile mes chaussons et je vais embrasser le museau de Silný.

Derrière mes rideaux, je souris à la vue d'un petit garçon qui court dans la rue, un avion flambant neuf dans les mains. Il l'élève au-dessus de lui pour imiter son envol, sous les yeux attendris de ses parents. À la vue du jouet, je me souviens soudainement de la date d'aujourd'hui. Le 25 décembre ! C'est Noël !

J'attache précipitamment mes cheveux dans une queue-de-cheval brouillon, j'attrape un gilet chaud et je quitte ma chambre, Silný sur les talons. Je dévale les escaliers pour trouver mes parents dans la cuisine, sirotant leur café habituel.

— Joyeux Noël !

— À toi aussi, maman !

Mon père se joint à notre câlin matinal. J'ai beau venir d'une famille orthodoxe, nous fêtons tout de même Noël depuis que je suis toute petite. C'est l'occasion parfaite pour s'offrir des cadeaux et pour déguster un bon repas ! Un air taquin collé au visage, mon père me désigne le pied du sapin, dans un coin du salon. Je tourne vivement la tête et m'émerveille devant les papiers d'emballage rouges et dorés. Je sens mes joues prendre une teinte rosée, probablement dû à l'excitation. Un sourire impérissable prend place sur mes lèvres, et mes parents rigolent devant mon enthousiasme manifeste, tandis que je m'assois à ma place, le cœur battant.

J'enfourne une bouchée de pain d'épice en feignant d'ignorer les coups d'œil inquisiteurs qu'ils me jettent. Plutôt que de tourner plus longtemps autour du pot, je relève la tête et les interroge directement :

— Il y a un problème ?

La bouche pleine, je les fixe sans comprendre ce qui les taraude.

— On aimerait savoir si tout se passe bien avec Kenzo, entame mon père.

J'avale de travers avec l'impression que mes yeux vont sortir de leurs orbites. Pardon ? J'ai bien entendu ? Mes poumons crachent, et leur tentative de respirer correctement est un véritable échec. Ma mère me tend un verre d'eau que j'avale à grandes gorgées, avant d'inspirer longuement.

Kenzo et moi veillons à être discrets sur nos marques d'affection. J'ai besoin de temps avant d'avouer à nos amis et à ma famille que nous sommes ensemble. Ce mot sonne étrangement dans mon esprit. Nous sommes ensemble. Après les événements de l'année précédente, je m'étais promis de ne plus jamais me laisser berner par un beau sourire. Il faut croire que j'aie échoué lamentablement.

Ainsi, Kenzo ne m'embrasse pas lorsque nous sommes en public, et je me retiens de glisser mes doigts entre les siens. Pourtant, mes parents ont dû nous surprendre à un moment où à un autre, leur regard équivoque ne fait aucun ne doute...

Quelqu'un Pour ToiDonde viven las historias. Descúbrelo ahora