CHAPITRE 28

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HARLEY

    Je passe le pas de la chambre 128 et me frotte les mains à l'idée d'annoncer la nouvelle à Nina. Un parfum ambré que je connais trop bien domine l'odeur d'antisceptique. Les rayons du soleil jouent avec les dalles du carrelage. Les livres sont éparpillés sur le lit et le sol. Les draps sont défaits, comme toujours. Ce sont tous ces petits détails qui me font me sentir chez moi. Ici, loin de ma maison, près de son coeur.

    Installée confortablement dans son fauteuil capitonné, elle lit - ou plutôt relit - l'un de ses romans favoris. Cachée derrière les pages jaunies, les jambes repliées contre elle-même, on pourrait presque croire qu'elle n'est pas malade.

    Je m'adosse à la porte en attendant qu'elle lève les yeux. D'où je suis, j'aperçois ses sourcils froncés et son regard concentré. Ses cheveux noirs ondulent autour de son visage, et parfois, une mèche rebelle tombe devant ses yeux. Elle est réellement fascinante. Troublante.

    La mucoviscidose affaiblie sa confiance en elle jour après jour. C'est dur de supporter la perte de poids excessive, les comprimés dégueulasses, les rendez-vous médicaux... Pourtant, elle ne devrait jamais douter d'elle-même. Son intelligence n'a pas d'égale. Son caractère est unique. Et son physique est digne de... Enfin, il est digne de Nina Rivera.

    — Ley ?

    Je souris comme le dernier des cons quand elle me remarque enfin. Elle se dirige vers moi, furibonde. Son seul petit, minuscule et insignifiant défaut, c'est qu'elle est totalement imprévisible.

    Et c'est pour ça que je ne comprends rien lorsqu'elle lève son livre pour me le lancer dessus. Il atterrit sur mon épaule et s'écrase au sol dans un grand bruit.

    — Mais t'es complètement folle !

    Elle ricane et avance dans ma direction.

    — Ça, c'est pour ne pas être venu me voir pendant une semaine entière !

    — Mais...

    — Et ça, me coupe-t-elle, c'est parce que je t'aime.

    Elle pose ses lèvres sur les miennes et m'offre un baiser langoureux. Mes mains trouvent naturellement leur place sur ses hanches et je l'approche de moi. Son corps menu et chaud contre le mien est un pur délice. Oh putain... Quand est-ce que je suis tombé amoureux de la sœur de mon meilleur pote déjà ?

    — J'ai une bonne nouvelle pour toi !

    Nina prend ma main et m'attire sur le lit. Nous nous asseyons et elle m'interroge du regard. Ce regard qui me rend fou. Merde, si mon meilleur pote m'entendait, il se foutrait de ma gueule ! Quoique, il vaut peut-être mieux pour mes bijoux de famille qu'il ne m'entende pas du tout...

    J'ai aimé Nina à partir du jour où nous nous sommes rencontrés. Au fil des années, ce qui était une amitié solide s'est transformé en amour tout aussi solide. Elle a été toutes mes premières fois, et j'ai été les siennes. Premiers baisers, premières cigarettes, premières bouteilles d'alcool vidées, premiers plaisirs charnels...

    — J'ai parlé avec Kenzo...

    — Quoi ?! Tu lui as parlé... de nous ? s'exclame-t-elle en rougissant de colère.

Nous avons convenu d'attendre le bon moment pour aborder notre relation avec son frère. Ça fait déjà quelques années que nous repoussons l'échéance, mais je crois que Nina me castrerait vivant si j'avais pris la décision de le faire sans elle.

    — Non ! Ce n'est pas de ça dont je veux te parler.

    Elle m'indique du regard d'aller plus vite, et balaie l'air de sa main pour me faire comprendre qu'elle se fout de mon babillage.

Quelqu'un Pour ToiWhere stories live. Discover now