CHAPITRE 1

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SÉFIA

Le paysage aride défile à toute vitesse sous mes yeux. Le vide et la poussière s'envolent sous nos pneus, laissant derrière nous une longue traînée de fumée. La route est abandonnée, perdue au beau milieu du Désert des Mojave, que nous longeons depuis quelque temps déjà. Dégagé, le ciel ne présente aucune superficialité. Seulement le soleil et sa lumière aveuglante. La chaleur se fait écrasante dans l'habitacle, tandis que nous avançons sans regarder en arrière, la voiture avalant les kilomètres.

L'air chaud qui entre par la vitre ouverte soulève mes cheveux, les emmêlant devant mes yeux. Je les dégage de mon visage, et laisse pendre paresseusement mon bras contre la portière brûlante. Les rayons du soleil, se reflètent sur notre vieille Cadillac bleue. Je souris, tandis que la voiture rebondit de temps en temps sur les nids de poule, la remorque accompagnant le mouvement.

À la suite d'une énième secousse, je tourne la tête vers mon père, au volant. Ses cheveux bruns coupés courts lui donnent un air strict, immédiatement entravé par une barbe de quelques jours et des yeux doux, d'un bleu profond. Il arbore des sourcils épais, et froncés, un signe de sa concentration. Les petites rides qui courent sur son visage, et ses larges épaules habillées d'un T-shirt sombre témoignent de sa virilité naturelle. Le temps d'un instant, il pose son regard sur moi, et m'accorde un léger sourire. Je lui rends, et il reporte ses yeux sur la route.

Dans leur rétroviseur, j'aperçois ma mère, assise à l'arrière, en train de lire un roman. Ses cheveux blonds et ondulés encadrent son visage, le rendant lumineux. Le rouge à lèvre bordeaux appliqué correctement sur sa bouche fine s'accorde avec sa chemise blanche et sa longue jupe turquoise. Elle semble sereine, et son regard suit assidûment les lignes sur le papier. Je devine à ses côtés la cage de transport de Silný, mon chat. Plus qu'un meilleur ami, c'est mon confident. J'ai l'impression qu'il me comprend mieux que quiconque. Les relations humaines sont trop compliquées à décoder et à vivre, alors c'est avec lui que j'entretiens ma relation la plus durable, et la plus saine.

Je me replonge dans la contemplation du monde extérieur. C'est peut-être une chose étrange que d'être heureuse de déménager, mais c'est mon cas. J'ai hâte de voir ma nouvelle ville, mon nouveau quartier, ma nouvelle maison... Il y a au moins une centaine de scénario que je me suis imaginée quant à mon arrivée en Californie, mais je me doute bien qu'aucun ne fera office de vérité...

* * *

La voiture s'arrête et j'émerge doucement. Je me redresse sur mon siège, m'étire et frotte mes paupières. La température a légèrement diminué, et l'air est désormais plus respirable. À mes côtés, mon père sort du véhicule et claque sa portière, et je profite de cet instant de solitude pour observer les alentours.

L'endroit semble calme et assez propre. Le quartier me paraît bien entretenu et les arbres qui bordent la route apportent une touche d'ombre sur les bâtiments baignés de lumière. Mon visage dérive vers la droite et je découvre notre nouveau lieu de vie. Je l'avais déjà vu sur des papiers, mais la réalité est tout autre. Il s'agit d'une maison pavillonnaire simple, de taille raisonnable. Je quitte à mon tour le véhicule, et admire chaque détail avec attention. La bâtisse se découpe en deux parties distinctes. La première, à droite, se compose d'un étage, et du rez-de-chaussée. Le mur en brique rouge s'harmonise avec les volets clairs. La porte d'entrée, sombre, se trouve sous le porche, lui-même soutenu par quatre piliers massifs. Le toit noir contraste avec le ciel orangé et les derniers rayons de soleil de la fin d'après-midi. À gauche, la seconde partie ne possède pas d'étage. Les murs sont plus clairs et les baies, plus hautes, s'apparentant à une sorte de véranda. Devant la maison, un bosquet laisse fleurir des buissons, des plantes grimpantes, de la lavande... C'est un véritable petit coin de paradis, et je ne peux m'empêcher d'apprécier immédiatement la sécurité et la chaleur que me procure la vision de mon nouveau chez-moi.

Quelqu'un Pour ToiDonde viven las historias. Descúbrelo ahora