CHAPITRE 24

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SÉFIA

Je flâne entre les rayons de l'épicier du coin. Je touche du bout des doigts les emballages de barres de céréales et de petits gâteaux aux amandes, sans parvenir à me décider. Étant complètement seule dans la boutique, je me permets de prendre tout mon temps sans penser à l'horaire de fermeture, puisque le propriétaire ne rentre chez lui qu'au milieu de la nuit. Dehors, les étoiles viennent tout juste d'apparaître dans le ciel. Je soupire, et disparais au fond d'une allée. Ici, la climatisation tourne à plein régime, et fait voler mes cheveux tandis que je cherche mon bonheur parmi les fruits secs. Plus loin, à l'entrée, j'entends vaguement la clochette de la porte teintée, signe que quelqu'un vient tout juste de pénétrer les lieux. Je n'y prête pas plus attention que ça. Finalement, fidèle à mes goûts, je choisis un sachet de bonbons à la cerise. Ce fruit est clairement une valeur sûre ! J'attrape le paquet avec entrain, et me dirige vers l'unique caisse, au fond de l'épicerie. L'endroit n'est pas très propre, et plus vieux que ne laisse penser l'enseigne, mais j'aime ce style vintage. Ça rend ce magasin minuscule bien plus authentique qu'un centre commercial. C'est d'ailleurs pour ça que je viens acheter mes goûters ici tous les samedis soir, une habitude qui ne me quitte pas. Je dépose mon seul article sur le comptoir en attendant le retour du propriétaire, probablement en train de faire l'inventaire dans la réserve.

Soudain, un frisson désagréable parcourt mon corps tandis que mes muscles s'atrophient doucement. Je ne comprends pas ce qui se passe, mais mon corps m'envoie un signal de détresse. J'ai l'impression de me crisper, de me tendre de tout mon long. Ma gorge se noue et la peur me broie le ventre...

J'ai un mauvais pressentiment. Je déglutis et frotte mes mains devenues moites contre mon jean en jetant des coups d'œil furtifs autour de moi. Je ressers discrètement ma veste contre ma poitrine, et m'appuie contre le comptoir, afin de me faire la plus petite possible. Et là, je comprends. Derrière moi, je sens une présence. Imposante. Forte. Dangereuse. Je vois son ombre qui se projette contre le mur d'en face, et elle me terrifie. Elle me cloue sur place, m'empêchant tout mouvement. Au vu de la taille et de la carrure, c'est un homme. Sportif, parce je vois les biceps de sa silhouette se contracter, et fier, parce son menton est haut comme jamais. C'est tout ce que je suis capable de distinguer, mais c'est bien assez pour que mon cœur s'emballe comme un train qui déraille. Il se tient juste derrière moi, presque collé contre mon dos. Si près que je suis capable de sentir son odeur d'herbe et de transpiration, donnant l'impression qu'il vient de courir un marathon. Je ne me retourne pas. Même quand je l'entends ricaner. Même quand je vois dans l'ombre qu'il penche la tête, et qu'il hume l'odeur de mes cheveux. Même quand son souffle fétide s'écrase contre ma nuque. Même quand sa main agrippe violemment mes fesses. Je sursaute face à la douleur. L'humiliation me tétanise sur place. Mes ongles se plantent dans les paumes de mes mains, et les larmes perlent au bout de mes yeux. Il me pince au travers de mon pantalon, et je tente de me dégager en me décalant sur la gauche.

—Non...

C'est la seule chose que je suis capable de murmurer. Sa main glisse le long de mes courbes. Il les caresse en grognant, un plaisir non-dissimulé dans la voix. Je ne contrôle plus ma respiration. Mon cœur bat la chamade, et ma vue se brouille toujours plus à mesure que les secondes passent. J'ai envie de me retourner. De lui mettre la claque du siècle. De hurler au monde ce qu'il vient de se passer. Au lieu de ça, je reste là, totalement paralysée. Traumatisée. Du coin de l'œil, je remarque le propriétaire qui revient. Mais c'est trop tard. Je lui en veux. Pourquoi n'est-il pas revenu plus tôt ?! Derrière moi, le garçon s'éloigne immédiatement. J'étouffe un sanglot et essuie les larmes silencieuses qui roulent sur mes joues. Le caissier me fixe un instant avec perplexité, avant d'attraper mes bonbons.

Quelqu'un Pour ToiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant