Chapitre 33*

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Cassandre

Je fais un dernier tour de la chambre pour m'assurer que je n'ai rien oublié. Un carton rempli de livres, un autre de mes cours, une valise où prônent une majorité de vêtements coûteux que je déteste, un sac contenant mon nécessaire de toilette et quelques babioles que j'ai accumulées pendant trois ans. Le peu que j'ai en ma possession, autant dire pas grand chose, est posé près de mon lit. Je n'en reviens toujours pas d'avoir accepté la proposition de Nathan. Je m'installe chez lui, dans cette maison où je n'ai que des souvenirs peu reluisants.

C'est complètement ahurissant.

Un coup sec retentit contre la porte, me faisant sursauter. J'inspire profondément par le nez un court instant, puis en redressant les épaules, j'ouvre enfin. Le chauffeur de Nathan se tient devant moi dans son costume sombre, sa casquette sous le bras.

— Mademoiselle Morandy, prononce-t-il d'un ton protocolaire en hochant la tête.

Je lui souris poliment et évite aussitôt son regard, ce même regard qui m'a aperçu dans une situation plus qu'embarrassante, la main de son patron dans ma culotte. Je le laisse entrer et lui montre du doigt les quelques bagages qui attendent sagement sur le sol. Il remet sa casquette puis s'empare des cartons et du sac avant de tourner les talons. Après un dernier panoramique de la pièce, auquel se greffe un douloureux pincement au cœur, j'attrape ma valise et referme la porte. Je savais qu'un jour ou l'autre, je quitterais cette chambre, mais jamais je n'aurais pensé que se soit d'une façon aussi cavalière. Je garde les yeux rivés sur le sol, tout en déviant mes pensées de ces chuchotements qui accompagnent ma sortie. Je sais parfaitement ce qu'ils pensent tous de moi. Je ne suis qu'une salope à leurs yeux, celle qui se fait entretenir par un homme plein aux as, pour qui elle ouvre gentiment les cuisses.

Voilà à quoi j'en suis réduite ! Pauvre moi !

Le fait de me retrouver enfin à l'abri dans la voiture ne me rassure pas pour autant. Je ne sais pas du tout ce qui m'attend. La vie avec Nathan est une aventure que je ne suis pas prête à vivre, et pourtant, je l'ai acceptée. Je prends mes quartiers chez un inconnu, chez un homme dont j'ignore tout, à part sa faculté à me faire grimper aux rideaux et à me déstabiliser. Je ne sais rien de sa vie, de sa famille, et je doute qu'il soit le genre d'homme à se livrer aussi facilement, surtout à une étudiante lambda à qui il offre l'hospitalité. Plus la voiture s'approche de ma nouvelle demeure, plus le stress m'envahit.

Qu'est-ce que je suis en train de faire ?

Lorsqu'elle franchit le portail de cette immense propriété, le sang s'achemine brutalement dans mon cœur, me faisant presque suffoquer. Le souffle court, les mains moites, je sors par la portière que le chauffeur vient d'ouvrir.

Qu'est-ce que je fais ici ?

Je m'arrête au pied de l'escalier et lève la tête vers cette maison, avec le sentiment de commettre une erreur monumentale. La boule au ventre, je grimpe à reculons les quelques marches qui mènent au perron.

Ne reste pas ici, dis-lui que tu as changé d'avis !

Mes pensées s'entremêlent dans ma tête, je manque soudainement d'air. Je suis à deux doigts de faire demi-tour quand la porte se déverrouille. Une dame d'environ quarante ans se matérialise devant moi. Grande et élancée, vêtue d'un uniforme noir, elle incarne parfaitement le statut de gouvernante, pourtant ce sourire chaleureux sur ses lèvres la rend moins guindée.

l'emprise des sensOù les histoires vivent. Découvrez maintenant