Chapitre 40

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Cassandre

C'est un long frisson recouvrant ma peau, qui me force à me réveiller. Je tâtonne le drap pour le remonter sur mon corps et constate que je suis complètement nue. L'avant-bras posé sur mon front, j'essaie d'ouvrir les yeux, mais le soleil me force à cligner plusieurs fois des paupières avant d'y parvenir. Je me sens nauséeuse, l'intérieur de ma tête est tout aussi barbouillé que mon estomac. Déboussolée, je tente de m'asseoir, mais en vain. La sensation désagréable d'être passée sous un rouleau compresseur me fait grimacer. Je ne sais pas comment je suis arrivée dans mon lit, et je n'ai aucun souvenir de la soirée de la veille. Je me rappelle seulement avoir avalé un verre de champagne, puis c'est le trou noir. Je me recroqueville sur moi-même pour chasser ce tourbillon qui persiste à englober ma tête, mais une terrible envie d'uriner m'oblige à quitter le lit. Les quelques pas qui me mènent à la salle de bain sont un enfer, mes jambes sont semblables à de la gelée, molle et flasque. Le fait de me soulager déclenche une brûlure dans mes chairs et m'arrache un cri de douleur. Je passe une main tremblante sur mes cuisses, striées de petits bleus.

Mais qu'est-ce qu'il s'est passé ?

Lorsque je jette un regard dans le miroir, j'aperçois des marques rougeâtres sur mon cou et sur mes seins. Un mauvais pressentiment m'envahit, une brutale envie de vomir me contracte le ventre.

Mais qu'est-ce qu'il m'a fait ?

Le sol se dérobe sous mes pieds quand une horrible suggestion m'apparaît. Nathan et son ami n'ont pas... Non ! Je ne veux même penser à cette possibilité. Il faut que j'élude la question avant de m'effondrer. Le cœur affolé et l'estomac au bord des lèvres, j'attrape un morceau de coton pour retirer les vestiges de mon maquillage. Je fais peine à voir. Mon mascara s'amoncelle en paquet sur mes cils et déborde sous mes yeux, vitreux et rougis. C'est à l'instant où j'ouvre la poubelle que mes doutes se confirment. Elle est remplie de préservatifs usagés. Ma nausée s'intensifie brusquement. Je me précipite au dessus de la cuvette des toilettes et vomis à m'en irriter l'œsophage. Un long sanglot s'échappe de ma bouche quand je réalise que j'ai sans doute vu juste. Durant ces dix derniers jours, je croyais avoir subit les pires atteintes à ma dignité. J'ai laissé Nathan faire de moi son jouet, dans l'espoir de l'accompagner à ce bal. J'ai tout accepté. Tout. Chaque petite parcelle de mon corps a subi ses assauts. Seul le visage de Julian m'aidait à supporter ce calvaire, ces petits jeux sexuelles auxquels il me soumettait avec beaucoup de plaisir. Je ne sais pas comment j'arrive encore à me regarder dans une glace. Je me sens humiliée, gangrenée dans ma chair, l'âme bafouée. Ce matin plus que jamais, je ne ressens que du dégoût pour la personne que je suis. Je ne sais pas si je retrouverai un jour, toute l'estime que je me portais. Ça me semble invraisemblable. En traînant les pieds, je remplis la baignoire et m'y plonge entièrement. De longues minutes, je laisse ma tête sous l'eau en priant qu'elle m'absous de mes pêchers. L'air commence à me manquer, je me sens défaillir, pourtant je ne me suis jamais senti aussi bien depuis longtemps. Peut-être que si je restais là encore quelques secondes, tout ça ne serait qu'un mauvais souvenir. Je m'accroche aux rebords de la baignoire, à la limite de ce que je peux endurer. Mes poumons sont plus secs que des raisins, mais je m'en fiche. Plus que quelques secondes et tout s'arrêtera. C'est alors que le visage de Julian apparaît dans le brouillard qui m'engloutit lentement. Dans un dernier sursaut de conscience, je hisse ma tête hors de l'eau en reprenant une longue inspiration. Mon cœur s'autorise à battre de nouveau, il martèle ma poitrine durement. Je pousse un cri libérateur. Je bats l'eau de mes mains. Je pleure. Je suis démolie, aussi bien physiquement que moralement. Cet homme est un monstre et moi, je suis pire que lui en acceptant de le laisser m'abuser de la sorte. Je frisonne. L'eau est froide, aussi glacée que mon amour propre. Fébrilement, je m'enroule dans un peignoir de bain avant de m'asseoir sur le rebord de la baignoire. Mes lèvres frémissent à nouveau. Ma gorge se serre douloureusement. Les larmes affluent au bord de mes cils et coulent sans prévenir sur mes joues. Je prends sur moi. Je respire un grand coup. Sans conviction, je passe une robe et essaie de camoufler les ravages que mes pleurs ont causés sur mes yeux. C'est armé d'un courage que je ne me connais pas, que je quitte ma chambre. Je rejoins la cuisine où Nathan est installé à table, un journal entre les mains et une tasse de café fumant posé devant lui. Il lève les yeux à mon arrivée, un sourire charmeur sur les lèvres. Je ne m'attarde pas à ce détail qui me faisait tant d'effets. Je me poste devant lui et annonce d'une voix dure :

l'emprise des sensWhere stories live. Discover now