Chapitre 42*

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Cassandre

Cette nuit-là, je n'ai pas réussi à dormir. Dès que mes yeux se fermaient, le visage menaçant de Nathan m'apparaissait. Même loin de lui, le souvenir de sa colère me rend encore nerveuse.

Vais-je ressentir longtemps cette peur en moi ?

Il va sans dire que Nathan a marqué ma vie. Chaque moment que j'ai passé en sa compagnie restera gravé dans mon esprit. Il s'est emparé de chacun de nos rendez-vous de manière perfide. Comment me rendre dans une galerie d'art, sans penser au soir où il m'a prise de force ? Quels souvenirs vais-je garder de ma chambre à la fac, si ce n'est l'image de Nathan, la tête entre mes cuisses ? Aurais-je le courage d'écouter de nouveau Carmen en occultant le souvenir dégradant de cette fellation ? Tout, absolument tout ce qu'il m'a fait aura un impact sur ma vie.

Comment ai-je pu être aussi influençable ?

Pour trouver ma faille, il faut sans doute creuser plus profondément. Nombreux psychanalystes avancent que l'enfance est le point de départ pour se débarrasser de certaines valises. Ils ont probablement raison. En cinq ans, ma tante a ruiné toutes ces années pendant lesquelles ma mère m'a appris à être forte, à me battre pour mes idéaux. Cette catholique acharnée m'a inculqué comment obéir sans rechigner. Je devrais peut-être retourner là-bas, dans cette maison de vieille fille, pour lui cracher au visage qu'elle a fait de moi une petite chose fragile, sans répondant, sans caractère, au détriment d'une femme épanouie.

Elle n'est qu'un clone de Nathan affublé d'un jupon.

Pourtant, dans le méandre de ma vie, le destin m'a offert ce garçon, assoupi près de moi. Je ne sais pas ce que je serai devenue sans lui. Mon sommeil agité ne l'a pas épargné, mais face à mes terreurs, ses bras m'ont protégés. Il est mon sauveur, le Vendredi de mon âme endolori. Lentement, mes doigts se mêlent à ses boucles noires. Ses paupières s'ouvrent sur ses iris si claires, ses lèvres s'étirent déjà en un sourire amoureux. Mon cœur fond comme la cire d'une bougie, et il est aussi brûlant d'amour que sa flamme. Nous restons un long moment, allongés l'un en face de l'autre, les yeux dans les yeux. Julian n'a pas besoin de me dire ce qu'il ressent, son regard m'en apprend plus qu'un long discours. Timidement, j'approche mon visage. Ses lèvres m'appellent, elles s'entrouvrent pour recevoir ce léger baiser que je leur donne. Cet effleurement est doux, bouleversant, mais mis à sac par le portable de Julian dont la sonnerie retentit brusquement. Je souris contre sa bouche tout en murmurant :

— Sauvés par le gong !

Il grogne puis se retourne pour attraper l'objet du délit. Ses sourcils se froncent légèrement alors qu'il fixe l'écran :

— C'est Louna !

Je me redresse sur mon avant-bras, tirée sauvagement de ma petite bulle. Julian décroche, et aussitôt la voix nasillarde et colérique de ma meilleure amie explose à travers l'appareil.

— Putain mais qu'est-ce que tu fous ? Tu devais m'appeler. Je suis morte d'inquiétude, je n'ai pas fermé l'œil de la nuit. Dis-moi qu'elle est avec toi ?

En grimaçant, Julian décolle le téléphone de son oreille et me lance un regard exaspéré par dessus son épaule.

— Elle est à côté de moi.

— Ok ! J'arrive.

Un bip nous signale qu'elle vient de couper la communication sans plus de cérémonie. Du Louna tout craché. Julian s'effondre sur son oreiller et passe ses mains dans ses cheveux en grommelant :

l'emprise des sensWhere stories live. Discover now