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Je regarde à l'horizon, mon épaule posée sur le mât d'artimon. Il est mon cerisier, il est mon peuplier de mon passé qui me soutient des mouvements incessants des flots.

Au milieu de l'océan Atlantique, je regarde au loin au-delà de la courbure de la terre, je vais y chercher un avenir meilleur dans le Nouveau Monde, en laissant dans le sillage de mon vieux bateau mes souvenirs d'une époque sombre, je fais une course avec le soleil.

Pris dans mes pensées, je n'entends pas les petits pieds monter l'escalier qui mène à la cabine, ils se dissimulent au milieu des bruits de clapot et des sifflements des haubans. Mais je sens cette petite main qui prend la mienne, douce et fragile, la plus belle que la vie ne m'est jamais donnée l'occasion de toucher et de contempler.

– Papa, on va manger !

– Et qu'est-ce que l'on mange ! Une dinde au marron, comme à Noël ?

– Papa ! Il n'y a pas de neige ici. Comment veux-tu que le père Noël arrive avec son traîneau ?

– Mais il vole dans le ciel ! Retour à l'intérieur ma chérie, j'arrive tout de suite.

Mais elle continue à me serrer la main, le regard fixe, au travers de ses yeux, je ne vois que sa mère.

Je pose un genou à terre pour me mettre à sa hauteur sans enlever mes lunettes de soleil, je ne veux pas qu'elle puisse percevoir la tristesse dans mon regard.

– Qu'est-ce qu'il se passe ma princesse ?

– Tu mens...

– Pourquoi dis-tu ça.

– Tu m'as dit qu'elle était au ciel. Tous les jours je le regarde mais je ne la vois pas, ce sera pareil pour le père Noël.

*

Memento MoriWhere stories live. Discover now