Memento Mori

BaBy Max 😈

– Tu sais jeune homme, il va falloir coopérer ! Tu ne peux pas rester muet indéfiniment ?

Au commissariat central de la ville de Grenoble, un fonctionnaire de police essaye tant bien que mal de questionner un adolescent aussi loquace qu'une carpe.

– On a appelé tes parents qui ne devraient pas tarder. Le juge pour enfants va peut-être te rencontrer dans la journée. À mon avis, tu vas être un peu plus bavard quand il va t'annoncer ton départ en maison de correction.

Apeurée, une mère de famille pénètre dans un commissariat pour venir récupérer son ado en pleine crise d'adolescence , crise qui semble avoir commencée dans sa plus tendre enfance. Elle n'a pas besoin d'être guidée dans les sombres et impersonnels couloirs du lieu, elle sait déjà où aller. Elle a honte. Elle parcourt l'endroit avec l'impression d'être la responsable de l'usure du parquet. Elle fait irruption sans frapper dans ce bureau, et marque un temps d'arrêt, le regard noir de colère sur ce fils qui semble totalement indifférent à son avenir. Elle aimerait pouvoir le frapper, l'attraper par le cou et le secouer comme un prunier, mais elle sait que cela n'aurait aucun effet. C'est la violence des autres qui nourrit ce garçon. Il a appris à maîtriser les sports de combat pour la surmonter. Depuis toujours, il utilise la brutalité pour vaincre, le mal pour faire ce qu'il croit être le bien. Il emploie cette violence à des degrés différents en fonction de la menace qui se confronte à lui, mais aujourd'hui, il est allez trop loin.

– Qu'est-ce ce qu'il a encore fait, inspecteur ?

– Aujourd'hui, c'est grave Madame Deveaux. Il y a eu un différent entre des jeunes de son lycée et de quartier, sur fond de trafic de drogue. L'une de ses connaissances a payé cher l'expédition punitive. Il est actuellement en soins intensifs au CHU de la Tronche.

– Mais qu'a fait mon fils ?

– On l'a retrouvé dissimulé dans un arbre, armé d'un fusil en train de faire feu. Vraisemblablement par vengeance, vue que son acolyte du CHU n'était rien de plus que le fusible du petit trafic de votre fils.

- Il y a des blessés ! lui demande cette mère désarmée devant la personnalité de son garçon.

– Justement, un plus que sérieusement. On vient de m'annoncer que son pronostique vital était engagé. Le malheureux a pris un projectile en pleine tête.

Un sourire se dessine sur le visage de l'adolescent. Face au policier, il n'essaye pas de cacher sa satisfaction.

- Lequel ? demande le jeune au fonctionnaire, avec aplomb.

Si l'agent de police se réjouit enfin de pouvoir inscrire un mot sur le procès-verbal, il se pousse de son bureau, et s'installe aisément dans son fauteuil, les mains derrière la tête. Perplexe, il prend un peu de temps pour cerner les contours de ce jeune homme, qui n'a rien de commun avec ce qu'il a l'habitude de traiter. Il a parcouru le dossier déjà très épais de ce délinquant atypique. Très bon élève, QI de 135 et sportif de haut niveau. Pourtant dans ce bureau, l'officier récemment promu en a vu passer, mais jamais de ce pédigrée. Il ne semble pas avoir de limite à la violence. Il est complètement détaché de son propre sort, comme s'il avait anticipé la sanction qu'on allait lui infliger. Pire encore, il semble l'accepter avec un calme sidérant. Le mémo de la brigade des stup en interne est sans équivoque sur le sujet: 

"De son jeune âge, Max est déjà à la tête d'un trafic qui se développe à une vitesse exponentiel, avec toutes les caractéristiques d'un futur ponte du milieu qui prend racine dans le quartier de l'Abbey. Son CV est déjà lourd, et mise à part l'erreur qu'il vient commettre et au vue de la chronologie de son passif, le gamin progresse et s'affine aussi vite qu'il devient discret. La voie royale pour un truand de premier plan, si le pavé ne stoppe pas sa progression fulgurante. Aujourd'hui, le gamin ajoute une ligne à son palmarès, qui devrait un jour lui permettre d'ouvrir la porte des fichés au grand banditisme, et par ailleurs, devenir un élément extrêmement dangereux si l'on ne le met hors d'état de nuire au plus vite".