NOTE DE L'AUTEUR

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Moi qui écris sous un pseudonyme, je pourrais vous raconter une histoire triste les lèvres tremblantes. L'histoire d'un enfant né lors d'une nuit sans étoile dans les chiottes publiques, avec pour seuls cadeaux de noël, un bout de charbon et une orange. Rien de tout cela et je le garderais pour moi.

On apprend réellement à connaitre les gens, que quand on commence à discerner ce qui se cache derrière l'enveloppe sans les artifices qui l'habillent, à l'instant où c'est le cœur qui communique à notre place sans restriction.

Depuis toujours, pour trouver des réponses à mon voyage existentiel, ou m'échapper un temps à ces questions qui me pourrissent la vie sur le pourquoi et le sens du vivant, je tourne la première page d'un roman. Je dois dire, en exagérant le trait, que j'ai dû lire la moitié de la bibliothèque d'Alexandrie et personne ne pourrait me contredire, elle a été réduite en cendre. Hormis le plaisir que j'ai de conté une histoire à mes enfants avant de les coucher, je ne suis pas vraiment sûr d'aimer la littérature. Je parcoure un Tolstoï ou William Burroughs avec indifférence, peu d'ailleurs mon marqué, sauf peut être Les trois mousquetaires, La cuisinière d'Himmler ou Dynamique du chaos de Guilberti.

Pourquoi je lis alors !

Pour combler ma solitude face à un monde que je ne comprends pas. Je superpose un décor pour étouffer mes idées noires, un laps de temps qui me permette de museler une partie de moi qui m'habite sans mon consentement. J'ai une hypersensibilité qui exacerbe tout ce qui m'entoure. Une bipolarisation qui rend mes joies aussi expansives que mes peines, un yin et yang de taille exponentiel. Je fuis les médias qui étalent la misère du monde en continu, comme si je devais culpabiliser sur la chance d'avoir vu le jour dans ce pays. Ce n'est pas moi qui décide des guerres, ce n'est pas moi qui dit que la place d'une femme est plus bas que terre, ce n'est pas moi qui condamne à mourir de faim tout ces enfants de Somalie ou du Yémen, ce n'est pas moi qui agrandit le trou de notre arche à la dérive dans l'univers. L'injustice me rend fou, la vision du petit Aylan Kurdi qui embrasse notre sable me fait faire des cauchemars, mes larmes ont élevé cette mer d'un mètre dans laquelle il a trouvé la paix. Surtout, ne me donnez pas le pouvoir. Je suis un homme qui n'a pas de mesure étalon en amour comme dans la violence, ni de plafond de verre encore moins de sol, je ferais passer Sodome et Gomorrhe pour une simple anecdote juste pour apaiser ce qui me révolte.

Je voyage dans un monde où partout, à chaque coin de rue je croise le divin : un lever de soleil avec la rosée du matin, l'éclosion d'une fleur dans mon jardin, la créativité du genre humain, mais le tout caché par un linceul de couleur terne. Je porte des lunettes noires pour que personne ne puisse lire dans mon regard ma perdition, j'esquisse une apparence stable pour dissimuler au second plan une peinture chaotique de Franck Bailleul.

Je suis un anticonformiste dans le microcosme des écrivains, étiquette que d'ailleurs je n'assume pas. Je ne porte pas les mèches à la Molière et ma seule gestuelle de dandy est d'un poétique obscène, qui salut d'ailleurs bien haut, les responsables de ce monde merdique.

Contrairement à ce que vous pourriez penser, j'aime la vie, à la folie, le temps qui passe est mon ennemi. Je suis matinal pour en dévorer chaque parcelle, abandonné ne serait-ce qu'une seconde à mon sommeil et pour moi du gâchis.

Je me suis retrouvé, un jour, face à un problème cornélien, je ne savais plus quoi lire. J'avais dans ma bibliothèque, le coffre de ma bagnole, un choix important et de qualité, mais l'envie n'était plus là. Alors je me suis dit : Est pourquoi pas moi, après tout, moi aussi j'ai des choses à dire et à raconter. J'ai bien trop lu les histoires des autres, à eux maintenant de lire la mienne, mon conte de fées habillé d'une tenue SM avec un fouet au bout du poignet.

Memento MoriWhere stories live. Discover now