Chapitre 63

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Le soleil me fait fermer les yeux.Je laisse mes doigts se battre contre le vent. Et right down the line m'oblige presque à bouger les épaules. Sa main sur ma cuisse, on suit la voiture de William et Brook. Je suis heureuse. Littéralement. Heureuse d'aller visiter Steinfield. J'en ai parlé à Ashton, et même si il fait semblant que je lui ai forcé la main, je suis sûr que ça lui fait plaisir de voir à quoi pourrai ressembler sa vie.

Cayley a insisté pour monter avec nous dans le pick-up que William nous a prêté pour la route. Anthea quant à elle, n'est évidemment pas montée en ma compagnie. Ça va faire 10jours qu'on ne se parle pas. Elle a bien tenté mais mon silence a finit par la rebuter. Ça va faire un moment je sais, mais pour l'instant je ne peux pas réglé ça, à chaque fois que je la vois mon esprit s'embrouille, et ma colère double. Je repense à toutes les choses qu'on a fait tous les trois et toutes les fois où elle prenait sa défense, ou toutes les fois où elle était proche de lui. Et je me pose un tas de questions. Peut-être que Matt le savait et qu'il ne me l'a jamais dit? Je préfère ne pas y penser encore un moment. Je ne l'ai pas vraiment recroiser depuis que tout s'est terminé, et bizarrement le voir de loins au lycée, ne me fait rien. Mais je sens son regard quelques fois, peut-être que me voir avec les Devils, lui fait quelque chose à lui.

J'ai appris ces derniers jours à seulement profiter de ce qui se passe. Pour l'instant ça me convient. J'ai passé ces 10 jours avec Ash, à rigoler, à traîner au QG avec tous les Devils, et j'ai même commencé à apprendre la moto. Et les croûtes sur mes genoux prouvent bien que je ne suis pour l'instant pas très douée. On a pas entendu parler des Rayons, ni de Tristan. Et même si une épée de Damoclès plane sur toutes nos têtes. Personne n'y prête garde, ou alors on fait tous semblant. J'ai assisté à 3 cours « d'auto-défense » avec les filles. Ashton n'en sait rien, mais la vérité c'est que ça me rassure, ça me rassure de pouvoir me servir d'une arme, comme ça me rassure de savoir que même si la fuite semble la meilleure solution pour moi, je peux tenter certaines choses en dernier recours.

On aborde plus ce genre de sujet tous les deux. Je ne lui pose pas de question, et de toute façon je sais bien que pour l'instant il ne me donnera pas de réponse. Alors je profite, je profite de lui, il m'accorde du temps, enfin on s'accorde du temps. Mais un jour, ça ne me suffira plus. Et il me faudra bien pénétrer cette muraille.

Les cours se passent biens, et même si à force de s'embrasser dans des salles de classe au hasard, je finis quelques fois en retard, je pense sincèrement que ça vaut le coup.

—A quoi tu penses ?

À quel point tu me rend heureuse. Bien sûr que non je n'ai pas dit ça. Sa tête est déjà assez grosse comme ça. Ma conscience lui envoie des cœurs. On ne l'avait pas beaucoup entendu celle la.

Je l'observe sans ménagement, je ne me prive plus. Sa barbe de quelques jours, ses cheveux ébouriffés. Il garde les yeux fixés sur la route, mais quelques fois, ils s'échappent et viennent se poser sur moi. Je le trouve simplement beau.

—A ta conduite déplorable. Je dis en levant les yeux au ciel.

—Vas-y répètes? Sa main devient une arme impitoyable et il me pince l'intérieur de la cuisse.

—T'es complètement malade! Je lui dis en rigolant.

—Continues de critiquer et je te laisse sur le bas de la route.

J'adore ce sourire, cette atmosphère légère. Depuis 10 jours, c'est toujours le cas. Et ça, ça fait un bien fou.

—T'oseras pas le refaire.

Je lui lance un petit pic c'est vrai. Je me souviens lorsqu'il m'a abandonnée seule sur ce pont. C'est derrière nous. On était pas ensemble, et j'ai l'impression que c'était il y'a une éternité pourtant ce n'était pas il y'a si longtemps que ça. Et je n'oublierai certainement jamais ce qui c'est passé. Ça me fait penser que je ne dois pas oublier qu'il a des mauvais côtés.

Et même si aujourd'hui ses sautes d'humeur semblent avoir disparu, je sais que je dois rester sur mes gardes pour ne pas chuter de trop d'étages si il finit par devenir tout ce que je pourrai fuir.

—T'as raison, je le referai plus jamais.

Il attrape ma main, et en embrasse le dessus. Un voile sombre nous surplombe, on vient de rentrer dans le mountain tunnel. Il garde la main dans la sienne, tout en passant les vitesses. Outre la passion qu'on a vite ressentie, je sens de l'amour, et je suis tellement rassurée. J'avais vraiment peur que tout ne soit que obsession, passion, et embrouille. Mais je me sens aimée.

—On arrive quand??

—J'en connais une qui en marre de jouer avec sa poupée super moche! Je lui dis en me retournant vers elle. Je lui tire la langue et la voila qui fronce les sourcils.

—Elle est super belle d'abord!!

—Va falloir qu'on revoit ta définition de beauté, ça risque de nous poser des problèmes sinon.

Je ricane à la remarque d'Ash, alors que Cayley boude, les bras croisés.

—C'est bon Cayley c'est pas si long 2 heures, on arrive dans 15 minutes.

Je lui dis en tentant de lui chatouiller les pieds. Elle gigote et rigole un peu. Et la voilà de nouveau toute guillerette. Elle regarde par la fenêtre. J'aimerai bien me souvenir du genre de pensée qui me traversaient l'esprit à cet âge là.

Une image de la petite fille que j'ai vu chez mon père, m'assaille les pensées. Il m'a envoyé des messages. Mais je n'ai jamais denier répondre. Qu'est-ce que je pourrai dire? J'ai déjà tout dit. On s'est déjà tout dit. Je vais le laisser avec sa famille, je n'ai pas besoin de voir son bonheur et le soit disant « nouvel homme » qu'il est devenu.
Enfin je crois. Bien sur que je mens, je meurs d'envie qu'il me prenne dans ses bras.

La lumière rejaillit. Et la mer s'offre à ma vue. Je tourne la tête pour mieux l'observer. Nous sommes à deux heures de la mer, pourtant je peux compter sur les doigts d'une main les fois où on a quitté Stir Fall.

—T'aimerai faire quoi après le lycée? Je lui lance en gardant les yeux rivés sur la mer.

—Aller à la fac je crois.

—Tu crois?

Il tapote sur le volant du bout du pouce.

—A vrai dire j'y avais pas vraiment pensé. Je me suis jamais vraiment imaginé vieillir. J'ai toujours eu l'impression que j'allais...

Il jette un oeil à la petite fille sur la banquette arrière. Elle chantonne. Mais comme si il ne voulait pas la brusquer, il réfléchit à une autre façon de tourner sa phrase.

—... que j'allais pas rester assez longtemps pour avoir la vingtaine.

—Tu te vois pas vieillir ?

—Jusqu'à maintenant je me suis jamais imaginé les cheveux grisonnants ou avec des enfants, et je me voyais mal dans un monde sans les Devils.

—Et maintenant? Tu parles au passé, alors est-ce qu'aujourd'hui c'est différent?

On s'arrête au feu, et je vois le panneau indiquant Steinfield. Il se tourne vers moi et me mets une pichenette sur le front.

—Eh!

—Maintenant, bah disons que je vais visiter une université avec ma copine.

J'adore entendre ça, ça me fait bêtement sourire.

—Redis le.

—Redire quoi?

—Tu sais très bien!

Je rigole pendant qu'il glisse de nouveau sa main sur ma cuisse.

—Je veux aller à l'université avec ma copine.

Donc comme je le disais, je suis heureuse.

Bloom T.1 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant