2. Fantôme du passé

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SETHY

— Le corps a été retrouvé dans un entrepôt du chantier naval. Ce dernier est fermé tous les soirs et nous avons compté, seule une petite dizaine de personnes aurait pu avoir accès à la clé.

— Et alors ? Qu'ont donné les interrogatoires ?

Le commissaire me lance un regard agacé auquel je réponds par un haussement de sourcil. Je commence à m'impatienter et l'homme ne cesse de répéter des détails que je connais déjà. Ses lèvres se pincent en une moue contrariée tandis qu'il repose la liasse de papier sur son bureau.

— Si vous êtes ici, vous vous doutez bien que nous n'avons trouvé aucun suspect. Tous les hommes ont un alibi plus ou moins solide et nos recherches ne donnent rien.

— Nous allons les réinterroger. Je veux que chaque homme travaillant sur le chantier soit interrogé, qu'il ait accès à la clé ou non. Je veux également qu'on étudie l'entourage de chacun des employés. Mon collègue Hans s'en chargera.

Le concerné hoche la tête tandis que le commissaire tente de réprimer la colère qu'il souhaiterait déverser sur moi. Je sais que mon ton condescendant ne lui plaît pas, mais je ne suis pas venu ici pour enfiler des perles. Je veux résoudre cette affaire et me barrer le plus loin possible de cette ville puante.

— Rendons-nous sur les lieux. Je veux voir l'endroit exact où la victime a été retrouvée.

A nouveau, Hans acquiesce et nous quittons le bureau du commissaire. A peine mettons nous un pied dehors que je m'allume une clope et remonte le col de mon manteau. J'avais oublié à quel point il faisait froid dans cette région de merde.

— Tu devrais surveiller tes paroles, Seth, lance mon collègue en coinçant une cigarette au coin de ses lèvres. Faut qu'on se fasse bien voir, j'ai pas envie qu'on tente d'entraver notre enquête juste parce que t'auras un peu trop ouvert ta gueule.

— Ce sont des incapables. Il faut bien que quelqu'un prenne les devants.

Mon souffle forme une buée blanche qui se mélange à la fumée de ma clope. Impassible, j'observe cette dernière s'évaporer dans la grisaille ambiante et soupire en voyant les nuages s'amonceler dans le ciel. Il va encore pleuvoir...

— Peut-être, mais on n'est pas chez nous. Ce gars-là ne te passera pas tous tes coups d'éclat.

Soudainement agacé, je jette ma clope à moitié consumée par terre et l'écrase de mon talon. Sans répondre, je dévale les marches qui mènent au poste de police et enfonce mes mains dans les poches de mon manteau. Une fois en bas, je me retourne vers mon collègue qui continue de fumer tranquillement et l'apostrophe d'un ton sec.

— Allez bouge-toi, je veux voir le chantier avant qu'il pleuve !

***

Le chantier naval est bien plus grand que dans mes souvenirs. A l'époque, il se constituait d'un seul petit entrepôt ridicule et d'un atelier trop étroit pour réparer tous les bateaux qui en avaient besoin. Les pêcheurs du coin ne cessaient de râler parce qu'ils devaient attendre des délais interminables et bien trop peu rentables le temps que leur navire puisse être remis à l'eau. Désormais, je comprends bien que ce chantier est l'un des cœurs économiques de la ville.

Il est à peine neuf heures, mais il grouille déjà de gens qui ne cessent de crier d'un bout à l'autre des quais dans un jargon que je comprends à moitié. Hans et moi nous dirigeons vers le hangar d'hivernage, là où a été retrouvé le corps. Ce dernier était à moitié dissimulé sous la coque d'un navire de pêche et c'est l'un des charpentiers qui l'a retrouvé quand il est arrivé le lendemain matin.

Raz de marée [En correction]حيث تعيش القصص. اكتشف الآن