9. Miroir inversé

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HAZEL

6 juin 2002

Fin de l'année de Seconde

Je suis hors de moi. De toutes les personnes présentes dans la classe, il a fallu que la prof me mette avec l'autre connard. Je suis certain qu'elle l'a fait exprès : elle sait que nous nous détestons et que j'aurais jamais travaillé avec Karl. Comme si j'allais plus travailler avec ce lèche-cul. Et puis, honnêtement, qui s'implique pour de vrai dans un exposé d'anglais ? Tout le monde s'en branle de cette matière, non ?

Je rumine tellement que je rate mon virage et parviens à sauter de ma planche à la dernière seconde. Cette dernière vient s'encastrer dans le mur et je râle de plus belle. Quelle journée de merde !

Je ne supporte pas le Chinois. Depuis le premier jour, il m'insupporte au plus haut point et je rêve de frotter sa gueule contre du crépi. Histoire de lui faire passer l'envie de me regarder de haut. Ce mec rassemble à lui seul tout que je hais le plus au monde : il est hautain, prétentieux, bon élève et il se soumet sans la moindre difficulté à n'importe quelle règle. Si on lui dit de faire ça, il le fait. Si on lui dit d'aller quelque part, il le fait. Je suis sûr qu'il fait partie de ces trous du cul qui attendent que le feu soit vert pour traverser.

Putain, je suis tellement énervé que je suis capable de lui arracher les yeux dès que j'arrive. Pour calmer mes nerfs, je sors mon paquet de clopes de ma poche et en coince une entre mes lèvres. Je commence à être nerveux. Non pas que j'aie peur de lui, hein, mais venir chez lui, c'est quelque chose d'inhabituel. Je déteste ça. Qu'est-ce que j'ai à foutre dans sa baraque ? Déjà, moi, mon idée de base, c'était qu'il fasse tout le boulot et que je me rajoute à la dernière seconde pour faire l'oral. Bruce Lee était d'accord avant que la prof ne nous oblige à travailler en coopération. Et bien sûr, puisque la prof l'a dit, il s'exécute. Il me dégoûte.

Perdu dans mes pensées rageuses, je ne réalise pas de suite que je suis arrivé à destination. Lorsqu'enfin je lève les yeux, ma respiration se bloque dans ma gorge et je reste bouche bée.

Wow. Qu'est-ce que c'est que cette baraque ?

Une immense maison au portail étincelant se dresse devant moi et je ne crois pas avoir déjà vu quelque chose d'aussi impressionnant. Donc l'autre connard vit là-dedans ?

Soudainement impressionné, je fais un pas en arrière, prêt à déguerpir, avant de me reprendre. Si cet enculé pense gagner en étalant son fric comme ça, il ne sait pas à qui il se frotte !

Agacé, je sors le portable à clapet que mon frère a bien daigné me filer et appuie sur le contact enregistré la veille.


A : Connard

Jsui la


Pendant dix minutes, aucune réponse ne me parvient et je commence à me demander s'il ne va pas juste me laisser planter là. A la pensée qu'il ait pu se foutre de moi et me laisser poireauter dehors comme un clochard, je me sens blêmir.

Pourtant, le portail s'ouvre finalement et je m'avance dans l'allée bordée de galets blancs. Mais vraiment, c'est un prince ou quoi ?

J'ai beau tourner la tête dans tous les sens, je suis émerveillé par tout ce que je vois : des plantes exotiques – comment peuvent-elles pousser dans cette région ? -, une petite fontaine, trois statues et un salon de jardin dans lequel je rêverais de faire une sieste. J'aurais jamais cru que ce connard soit aussi riche.

Raz de marée [En correction]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant