21. Des éléphants et du lilas

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SETHY

La chambre est petite et lumineuse. Sur les murs couleur lilas, quelques photos de voyage ainsi que des posters de célébrités sont accrochés. Au fond, coincé entre l'armoire et la fenêtre, un minuscule bureau couleur acajou déborde de livres et de cahiers de dessin.

Je m'approche doucement du miroir pour observer les photos punaisées dessus qui mettent en scène Leila et ses amies. La jeune fille est rayonnante : ses épaisses boucles brunes tombent sur ses épaules, ses grands yeux noisettes brillent de mille feux. Elle semble heureuse et épanouie.

Je tente de discerner des micro-détails qui pourraient me révéler que ce bonheur n'est que factice, mais non, il n'y a rien. La gamine semblait avoir une vie parfaite et aucune raison de tremper dans des affaires louches. A-t-elle simplement été tuée par quelqu'un qui la jalousait ?

Las, je m'assois sur son lit et remercie le ciel que Hans ne soit pas avec moi ; il ne supporte pas que l'on touche ou dérange quoi que ce soit chez les victimes. A chaque fois qu'il m'engueule pour avoir foutu en bordel une maison ou un appartement, je me demande s'il est conscient qu'il est flic et que la recherche de preuves est une partie constituante de son métier. Je ne sais pas quel est son problème avec la violation d'intimité, mais j'ai fini par comprendre qu'il ne faut pas l'emmener fouiller chez les gens. De toute façon, il ne veut plus venir.

Je me laisse tomber sur le dos et fixe le plafond d'un air blasé. Rien. Je n'ai rien trouvé de plus que les collègues du commissariat. J'espère au moins que ces derniers auront eu davantage de chance en allant interroger les personnes dont le nom est inscrit sur la liste parce que je commence à désespérer.

Un petit mobile est accroché au plafond. Des éléphants et des étoiles en coton se balancent doucement au gré des courants d'air qui traversent la pièce. Je suis surpris par cette décoration infantile qui jure avec le reste de la chambre. Est-elle nostalgique de son enfance ?

Soudain, je me redresse, frappé d'une illumination. Je me mets debout sur le lit et tends une main vers le mobile. Quelle taille faisait Leila déjà ? Un mètre soixante-huit ? Ça correspondrait bien.

Impatientes, mes mains se mettent à tâter chaque partie du mobile, chaque éléphant et chaque étoile. Et je le sens enfin. A la place du rembourrage en coton, l'un des éléphants semble contenir un petit objet solide et rectangulaire. Le cœur battant, je m'empresse de récupérer les gants nitriles que j'avais posés sur le bureau et tire prudemment sur le ventre de l'animal. Très vite, j'aperçois une couture mal faite et je n'ai qu'à forcer un peu pour qu'elle se défasse.

Aussitôt, la coque noire d'un minuscule portable apparaît et un rictus satisfait déchire mes lèvres. La voilà, ma preuve.

Avec toute la délicatesse dont je suis capable, j'extirpe le petit objet de sa cachette, en ouvre le clapet puis tente de l'allumer en priant pour que la batterie ne soit pas totalement morte.

J'ai de la chance, le temps semble n'avoir aucune emprise sur ces antiquités. Je vais directement dans les contacts et une nouvelle fois, un frisson d'excitation me traverse. Il n'y en a qu'un seul et il porte le nom de « Maria ». Comme cette fameuse tante que Leila était supposée rejoindre à Prague. Hum... Étrange d'utiliser un téléphone secondaire pour communiquer avec une personne de sa famille, non ?

Malheureusement, tous les messages ont été supprimés et il va me falloir quémander l'aide du p'tit geek pour en savoir plus sur ce numéro. Mais bordel, enfin, je possède une piste !

La satisfaction diffuse une vague d'adrénaline dans mes veines et je me précipite hors de la chambre de Leila. Je remercie vaguement la mère de famille, lui demande si elle a déjà vu ce portable puis me hâte vers ma voiture lorsqu'elle m'a répondu par la négative.

Raz de marée [En correction]Where stories live. Discover now