Chapitre 31

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— Ça suffit, trancha Neven, en pinçant l'arrête de son nez dans l'espoir vain de faire cesser sa migraine grandissante.

— C'est une erreur, et tu le sais, s'exclama Ivan, son plus proche conseiller.

— Je vois difficilement comment faire autrement, reprit Neven pour ce qui lui sembla être la énième fois. Ils ont toutes les cartes en main pour créer un désastre et ils vont attaquer Davar c'est une certitude, ne serait-ce que pour démontrer aux autres nations qu'elle n'est pas intouchable. Seulement, il leur reste huit amythes. Qui nous dit qu'ils les utiliseront toutes ? Et si c'est le cas, pourquoi toutes les relâcher sur la capitale ? Cela n'aurait aucun sens. S'ils veulent vraiment nous affaiblir, ils s'en prendront à l'ensemble du royaume. Je ne vais pas sacrifier le peuple pour me protéger moi.

Il soupira, las, et ajouta en regardant durement son conseiller :

— Ma vie ne vaut pas plus que celle de n'importe qui. Ce n'est pas une erreur.

Neven avait refuser de rapatrier ses troupes. L'ensemble des régiments déployés sur l'intégralité de l'empire resterait actif et même renforcé. Dès leur retour à Davar, l'ordre avait été annoncé de durcir les contrôles aux frontières puis aux abords des grandes cités clés d'Obsidian.

Il avait confiance en ses soldats mais il savait l'ennemi malin et extrêmement préparé, preuve en était la facilité avec laquelle ils avaient réussi à voler les amythes dans un premier temps et la facilité avec laquelle l'escadron qui les avait embusqués avait pu pénétrer sur le territoire.

Neven n'était pas idiot : quelqu'un de l'intérieur les aidait. Mais il n'avait définitivement pas le temps d'enquêter là-dessus. Bien sûr, il avait attribué cette mission à un de ses hommes mais le mal était déjà assurément fait.

Neven savait donc que les rebelles allaient attaquer, qu'ils allaient se servir des amythes en les brisant mais il ne savait pas quand ni où. Ce qui était bien sûr très problématique.

Cependant, ce groupe dissident de Tirnaba n'était pas le seul à avoir des espions un peu partout et le réseau que Neven avait mis en place, avec l'aide de l'ingéniosité de son frère et de Justin, n'avait plus rien à prouver. Il était alors certain de plusieurs choses.

Premièrement, ils avaient du temps. Le rapatriement des amythes, leur contrôle et le déploiement sur leur vaste territoire impliquait une importante préparation du côté ennemi. Pour rendre plus mémorable leur acte, Neven pensait qu'ils allaient probablement attendre le treizième jour après la nouvelle lune. Cette date avait une signification personnelle pour Neven. C'était le jour où son père avait finalement succombé à sa maladie. Le jour où il avait accédé au trône. Le jour de ses cinq ans de règne, jour pour jour. Il était probable qu'ils profitent du chaos généré pour tenter d'assassiner Neven. Ils pourraient mettre fin à son règne tout en se moquant de lui. Mais cet éclat d'orgueil était à l'avantage de Neven. Cela lui laissait du temps pour se préparer. S'il avait raison.

Deuxièmement, il était pratiquement certain que Davar ne serait pas la seule cible. S'ils souhaitaient s'emparer de l'empire, une attaque coordonnée sur plusieurs points stratégiques ne pouvait que les servir. Il aurait été stupide de s'en priver. Après — ou pendant — l'attaque, profiter du chaos pour s'introduire dans l'empire leur permettrait de rencontrer une résistance amoindrie. Pendant qu'une partie des forces de l'empire protégeraient les cités contre les Isakis, celles-ci seront forcément diminuées aux frontières.

Evacuer les grandes cités pour garder déployer les soldats aux frontières ne servirait à rien : les terroristes se contenteraient de déplacer leur cible et d'aller là où les dégâts seraient les plus importants. Il ne pouvait assurément pas laisser les habitants sans défense, c'était donc là que les bénis avaient principalement étaient déployés.

Combattre les LégendesWhere stories live. Discover now