Chapitre 9 - Bis - Damien

49 18 2
                                    

— C'est vrai ? s'étonne Mady.

— Euh... et bien, j'ai peut-être une idée qui pourrait vous permettre de vous démarquer. En tout cas, qui vous sortirait de vos habitudes.

— Allez, dis-nous, l'incite Victoria.

— Et si vous preniez un homme dans votre équipe ?

Les filles restent songeuses tandis que Romain déglutit. Il attendait probablement un minimum d'enthousiasme de leur part.

— Ce n'est pas tout à fait la réaction que j'espérais, souffle-t-il peiné.

— Désolée Romain, je voulais pas te vexer. En soi, l'idée est bien. Vraiment, tente de le rassurer Mady, une main posée sur son épaule. Mais je crains de ne pas pouvoir trouver un mec capable de danser et de nous accompagner. Quand je vois déjà la galère pour dénicher des filles qui fassent l'affaire.

— Et puis, bon, je n'ai pas envie de prendre n'importe qui dans l'équipe, si on pouvait éviter les profiteurs, râle Victoria.

Romain grimace à ces mots.

— En fait, je crois qu'il pensait à quelqu'un en particulier, interviens-je.

Un « oh » collectif résonne.

— Oui, ce que je voulais dire, c'est que... je me disais que... peut-être que je...

Mady bondit en avant, faisant sursauter la fille sur mes genoux. Son dos heurte désormais mon torse, sur lequel elle se love finalement. Mes mains glissent avec subtilité de ses hanches à son ventre pour la maintenir en place alors qu'une douce chaleur diffuse irradie mon être.

— Mais oui ! Oui ! Oui, bien sûr ! J'y ai pas pensé, tu es le bienvenu dans notre équipe. Avec plaisir même. Bon, il faut quand même que tu nous prouves ce que tu vaux, que j'en parle avec la coach, mais effectivement ça donnerait un nouveau souffle.

Mady jase désormais avec les mains alors que ses pieds font les cent pas. Ses gestes extravagants traduisent son engouement.

— Puis... bon... un gymnaste, j'ai aucun doute sur ses compétences, le flatté-je.

Romain acquiesce. Son malaise se dissipe en une poignée de secondes sous l'assaut des idées de la capitaine qui fusent. Si au premier abord, elle avait refoulé son enthousiasme, découvrir que Romain souhaite intégrer l'équipe lui a redonné des ailes. Comme un second souffle, l'espoir d'une bonne saison se profile de nouveau à l'horizon.

— Tu m'as refait ma journée ! s'exclame-t-elle finalement.

— Qu'est-ce qui te met autant de baume au cœur ? intervient John.

Accompagnés de ses colocataires, ils reviennent de la cuisine. Tomas prend une chaise, Adrien s'assoit à même le sol, deux autres jeunes femmes dont je n'ai pas retenu les noms se joignent également à notre petit groupe.

— Les filles, je vous présente notre nouvelle recrue, enfin potentielle, mais j'ai peu de doutes vu ses compétences en gymnastique, annonce fièrement la capitaine.

— Alors, levons un toast aux récents membres des équipes, propose Tomas en me fixant du regard.

Un sourire en retour, j'attrape mon verre, me collant un peu plus à Victoria. Chaque mouvement augmente le nombre de papillons qui gesticulent dans mon bas ventre.

— Je me posais quand même une question, osé-je demander. Comment se fait-il que vous m'ayiez tendu un piège ?

Je m'adresse à Tomas, mais je ne peux ignorer la crispation des muscles de Victoria et sa respiration coupée. Tomas formule une réponse tout en fixant les yeux de la femme figée entre mes bras.

— Sûrement le flair !

— Le flair ?

— On s'en fiche non ? remarque John. Tu as prouvé que tu pouvais peut-être être meilleur que moi, ne te plains pas.

— Je me plains pas, je suis juste surpris que vous ayiez pris le temps de voir ce que je valais sur un terrain.

— Disons que j'avais senti un petit truc aux sélections, mais je n'ai pas voulu insister. Puis, quand notre joueur s'est blessé, j'avais besoin de trouver quelqu'un de nouveau à intégrer. Disons qu'on m'a soufflé dans l'oreille que tu pouvais potentiellement faire l'affaire.

Victoria hoquette de surprise, à bout de souffle. Elle s'excuse et s'enfuit chercher à boire, sans un regard pour moi. C'est la première fois que j'ai la sensation qu'elle me fuit et la culpabilité d'avoir fait ou dit quelque chose de mal s'infiltre dans mes veines. Car malgré sa chevelure dorée qui vole dans son dos, je ne manque pas d'apercevoir l'épiderme rougi de son visage. Je note ce changement de comportement dans un coin de ma tête avant de revenir au sujet principal.

— En tout cas merci de m'avoir laissé une seconde chance.

— Avec plaisir ! Mais dis-moi, tu as déjà joué dans une équipe non ?

Je savais pertinemment que le moment de me confier viendrait. Seulement, je ne suis pas encore prêt à tout raconter. Je me contente d'une réponse évasive en espérant que leur curiosité sera satisfaite.

— Petit, j'ai appris le basket en club, puis après je jouais beaucoup avec des potes le soir près de chez mes parents. L'année dernière quand je suis rentré à l'université, je me suis dit que je pouvais intégrer une équipe...

Ma gorge se noue, les dents serrées, je formule néanmoins un mensonge plausible.

— Mais avec les études, je n'ai pas trouvé le temps. Je ne pensais pas pouvoir faire les deux. Finalement, je regrette, j'aurais sûrement pu les conjuguer.

Une demi-vérité vaut mieux qu'un mensonge complet. J'aurais réellement apprécié faire partie du club de l'université où j'ai fait ma première année. C'était confiant et assuré que j'avais fait mes premiers pas dans les études supérieures. Mais une erreur, une infime erreur, et je suis tombé de haut, emportant dans ma chute tout espoir de faire du basket cette année-là. Ce ne sont pas les études qui m'en ont empêché, mais bien le comportement humain. Si me plonger dans mes cours m'a aidé à ignorer ma peine, du moins en surface, les traces du harcèlement que j'ai subi sont encore bien ancrées.

Learn to trustDonde viven las historias. Descúbrelo ahora