Lorsque le destin s'en mêle...

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Je me sens froncer les sourcils en fonction de la déformation du visage d'Armorie, qui se floute, jusqu'à disparaître en totalité.

-Par tous les dieux, Icanée !

J'ouvre les yeux, mais les referme aussitôt.

-Ecclésia ? s'inquiète Genesis.

-Ecclésia ? répète la fillette, dont la main me secoue.

Suspicieuse, je laisse de nouveau le champ libre à mes pupilles. La même image du plafond creux qui surplombe l'infirmerie s'imprime sur mes rétines. Allongée sur un lit, j'ai beau me creuser la tête, impossible de me rappeler le trajet.

Je me redresse d'un trait et remarque que la douleur a disparu. Plus de courbatures, de mal de tête, d'étourdissements ou carences alimentaires. Je me sens en pleine forme. Je suis en forme.

Prête à courir un marathon.

Une main forte se pose sur mon épaule. Je tressaille.

-Tout va bien, me rassure Genesis.

Une myriade de questions se presse au bord de mes lèvres, dont les fameux : Est-ce terminé ? Avez-vous bravé les ordres d'Alicante ? Comment vous y êtes-vous pris ? Cependant, les gros cernes qui soulignent ses yeux, associés à son teint alarmant, éveillent mon inquiétude.

-Es-tu...malade ?

Un dieu ne peut pas tomber malade, mais cette idiotie me fournira sans doute une explication. Et pour cause : il paraît désarçonné. La légère crispation de sa mâchoire me le renseigne.

-Bien sûr que non.

Sa peau translucide témoigne d'une anomalie. Le sang peine à irriguer son visage. Je m'efforce néanmoins de ne pas omettre l'idée qu'un Obscur n'apprécie pas que l'on s'épanche sur ses faiblesses.

Moi la première.

-Qu'est-ce que je fais ici ?

Icanée lance un léger coup d'œil à son frère.

-Tu t'es évanouie, m'indique ce-dernier.

Je le dévisage un instant sans comprendre.

-Non, je dormais.

-Icanée, laisse-nous entre adultes, s'il te plaît.

-Mais...

-Va-t'en, insiste-t-il.

Une moue renfrognée déforme la bouche de la petite rousse. Elle finit malgré tout par s'en aller, le pas traînant. Une fois l'ascenseur refermé, je dédie mon attention au Soigneur préoccupant.

Il croise les bras : geste défensif.
Bien, bien...

-Tu as dormi deux jours.

-Voilà qui ne m'étonne pas.

Il inspire longuement. Trop longuement.

-Comment cela ?

-Comment cela ? répété-je, abasourdie. Il me semble que le fait d'être fouettée sur un maudit poteau, sans apports vitaux, me donne le droit à une sieste, tu ne crois pas ?

Genesis me dévisage, impavide, avant de tirer le lit qui m'avoisine dans le but de s'y asseoir.

-Mais enfin, de quoi parles-tu ?

-Je ne trouve pas cela drôle, tu sais, lâché-je d'un ton tranchant.

-Ecclésia, je crois que tu dramatises un peu la situation...

Cœur de ferOù les histoires vivent. Découvrez maintenant