15 - Retour et départ

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Je fais moins ma maline au fur et à mesure que Hàma me conduit au travers des couloirs. Mon courage se cache derrière mon inquiétude et c'est angoissée que je m'arrête devant les quartiers du Roi.
Hàma frappe puis entrouvre la porte afin de m'annoncer. Théoden lui dit de me faire entrer puis de nous laisser. Je ne sais pas si c'est moi mais je trouve son ton dur, et ça m'inquiète d'avantage.
Hàma me fait signe d'entrer et je dois me forcer pour arriver à avancer d'un pas.
La pièce est ronde, éclairée par quelques petites fenêtres et surtout des bougies. Le roi a quitté son amure de voyage pour une tenue plus légère mais richement décorée. Il est assit derrière un bureau croulant sous les parchemins.
Étrangement l'architecture me paraît familière, ça ressemble beaucoup à mon fort, la suie en moins.
Je reste plantée devant la porte, frémissant quand Hàma la referme.

– Avancez vous, fait le Roi en levant la tête. Venez vous asseoir.

Il me sourit et m'indique un siège près de la cheminée où flamboie un feu rassurant. J'ai au moins un allié dans cette pièce...

– Le Rohan est un vieux royaume, reprend le Roi en se levant. C'était une ancienne province du Gondor offerte aux Eothéod en échange de l'aide qu'ils apportèrent au Gondor dans la guerre contre les Balchoth lors de la bataille du Champ du Celebrant.

Je l'écoute alors qu'il s'approche, un gros volume relié de cuir entre les mains.

– Dès lors nous avons une frontière commune avec Fangorn. Nous avons toujours vécu côte à côte en bonne entente. Nos ancêtres étaient déjà de fervents cavaliers mais ils trouvèrent au sein du royaume caché par delà la forêt des montures hors normes. Ces chevaux vivaient en liberté au milieu d'un communauté d'Elfe particulièrement proche de la nature et des animaux.

Théoden me fixe et malgré moi je frémis, il parle des miens.

– Je sais qui vous êtes, Isil Uruitë. Votre mère, Lairë Uruitë, était une grande dame, généreuse et protectrice de la forêt. Nous avons eut l'honneur de la rencontrer lors de jours fastes où l'hiver s'étirait sans fin. Elle a apporté avec elle feu et nourriture. Elle a aidé le peuple du Rohan sans jamais rien demander en retour, puis... je vous ai vu aussi.

– Quoi ?

Je me rends compte que je me suis penchée vers lui. Il me sourit avec bienveillance.

– Je n'étais qu'un jeune garçon qui suivait son père à la chasse, et vous une enfant dans les bras de son père, le grand Tulca.

Je sens les larmes me monter aux yeux mais je m'en fiche.

– Je... je n'ai quasiment pas de souvenirs de mes parents, avoué-je. Je ne connaissais même pas leurs prénoms.

– Ainsi, ils sont morts.

Le visage de Théoden se teinte de peine.

– Il y a de cela bien longtemps... Tué par les Orques de Saroumane.

– Saleté de magicien. Êtes-vous la seule descendante de la lignée de Fangorn ?

– Non, j'ai un frère jumeau resté sur nos terres. Il y a aussi un vieil Elfe du nom de Feaurl.

– Ce nom m'est inconnu mais vous avez eut raison de cacher votre identité. J'ai confiance en mes Hommes mais ils restent que des Hommes et les légendes sur vous sont bien inquiétantes.

– Saroumane n'en est pas le seul responsable, soufflé-je honteuse. Je n'ai pas fait grand chose pour être apprécié, ou bien passer pour une personne respectable...

– Comme beaucoup de jeunes gens, rit le Roi. Nous avons tous nos heures sombres et nos actes irréfléchis mais ce qui faut voir ce n'est pas ce que vous avez fait mais ce que vous êtes en train de faire. Vous êtes venue aider le Rohan au moment où nous en avons le plus besoin.

Je souris.

– Vous êtes un bon Roi. D'ailleurs Eomer m'a aussi, à demi mot, conseillé la discrétion sur vos terres.

Théoden rit à nouveau.

– Mon neveu est avisé et il a toujours été intrigué par Fangorn. Il en connaît la moindre légende.

Je souris, je me sens mieux, plus détendue. Finalement cette discutions est une bonne chose.
Théoden me tend alors le gros volume relié de cuir. Il contient des illustrations sur le Rohan mais aussi sur Fangorn. J'y retrouve certaines vues à Imladris mais aussi celle de ma mère.

– J'ai vu cette tapisserie à Edoras, avoué-je en l'observant.

– Vous avez alors dut croire regarder dans un miroir. Vous ressemblez beaucoup à votre mère mais vous avez les yeux de votre père.

Je sens mes joues rougir et je bredouille un merci tout en tournant les pages. Je vois une gravure représentant mon fort jaillissant d'entre les arbres, il était différent avec sa façade recouverte de plantes et de fleurs. Maintenant il ressemble plus à une dent pourrie et c'est en partie de ma faute.
Il va falloir que je remédie à ça.
Je termine de feuilleter l'ouvrage puis je le referme mais je le garde sur mes genoux.

– L'avez-vous ? Me demande alors Théoden.

Je crois savoir de quoi il parle mais je préfère en être certaine.

– Quoi donc ?

– Le don...

Je souris, il connaissait bien ma mère. Je me lève, pose le livre sur mon siège et tend la main au travers des flammes. Celles-ci me lèchent le bras avant de s'y agripper et de courir sur ma peau. Lentement, je m'embrase sous le regard émerveillé du Roi Théoden.
Je suis surprise de cela, d'habitude les gens ont peur.

– C'est incroyable, souffle t'il en se levant. Vous êtes identique à votre défunte mère.

– A quelques détails près, répondis-je mélancolique. Elle, elle savait se contrôler, pour moi cela est tout nouveau.

Je serre le poing et le feu s'éteint. Ça doit lui paraît inouïe mais il ignore à quel point il m'a été difficile d'atteindre un tel degré de contrôle, même moi j'en suis encore surprise.

Tome 2 - La Lune Ardente de FangornOù les histoires vivent. Découvrez maintenant