50 - Rechute

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Accoudée au portillon de chez Anar, je regarde les dépendances se vider des Hommes du Rohan. C'est mieux ainsi.
Discrètement, je jette un regard à Elrohir qui a rejoint son frère et Anar. Il a un air impassible mais je le sais troublé. Le pauvre, je n'aurais pas du le mêler à tous ça. Maintenant je lui dois des explications ce que je déplore, je n'aime pas ça.
Puis comment lui expliquer tous ça ?
Un type m'a fait du rentre dedans avant d'essayer de me coincer avec ses compagnons pour finalement s'en prendre à d'autres femmes puis découvrir mon don et donc tenter de me faire lapider par des villageois apeurés...
Je ne peux pas lui dire ça. Pas comme ça en tout cas.
Je soupire alors que des Hommes en armes s'approchent de mon frère. Ils échangent quelques mots avec Anar qui me désigne alors.
Intriguée, je me redresse tandis qu'ils approchent. Le Warg grogne, il s'en veut de ne pas avoir été à mes côtés quand la colère m'a submergée, du coup il est d'autant plus protecteur. Je lui fais signe de s'apaiser et, par précaution, je sors du jardin.

– Isil, ces Hommes souhaiteraient rester aux dépendances, fait Anar. Ils n'ont rien à voir avec les soldats, ils ne sont que des simples villageois.

Je les examine rapidement. Bien qu'ils aient des armes, on voit que ce ne sont pas des soldats de métier.

– Désolé de vous importuner de la sorte, s'excuse le plus proche. Je me fais porte parole de mes compagnons, nous sommes de pauvres paysans qui ont prit les armes par la force des choses. Nous avons suivi les soldats car nous n'avions plus rien mais à présent on recherche un endroit où nous reconstruire. Vous avez demandé à ce que les soldats partent mais nous, pouvons-nous rester ?

Je les dévisage un à un tandis que Le Warg se dresse sur ses pattes arrières pour les voir aussi. Le portillon grince sous son poids et je sais qu'il n'attend qu'un geste de ma part. Je prends le temps de la réflexion puis je hausse les épaules.

– Si mon frère est d'accord, je n'y vois pas d'inconvénients. Si vous cherchez un endroit pour reconstruire une vie et prospérer tout en aidant les autres vous êtes au bon endroit.

L'Homme me sourit avant de hocher la tête.

– C'est ce que nous cherchons, nous ne vous causerons aucun tord. Nous ne sommes que d'humbles paysans habitués aux durs labeurs, mettre nos forces et nos compétences au service de vos terres est pour nous un honneur.

– Alors bienvenu en Fangorn.

L'homme me sourit avant de s'incliner. Anar sourit à son tour, il est content. Je comprends alors le rôle qu'il m'a donné, je suis un peu le chien de garde, celui qui trie les bons des mauvais éléments. C'est un rôle qui me plaît.
Je souris à mon frère quand un des Hommes s'avance avec prudence.

– Pardonnez moi, gente Elfe, mais vous êtes bien Isil Uruitë ?

J'acquiesce et son regard s'illumine.

– Votre légende vous précède et j'ai entendu dire que vous avez le jeune Erwin en écuyer. Je suis content pour lui.

– Vous le connaissez ? M'étonnai-je.

– Nous étions du même village, nous l'avons fuit ensemble puis nous avons été séparés. Je suis soulagé de le savoir sain et sauf, c'est un bon garçon.

– C'est bien pour cela que je l'ai prit en tant qu'écuyer, rigolé-je. Si vous avez fuit ensemble, vous avez peut-être des nouvelles de ses parents ?

Je vois l'homme s'assombrir et je pressens le pire.

– Malheureusement, ils ne sont plus, ainsi que son oncle... le petit n'a plus personne.

Merde...
J'avais envisagé cela mais le savoir me serre le cœur. Pauvre Erwin, comment vais-je lui annoncer cela ?

– Même si c'est une bien triste nouvelle, merci de me l'avoir donnée. Si jamais vous croisez Erwin dans les dépendances, s'il vous plaît, ne lui dîtes rien, je préfère le faire moi-même.
 
L'homme m'adresse un pâle sourire tout en hochant la tête, il comprend ma situation et accepte mon choix.
Peinée, je le regarde rejoindre ses compagnons tandis qu'Anar me prend le bras.

– Si tu veux que je le fasse...

– Ça ira, c'est à moi de le faire.

Anar acquiesce, il comprend aussi. Je lui adresse un sourire las, j'en ai marre de ces mauvaises nouvelles, quand je vois des Hommes passer chargés d'un coffre que je reconnais.

– C'est les fioles de Saroumane ? M'étonnai-je.

– C'est apparemment une demande de Gandalf, m'apprend Anar. Mais je ne sais si c'est une bonne chose de les garder ici.

– Je pense que oui, fait Feaurl qui nous a rejoint. A Isengard, elle pourraient être volées. Ici nous allons pouvoir les mettre sous clé, c'est plus sûr. Isil, j'ai trouvée une famille pour accueillir la jeune Aglaë.

Je le remercie d'un sourire puis je capte le regard d'Elrohir. Il veut ses explications. Je décide, lâchement, de rentrer pour préparer mes affaires. C'est un bon prétexte étant donné que l'on part demain.
Je prends tout mon temps, je n'ai pas envie de parler, je suis encore trop en colère pour cela. Jamais je n'avais autant eu envie de tuer quelqu'un...
C'est inquiétant et à la fois grisant, j'ai la puissance pour le faire. Je le sais bien.

Tome 2 - La Lune Ardente de FangornOù les histoires vivent. Découvrez maintenant