16 - Préparation

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Je suis un peu intimidée par la haie d'honneur formée par les Hommes qui nous dévisagent en silence.
Soudain un cor Elfe retentit et je sens mes joues s'enflammer. Je serais tenter de m'esquiver et de suivre la cohorte dans la foule plutôt que parader avec eux.
Les gens me trouvent déjà assez bizarre comme ça...
On arrive vite au pied du bastion d'où Théoden sort. Il porte son armure complète, premier prémisse de la bataille à venir.
Il nous dévisage incrédule et je baisse la tête quand son regard passe sur moi, je n'y suis pour rien cette fois-ci.

– Comment est-ce possible ? Souffle t'il perdu entre hébétement et perplexité.

Haldir s'avance alors d'un pas.

– J'apporte la parole d'Elrond de Foncombe, fait-il en inclinant la tête. Autrefois une alliance existait entre les Elfes et les Hommes, à cette époque nous avons combattus et péris ensemble...

Soudain Aragorn, Legolas et Gimli jaillissent de la grande salle. Ils nous dévisagent à leur tour avant de venir vers nous.

– Nous sommes venus honorer cette allégeance, conclut Haldir imperturbable.

Mon ami, lance Aragorn en Elfique avant d'enlacer Haldir.

L'Elfe est surprit puis semble amusé. J'en profite pour retourner du côté de mes compagnons.

– Vous êtes plus que bienvenue, clame Aragorn visiblement soulagé.

Legolas pose alors ses mains sur les épaules de Haldir et soudain tous les Elfes, d'un même mouvement, tournent la tête vers nous puis pivotent avant de frapper leurs grands arcs au sol.
La synchronisation et le bruit sont impressionnant, je prends conscience des forces qu'ils nous apportent. Leurs aides ne sera pas de trop, espérons même qu'elle nous permette de survivre à cette nuit.
Haldir se redresse, balaye la foule du regard avant de sourire.

– Nous sommes fiers de nous battre à nouveau aux côtés des Hommes.

Aussitôt je sens comme une vague de soulagement dans les rangs des Hommes. Leur espoir ne tient qu'à un fil mais la présence des Elfes les rassure. Ils ne sont plus seuls.
Je rêvasse quand Legolas se tourne vers moi.

– Vous devriez aller vous préparer, me fait-il. L'heure des combats est proche.

Alors que les Hommes s'agitent autour de nous, je regarde ma tenue. Je porte mon armure et, à vrai dire, je n'ai rien d'autres à me mettre.

– Je suis en armure, répondis-je perplexe.

Legolas me sourit.

– Au vu des circonstances une armure plus épaisse serait la bienvenue. Les Hommes ont de quoi vous vêtir.

Je rougis en comprenant.

– Heu... d'accord.

Soudain la peur revient en moi comme une bête jaillissant de sa tanière. Elle était là tapie, à attendre juste le bon moment.
Legolas doit le voir car il m'adresse un sourire encourageant.

– Ça va aller, venez.

Je lui rends son sourire puis je le suis docilement. Ne plus réfléchir à la suite me paraît encore la meilleure chose à faire.
En fait, je ne sais pas quoi faire d'autre...
On remonte les marches quand soudain un hurlement déchire la brouhaha des Hommes. Il monte crescendo atteint son paroxysme puis redescend à une note mélancolique.
Gimli se tourne vers moi.

– C'est...

– Un Warg, terminé-je.

Et je crois savoir lequel en particulier...
Je n'ai même pas le temps de formuler ma pensée que Hamà arrive à notre niveau.

– Dame Isil, votre Warg est à nos portes.

Je tique sur le fait qu'il utilise mon prénom mais surtout sur le fait qu'il insinue que cet animal m'appartient. Je voudrais bien me justifier mais les mots me manquent et un second cri s'élève dans les airs.

– Quel crétin, soupiré-je avant de prendre la direction des portes.




J'arrive rapidement aux porte où une foule s'est déjà formée. Je me penche par dessus le parapet pour voir le jeune Warg assit au milieu de la chaussée. Dès qu'il m'aperçoit, il se met à gémir, à tourner sur lui même avant de bondir sur les portes. Malgré sa crainte des Hommes, il veut entrer.

– Isil, qu'est-ce qui se passe ?

Je me retourne pour voir Aragorn, Haldir et Théoden arriver.

– C'est encore le Warg, soupiré-je. Je l'ai amené aussi loin que possible mais il revient...

– Qu'avez-vous fait à cette bête pour qu'elle vous suive de la sorte ? Demande Théoden en se penchant sur le créneau.

– Rien...

– Vous êtes liés à cet animal, intervient Gimli. Il vous doit la vie.

– Isil a secouru ce Warg après le combat dans les plaines, ajoute Legolas. Et visiblement, il préfère être à ses côtés plutôt que celui des Orques.

Je fusille Legolas du regard mais il m'ignore.

– De toute façon il ne peut plus s'en aller, reprend Théoden. Toutes échappatoires est maintenant bloquées. Il est coincé entre notre muraille et l'armée en marche.

Le silence s'abat et je sens à nouveau l'espoir des Hommes vaciller. Nous sommes comme ce Warg, bloqués entre la roche et l'horreur.
Je réprimande à grand peine un frisson.

– Pouvez-vous contenir cette bête ? Me demande alors Théoden.

– Pardon ?

– Pouvez-vous contrôler cet animal afin qu'il ne soit pas une menace pour les Hommes ?

Sa question me surprend mais je hoche la tête.

– Je pense que oui.

– Vous pensez ?

– J'en suis certaine.

Je m'avance un peu là, je ne suis certaine de rien, surtout pas des réactions de ce Warg.
Théoden me dévisage avant de regarder à nouveau vers la bête qui s'agite et gémit contre la porte.

– Allez le chercher.

Il y a un moment de stupeur puis des murmures parcourent la foule.

– Je ne comprends pas, avoué-je tout bas.

– Vous avez sauvé cette bête, sa vie vous appartient, il ne revient pas aux Hommes de la lui ôter et je doute que vous le vouliez aussi. S'il reste dehors, il va mourir, alors allez le chercher.

Un doux sentiment chasse la surprise de mon esprit : la reconnaissance.

– Vous êtes vraiment un grand roi, repris-je après un temps. Et un grand ami de la vie, humaine et animal.

Théoden esquisse un sourire puis m'effleure l'épaule avant de se détourner.

– Hamà conduit les jusqu'à la cour intérieur, fait-il. Les autres faites place.

Aussitôt la foule s'écarte des portes. Legolas me tend une corde et je m'empresse de descendre la rue. Le portier m'adresse un sourire encourageant puis il ouvre.
Le Warg me bondit dessus, me lèche les mains, le visage, il est très agité.

– Calme toi et écoute.

Il s'assoit, tel un chien docile.

– Je vais te passer cette corde au cou. Ce n'est pas une entrave, juste une sécurité pour les Hommes. Tu vas me suivre sans rien tenter. Je vais te mettre en sécurité, enfin j'espère...

Le Warg ne bouge plus d'un poil. Je glisse ma main sur sa joue puis derrière son oreille avant d'attacher la corde autour de son cou massif. Il reste de marbre mais dès que j'avance, il me suit.
On rentre et la foule se presse contre les murs, curieuse mais peu désireuse de s'approcher.
Je suis, à bonne distance, Hamà qui me jette des regards inquiets. Le Warg marche à côté de ma jambe tandis que je scrute son esprit. Il est curieux, très curieux. Il craint les Hommes mais sait qu'il peut s'en défendre et seul quelques poulets imprudents attisent son instinct de prédateur.
Hamà nous conduit jusqu'à une petite porte qui donne sur une cour intérieur. La petite place d'un gris pâle est encadré de colonnes ouvragées recouvertes en partie d'un lierre aventureux. Ce devait être un jardin intérieur autrefois, un lieu bien agréable, mais maintenant laissé à l'abandon.

– Je vous laisse la clé sur la porte, fait Hamà mal à l'aise. Verrouillez là en sortant. Il sera en sécurité ici, du moins des Hommes.

Je lui adresse un sourire reconnaissant mais il s'empresse de ressortir de la cour. Je ne peux que le comprends, les Warg sont des monstres à ses yeux pas des animaux de compagnie.
Je défais la corde et le Warg va faire le tour de la cour. Sa curiosité me fait sourire, un rien l'intrigue. Il y a de l'eau de pluie dans un bac et suffisamment d'abri pour qu'il puisse se sentir bien. Il a faim mais il a l'habitude.
Je m'accroupis alors qu'il revient vers moi. Il se frotte comme un gros chien le ferait.

– Tu ne manques pas de cran, soufflé-je. Ta peur des Hommes est moins forte que celle que t'inspire les Orques mais sais-tu dans quoi tu t'es embarqué ?

Le Warg relève la tête et son regard de miel m'envoûte. Il m'envoie des images de l'armée en marche, il sait qu'il est coincé mais au moins il n'est plus seul.
Sa compréhension et son résonnement m'étonnent. Hormis Équinoxe, j'ai rarement rencontré un animal aussi intelligent.
Il n'a vraiment pas eu de chance de naître Warg. C'est la seule chose qu'on peut lui reprocher...
Je laisse mes mains glisser dans son pelage hirsute et miteux. J'aimerais lui dire ce que je ferais de lui après, je le ramènerais dehors et il devra s'en aller, mais je n'arrive même pas à imaginer mon propre avenir.
Vais-je survivre à cette nuit ?
Rien n'est moins sûre...
Je caresse encore un moment le Warg avant de me redresser.

– Reste sagement ici, je t'apporterais de quoi manger puis... on verra.

Le Warg me dévisage impassible. Je suis certaine qu'il voit mon doute mais il n'y peut rien, alors il ne fait rien.
Je ressorts de la cour, verrouille la porte puis glisse la clé dans ma poche. Je suis surprise de trouver Aragorn, Legolas et Gimli assis non loin.

– Quoi ? Lancé-je alors qu'ils me dévisagent.

– On se disait juste qu'il n'y avait que vous pour faire d'un Warg un animal de compagnie, répond Gimli amusé.

– Ce n'est pas mon animal de compagnie. Après ça, il devra partir.

Le Nain se met à rire et je fais la moue.

– On verra bien, reprend t'il en sautant de son promontoire. On verra bien.

Je lui adresse un regard noir qu'il ne voit pas, ce qui me fait encore plus enrager.

– Aller, Isil, allons vous préparer, fait alors Legolas.

La peur revient aussitôt, elle est toujours là à attendre et je ne sais comment m'en dépêtrer.

– Je m'en occupe, Legolas, allez aider vos semblables.

J'adresse un regard étonné à Aragorn tandis qu'il échange un long regard avec Legolas. L'Elfe finit par s'incliner puis s'éloigne.
Aragorn m esourit puis m'invite à le suivre.



Je n'avais jamais prêté attention au bruit des côtes de mailles, ce tintement si particulier. Il faut dire que je tremble comme une feuille dans une bourrasque et les anneaux métalliques ne cessent de s'entrechoquer.
Je lutte mais je n'y peux rien...

– J'ai peur, avoué-je tout bas. Je n'ai jamais eu aussi peur.

Aragorn me sourit, un sourire compatissant et rassurant.

– Je vous penserais folle si c'était le contraire.

Il m'a fait ôter mon armure légère pour me faire passer une côte de maille plutôt légère qui me couvre jusqu'à mi-cuisse. Tandis que je le dévisage, il me fait enfiler un par-dessus matelassé qu'il resserre à ma taille avec une large ceinture de cuir.
Je tremble toujours et des larmes menacent de m'envahir. Je n'arrive plus à faire semblant.

– Pourquoi ça me fait ça ? Pourquoi maintenant ?

– Isil, vous n'avez jamais prit part à un tel combat, votre peur est normale.

Il me sourit à nouveau mais avec une pointe de regret.

– Vous aimeriez que je ne sois pas là ? Demandé-je avec sérieux.

– Oui et non. Votre présence nous est utile mais... vous êtes aussi en danger que nous.

Je comprends et j'admire son honnêteté.

– Je ferais de mon mieux.

– Je n'en doute pas, Isil, mais promettez moi de battre en retraite si jamais... ça prenait une mauvaise tournure.

– Aragorn je sais me défendre. Je ne suis plus la petite Elfe effrayée que j'étais et...

– Je n'ai aucun doute là dessus mais je sais aussi à quel point il est impossible de vous faire faire quelque chose contre votre gré. Je vous aurais envoyé avec les femmes et les enfants dans les grottes si je ne craignais pas de vous voir surgir en pleine bataille. Alors autant vous avoir à l'œil.

Je sens mes joues s'empourprer mais je ne suis pas vraiment vexée, il a toutes les raisons du monde de penser cela de moi.
Et c'est aussi la vérité...
Je ne resterais pas en arrière.
Soudain mes larmes jaillissent telles des cascades sur mes joues. Je lui suis reconnaissante mais j'ai peur, horriblement peur. Un sanglot de me secoue de la tête aux pieds, je n'ai pas la force de lutter.

– Apaisez vous, Isil.

Je passe mes bras autour du cou d'Aragorn et je viens me lover contre lui. Mes sanglots nous agitent, j'ai l'impression d'être une enfant en pleine crise.

– J'ai peur, soufflé-je. Peur pour moi, pour vous, pour toutes les personnes qui vont se dresser face à cette armée impitoyable. Je ne sais pas ce qui va se passer, comment cela va se terminer... Nous n'avons aucune échappatoire cette fois-ci.

– Ne pensez pas à cela. Ne pensez pas aux risques, aux pertes. Nous avons connus bien pire péril et nous nous en sommes toujours sorti. Ça ira.

Ce sont de belles paroles mais je sais qu'il dit ça pour me rassurer. Son cœur est aussi inquiet que le mien, je l'entends.
Soudain je prends conscience que je suis dans ses bras, depuis un moment, et... je ne le brûle pas.
Je recule d'un bond, heurtant une table qui chancelle.

– Je... je ne vous ai pas brûlé...

Aragorn prend un air aussi surprit que le mien. Il me dévisage un instant avant de me prendre délicatement la main. Je sens son aura de chaleur sur ma peau, c'est à la fois surprenant et apaisant.
Il se passe quelques secondes avant que mon feu ne rende ma peau trop ardente pour garder le contact.
Je retire ma main tandis qu'Aragorn sourit.

– Tout cela n'est qu'une question de contrôle, Isil.

Je suis si troublée que les mots me manquent. Du contrôle, est-ce cela la clé ? Juste du contrôle...
Tout à coup un cor s'élève au loin. Je frémis en reconnaissant le désagréable son des Orques et Uruk. L'armée est là.
Sans un mot de plus, Aragorn termine de me préparer. Il m'habille, place mes armes puis coiffe mes cheveux pour qu'ils ne me gênent pas durant la bataille.
Je peine à me reconnaître dans la vitre rendue opaque par la nuit. J'ai l'air d'une guerrière.
Une guerrière terrifiée...

– Isil, promettez moi de vous mettre à l'abri si ça venait à mal tourner.

Le ton est posé et sérieux. Je me tourne vers Aragorn dont le visage s'est fermé. Il est aussi paré pour le combat.

– Je vous le promets.

Et pour une fois c'est une promesse que je comptes bien tenir.
Même si ce n'est qu'une nuit de plus, je veux rester en vie.



Fin du chapitre
Isil se prépare aux combats. Les Hommes ne peuvent plus reculer et cette nuit sera décisive pour leurs avenirs.
Quel rôle Isil va t'elle y jouer ? Arrivera t'elle à surmonter ses peurs ?
En ressortira t'elle changée ?

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Tome 2 - La Lune Ardente de FangornOù les histoires vivent. Découvrez maintenant