Chapitre 14 : On n'a jamais été amis

454 69 221
                                    

Une odeur délicieuse de bœuf et de friture m'emplit les narines quand nous passons la porte de l'appartement d'Estéban. Je jette un coup d'œil à Cons. Il a l'air sur le point de s'évanouir de bonheur.

Estéban dit un truc en espagnol, puis Leandra surgit de la cuisine, tout heureuse, et nous enlace tous les trois. Elle est encore plus jolie que la première fois que je l'ai vue, ainsi vêtue et maquillée. Ses ondulations brunes reposent sur son épaule gauche. Elle porte un haut échancré qui dévoile ses clavicules. Quand on la voit, on comprend bien d'où Estéban tient sa Estébanerie. Sa mère est trop classe. Elle nous enlace tous les trois, en commençant par Cons, puis elle fait un gros bisou sur le front de son fils.

— Estéban m'a prévenu tard que vous viendriez, alors j'ai préparé des enchiladas dans l'urgence. J'espère qu'ils seront bons.

— Il ne fallait pas vous donner cette peine, dis-je poliment.

— Oh Julien, tutoie-moi, je t'en supplie.

S'il y en a un qui est content qu'elle se soit donné la peine, c'est bien Cons. Il lorgne sur le four avec des yeux gourmands.

Pour faire passer le temps, nous nous installons dans le salon pour jouer au Uno. Je gagne toutes les parties grâce à ma chance insolente. Cons finit quasiment toujours derrière moi, et Estéban ne tire que des mauvaises cartes.

— Ah putain ! Mais c'est fou ! Quel jeu de merde ! s'agace Estéban. C'est comme le Monopoly !

— Pourquoi est-ce que t'as un Uno si tu n'aimes pas ce jeu ? demandé-je.

— Parce que je me disais que je deviendrais peut-être meilleur si je m'entraînais. Mais il n'y a rien à faire, la chance est contre moi.

— T'as de la chance dans plein d'autres domaines, tu t'en remettras, lance Cons.

— Tu trouves ?

— Carrément ! T'es beau, t'es intelligent, t'es doué dans à peu près tout ce que tu fais... Alors si ton fardeau, c'est d'être nul au Uno, ça va, je trouve.

— Tu veux lui sucer la bite, aussi ? dis-je.

— Mais qu'est-ce que tu as, toi ? T'es jaloux ? me demande Cons.

— Non, même pas...

Je suis jaloux. Enfin, ce n'est pas tout à fait de la jalousie. J'ai simplement envie qu'on me complimente, moi aussi. Cons ne me dit jamais de choses comme ça.

— Les garçons, c'est prêt !

Estéban soupire de soulagement. Cons jette ses cartes sur le plateau et trottine jusqu'à la table du salon. J'observe ses cartes. Il s'apprêtait à nous mettre une raclée monumentale.

Sur la nappe est disposée un grand plat à gratin, rempli d'une nourriture qui me fait penser à des lasagnes. Ça sent divinement bon.

— J'espère que ça vous plaira, dit Leandra en découpant des parts généreuses, avant de nous servir.

Ce que j'ai dans mon assiette fait la taille d'un kebab. J'ai tendance à être un peu difficile, alors j'espère que je vais apprécier. Je me sentirais mal d'en laisser de côté. Vu la tête de Leandra, je suis sûr qu'elle le prendrait très mal.

Je regarde Cons croquer un morceau fumant. Ça a l'air brûlant, mais il a si hâte de manger qu'il est incapable d'attendre. Son regard s'illumine, puis il ferme les yeux pour savourer. Mais quel cirque...

— C'est divin ! s'exclame-t-il.

Leandra le contemple avec un grand sourire. J'ai vraiment intérêt à tout manger, moi. Je coupe un petit bout avant de souffler dessus comme si ça pouvait accélérer le processus de refroidissement.

On s'était dit qu'on préférait les fillesWhere stories live. Discover now