Petit arrangement

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Les jours défilent et se ressemblent. Lever six heures, repas rapide avec les serviteurs, entraînement certains jours puis c'est parti pour une journée de récolte !

Il y a plus d'une centaine de chambres et au moins dix bureaux avec leur propre vase de soulagement. Tous ne sont pas utilisés, heureusement pour moi, mais suffisamment le sont pour m'occuper jusqu'à très tard.

Entre les entraînements et les aller-retour chambre bassin, j'ai les jambes en sable et j'ai plus le temps de rien. Le soir, après avoir terminé de nettoyer le dernier pot, je suis tellement épuisé que je m'effondre sur mon lit jusqu'au lendemain.

Puis ça recommence. Comment je suis censé réhabiliter l'image de Damian si je n'ai même pas le temps de réfléchir ? La dernière fois que je suis resté discuter avec le prince sur l'avancement de son portrait, j'ai du loupé l'heure du repas pour finir mes tâches. Dormir l'estomac vide n'est pas habituel pour moi, mais je m'étais fait à ce luxe.

Ça ne peut pas continuer comme ça. Il faut absolument que je trouve un moyen de réduire mes heures de travail. Le problème principal, ce sont les allers et retours. Les chambres sont à l'opposé des bassins et je dois traverser tout le palais à chaque fois. La solution la plus efficace serait de changer plusieurs pots par voyage, mais pour ça il faudrait plus d'un vase de rechange.

J'entame ma tournée, ouvrant l'œil dans les couloirs à la recherche de mon supérieur Monsieur Poskon. Si une personne doit savoir si le palais possède des vases de secours, c'est lui. Et si ce n'est pas le cas, il est aussi celui qui peut en commander d'autres.

Chambre après chambre, vase après vase, je m'efforce de ne pas rendre mon déjeuner. Je commence sérieusement à haïr les cuisiniers. Suivant les jours suivants, mon travail est beaucoup plus pénible. Surtout lorsqu'il fonde des plats à base d'épices exotique auxquels les nobles ne sont pas habitués. Ces jours-là, leurs vases sont plus remplis et surtout il est très difficile de les faire redevenir blanc.

Combien de fois ai-je dû me changer après avoir ascitique le pot d'un noble trop gourmand ? Parce que je dois être propre pour transporter mon vase. Et voilà encore du temps perdu qui aurait pu être mieux investi. Faudra que je demande un tablier également. Là c'est vraiment plus possible de travailler dans ces conditions. Comment Monsieur Fart fait pour supporter ça ?

Je soulève mon vase, nouvellement étincelant et force mes jambes endolories à avancer. Au moment de sortir de la salle des bassins, je me cogne contre un homme rond et élégant. Son uniforme est similaire au mien, ses cheveux grisonnants et de légères rides commencent à naître autour de ses petits yeux sombres.

— Fait attention jeune homme, clame-t-il à la fois inquiet et réprobateur.

Doux Ewadun, le voilà enfin, mon sauveur !

— Pardon monsieur Poskon.

Il me sourit poliment, mais avant qu'il ne s'éloigne je l'interpelle avec mon ton le plus pressant.

— Pardon monsieur, mais... J'aurais une requête à vous soumettre...

Il se tourne vers moi, d'un air furieux et agacé.

— Non il n'y a pas d'autres postes à pourvoir, crache-t-il avec froideur.

Tient il a vite disparu le supérieur souriant. Vu sa réaction je ne dois pas être le premier à venir me plaindre. C'est ma chance, il sera peut-être plus ouvert à ma requête.

— Non non je... J'aurais des idées pour optimiser mon travail, avec un chariot et plusieurs pots. Ainsi j'aurais moins d'aller-retour à faire, ce qui serait un gain de temps considérable, temps qui pourraient être réinvestis dans d'autres secteurs. Il me faudrait également une tenue spéciale à mettre par-dessus mon uniforme lors des nettoyages des vases pour les mêmes raisons.

L'ombre du trône : Je veux le pouvoir, la couronne et la gloireWhere stories live. Discover now