14- angoisses

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14. CAMERON

J'arrive devant chez moi, haletant et suant de partout, je ne me sens pas très bien et je crois que je pourrais m'évanouir si il n'y avait pas mon frère derrière cette porte. Je dépasse le petit portail, suivi de près par Mayra qui halète aussi. On monte les escaliers mais avant que je ne puisse ouvrir la porte de la maison, je reste figé sur le pallier en entendant mon frère hausser le ton.

— Et c'est moi qui suis mauvais maintenant ?!

Ma mère lui ordonnait de se calmer, et elle surenchérissait en lui criant :

— Parce que nous, on l'est ?!

— Tout ce que je sais, c'est que vous êtes des menteurs et que vous vous cachez derrière vos putains de bonnes actions, mais j'en ai plus rien à foutre de ce que vous devenez. C'est pour Cameron que je reviens dans le Queens, pas pour vous.

La voix colérique de mon père explosa dans le silence qui a suivit, et il vrillait :

— Sors d'ici Neil ! Tu sais quoi ? On a voulu t'aider, te donner un putain de foyer mais si t'es trop dérangé dans ta petite tête pour t'en rendre compte, alors fiches le camp d'ici et ne reviens pas en prétendant vouloir voir Cameron.

Je n'ai jamais entendu mon père parler comme ça.

Un rire jaune, qui m'effraie presque, franchit les lèvres de mon frère, et j'entends un fracas causé par -je suppose- un tas d'objets qui tombent au sol.

— Un foyer ? Un foyer ?! C'est bien papa, reste dans le déni.

Malgré le mur qui nous séparait, je pouvais entendre distinctement Neil appuyer de manière prononcée sur le mot « papa ».

Il prononce encore d'un ton que je ne lui ai jamais connu :

— Et sache une chose, Cameron reste mon frère malgré toutes les conneries que j'ai pu subir ou découvrir, que ce soit sur toi, ta femme ou toute cette putain de famille.

Mayra couine en griffant la porte et quand je la prends dans mes bras, je sens sous mes doigts qu'elle tremblote. J'essaye de la calmer en caressant son pelage noir. Je bouge par pur automatisme, toujours confus, je me contente d'ouvrir la porte, très doucement, comme si une bombe allait écaler à la seconde où je mettrai les pieds dans cette maison.

Un ange passe quand tout le monde se tourne vers moi, ma mère pose sa main devant sa bouche, et mon père me fixe, tendu comme un arc.

Quant à Neil, il me fixe d'abord de ses yeux noirs et il passe nerveusement une main dans ses cheveux longs, il avance vers moi, et il lève le bras pour poser sa main sur ma tête d'un geste protecteur.

— Désolé que t'ai entendu des trucs pas clairs.

Sa voix cassée s'est immiscée sous ma peau, sous son regard noir qui transperçait mon cœur.

Pourquoi j'ai ce mauvais pressentiment qui fait rater un battement à mon cœur ?

Il esquisse un sourire en coin en caressant la tête de Mayra et il enlève la main qui écrasait mes cheveux avant de fléchir les genoux pour choper un sac noir posé par terre.

—T'as l'air malade, fais attention à toi gamin.

Il se penche vers moi et sa voix profonde murmure très sérieusement :

— Et n'oublies pas Cameron, pas de conneries.

Sur ce, il passe à côté de moi, laissant son odeur boisée sur son chemin, et il franchit la porte déjà ouverte et quelques secondes passent avant que je n'entende une porte claquer et un moteur vrombir.

TRAGEDYOù les histoires vivent. Découvrez maintenant