Chapitre 7

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— Monsieur Bowman, depuis quand n'avez-vous plus eu de nouvelles de la part de votre épouse ? interrogea le lieutenant Harris.

— Une semaine. Un peu plus.

— Pourquoi avez-vous attendu avant de signaler sa disparition ?

Thomas croisa les bras sur sa poitrine, mettant en évidence ses puissants biceps. Depuis le canapé, je l'observais, cherchant un signe de sa culpabilité dans ses expressions, dans les mots employés. C'était lui, l'auteur de la gifle lors de ma première vision. Lui, la raison pour laquelle Hasna avait choisi de s'évaporer et de se terrer un temps à Bellwood. Elle souhaitait voir sa fille grandir, et elle avait conscience qu'auprès d'un homme de cet acabit, elle n'aurait pas cette chance.

— Hasna est spéciale. Disparaitre chez de la famille ou chez une copine lui arrive souvent. Quand sa crise lui passe, elle revient à la maison, la queue entre les jambes. Je ne me suis pas inquiété tout de suite.

Les doigts de l'officier Greene tapotèrent rapidement sur le clavier.

— Quelle motivation l'aurait poussée à partir cette fois, s'enquit Casey, vous vous êtes disputés ?

— Elle est un peu hystérique sur les bords. Du genre à s'énerver pour un rien. Depuis la naissance de la petite, ça a empiré. Pas une journée ne passe sans qu'elle se mette à pleurer ou à péter une durite. L'infirmière a parlé de dépression post-partum ou un truc du genre.

Je serrai la mâchoire. Ce discours résonna en moi comme un écho amer. Et une voix longtemps tue refit surface, grattant de ses ongles la couche de terre sous laquelle elle était ensevelie.

— Parlez-moi de la relation avec votre femme, proposa le lieutenant, comment vous êtes-vous rencontrés ?

— On étudiait dans le même lycée. Je jouais dans l'équipe de football, et elle était cheerleader. Le cliché parfait. Nous nous sommes fiancés peu de temps après avoir obtenu notre diplôme. Les premières années de notre mariage se sont bien passées, malgré des désaccords familiaux. Mes parents ont eu un peu de mal à l'accepter au début. Elle vient d'une culture différente. Comprenez ? Mais ça s'est arrangé avec les années.

Casey hocha la tête, sans mot dire. Je me souvins du portrait de sa femme et de ses filles. Peut-être avait-il lui aussi connu ce genre de désagrément.

— Mais Hasna en a eu marre de cette vie-là, poursuivit Thomas, elle s'ennuyait à la maison, aspirait à de grandes choses, comme elle le disait si bien. Elle passait ses journées à se plaindre, trainait dehors avec ses copines et revenait à pas d'heure. Je n'étais plus assez bien pour elle.

— Où étiez-vous le jour de sa disparition ?

— Au travail. Je suis rentré en fin d'après-midi vers 17 heures. Hasna n'était pas là. Elle avait embarqué la petite. Son téléphone était posé sur la table du salon. J'ai attendu un peu, pensant qu'elle finirait par revenir. Elle pouvait être au parc, en course ou que sais-je. Elle n'est pas rentrée. Mais comme je vous l'ai dit, ce n'était pas la première fois qu'elle sortait en douce. Elle n'est pas réapparue le lendemain ni les jours suivants. Et surtout, elle avait laissé son téléphone à la maison. D'habitude, elle le prend toujours. Je lui ai donné quelque temps pour réfléchir. Puis, j'ai fait le tour de ses amies et de ses frangines. Personne ne savait où elle était. C'est là que j'ai décidé d'appeler et de signaler sa disparition à Kalispell.

— Une idée d'un autre endroit où elle pourrait se rendre ? A-t-elle de la famille en dehors de l'état ?

— Non. Ses parents et ses sœurs habitent ici. Il lui reste quelques cousins en Afrique. L'Algérie, je crois. Je ne sais plus.

Le Passé Ne Meurt Jamais [BxB] En RéécritureWhere stories live. Discover now