Chapitre 24

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— Raph... Raph, réveille-toi !

Raphael se redressa en sursaut en se débattant contre un ennemi imaginaire.

— Non ! Lâche-moi ! Ne me touche pas ! Ne me touche pas !

Les mains de Sam enveloppèrent doucement son visage, tentant de l'extraire du monde des songes.

— Eh. Eh, tout va bien. C'est moi... Tu n'as rien à craindre. Ce n'était qu'un cauchemar.

Les lueurs de la rue s'immisçaient à travers les stores semi-fermés, jetant des faisceaux lumineux épars dans la chambre. Raphael discerna une silhouette rassurante, penché au-dessus de lui dans une faible aura azuréenne. Il se laissa retomber sur le matelas, le cœur au bord de l'implosion. Comme il l'avait compris, cet incendie était bel et bien un cauchemar, une réminiscence de l'été 81, s'il devait en croire cette vue imprenable sur la forêt et le lac depuis la lucarne. Il ne s'était pas attardé dans cette fournaise infernale pour dénicher des indices sur son origine ou son auteur. La perspective de finir carbonisé ne l'enchantait guère, surtout après ces expériences de noyade. Même si cela s'agissait d'un songe, la douleur, elle, se révélait être une véritable torture. Il avait encore l'impression de sentir les flammes lui lécher le visage, brûlant ses cils et ses sourcils. Sam s'allongea à ses côtés.

— Tout va bien ? Pardon de te réveiller, mais à t'entendre ça n'avait pas l'air d'être un rêve très agréable.

— Pas vraiment, non.

— Tu m'appelais. Ne me dis pas que je suis le responsable de tes tourments. J'en voudrais au moi parallèle si c'était le cas.

Les articulations endolories, Raphael se redressa sur ses coudes pour s'appuyer contre la tête de lit.

— Non, ce n'était pas toi.

Si l'incendie se révélait être le fruit de cette nuit, la douleur insidieuse du manque, quant à elle, était installée dur comme fer. Elle avait transcendé la frontière entre la réalité et le royaume onirique pour le torturer, et l'épuiser mentalement et physiquement. Il lui fallait sa dose salvatrice ou il allait finir par s'écorcher vif afin de libérer ces insectes imaginaires qui grignotaient ses os et ses organes. Raphael tiqua. Ce n'était qu'un rêve...

— Dans mon sac, gémit-il, la poche avant. Il y a un flacon. Donne-le-moi, s'il te plait.

— Qu'est-ce qu'il t'arrive ?

La bouche pâteuse, Raphael déglutit.

— Sam, juste... Ne réfléchis pas et donne-le-moi ! Je... P-pardon. D-donne-le-moi, s'il te plait. J'ai mal. J-j'ai tellement mal.

Sam alluma la lampe de son côté du lit et l'expression de Raphael se tordit dans une agonie silencieuse. Il découvrit alors son teint cireux accentué de cernes violacés encadrant ses yeux embués. De longues stries rouges balafraient la peau de ses bras. De grosses gouttes de sueur ruisselaient sur front, et sa poitrine se soulevait et s'abaissait comme s'il venait de courir un marathon. Il jura et porta le revers de sa main sur son front à la recherche d'une potentielle fièvre pouvant expliquer son aspect maladif, mais ne trouva qu'une froideur inquiétante.

— Je devrais aller chercher mon père. Tu as une mine épouvantable et tu es complètement trempé.

Raphael renferma ses doigts autour de son poignet avec plus de force qu'il ne l'aurait voulu. Il n'avait aucune envie que tous les habitants de cette maison le voient dans cet état pitoyable. Cela signifierait être rangé dans la case du toxico. Être catalogué — surtout par eux — était la dernière chose qu'il désirait.

— Non. Tout va bien. (Il serra les dents.) Maintenant... passe-moi ce flacon s'il te plait. Je n'en peux plus. Je... J'ai l'impression que je vais mourir. Allez... s-s'il te plait, donne-le-moi. Je t'en prie, donne-le-moi.

Le Passé Ne Meurt Jamais [BxB] En RéécritureWhere stories live. Discover now