Chapitre 26

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Après réflexion et incité par Sam, Raphael avait partagé le contenu de ses rêves et de ses recherches avec Anderson. Il lui avait avoué également avoir interrogé Nora Fawcett et Boris Pavel. Le visage impassible, Helen, avait écouté, en silence, hochant de temps en temps la tête, derrière son bureau sur lequel chaque élément occupait sa place avec une précision impeccable. L'ordinateur portable trônait parfaitement au centre, pas un stylo ne traînait hors de leur verre, pas une feuille ne dépassait du tas, et une longue règle métallique s'étalait de tout son long parallèlement au meuble. À la différence du bureau de Casey, dans lequel des photographies dévoilaient des aspects intimes de sa vie personnelle, rien n'était divulgué dans celui de la Capitaine. Elle avait mis un point d'honneur à ne pas mélanger vie privée et vie personnelle, si bien qu'après son mariage, elle avait gardé son nom de jeune fille et ne portait aucune alliance autour de son annulaire gauche, même si tout le monde connaissait Richard Mitchell, son mari qui occupait un poste de conseiller municipal. Question de principe. Elle souhaitait être reconnue en son nom, et non comme la femme de.

Helen observa le jeune homme, assis en face d'elle, dont le regard trahissait à la fois une profonde tristesse et une dureté telle que ses iris donnaient l'impression de projeter des éclairs. Ces yeux ont vu l'impensable, songea-t-elle, et ils l'ont enregistré dans leur ADN.

— Pourquoi n'êtes-vous pas venu vous confier à moi plus tôt, s'enquit-elle, dois-je vous rappeler que vous êtes payé à l'information ? Or si vous les gardez pour vous, vous n'obtenez pas de salaire.

L'attention de Raphael dériva sur un tas de diplômes encadrés, décorant un mur, suspendus au-dessus d'un bahut en bois brut sur lequel reposait un imposant bouquet de camélia rose qui diffusait leur parfum délicat dans la pièce.

— Ce n'est pas l'argent qui m'intéresse et... peut-être qu'une partie de moi a encore du mal à réaliser que des gens comme vous me croient.

À son tour, la Capitaine examina les cadres, sa plus grande fierté.

— Des gens comme nous ?

— Si... instruits. Et puis, vous êtes des fli... Des policiers. Votre boulot se base sur la rationalité et les faits concrets. Pas sur des suppositions et encore moins sur des visions.

— Je ne suis pas aussi instruite que vous le pensez. L'instruction d'une personne ne se base pas sur un bout de papier. Tenez, par exemple. J'ignore tout du monde de l'occulte, et Dieu sait que cela doit être aussi intéressant que complexe.

— Je n'y connais rien non plus. Ce que je suis, je ne l'ai pas choisi. J'ai même tenté par divers moyens de m'en débarrasser. Ce n'est pas un don, mais une malédiction. Je vois ces gens mourir atrocement et je ne peux rien faire pour empêcher ces prédictions de se réaliser. Je ne souhaiterais ça à personne. Il m'arrive même parfois de ne plus savoir différencier ces rêves de la réalité, ou de ne pas comprendre leur signification profonde. Un jour, je finirai par perdre la raison, si ce n'est pas déjà fait.

— Voyons, fit Helen à travers un sourire chaleureux, ne dites pas ce genre de chose. Je suis sûre que vous vous débrouillez très bien. Venons-en à la raison de votre présence dans mon bureau. Vous êtes là pour Nikita Pavel.

— J'ai appris que vous étiez amis.

— C'est exact. Nous formions une petite bande avec les garçons et Margaret.

— Taylor ?

Anderson opina.

— Elle s'appelait Campbell à l'époque.

— Vous êtes restées amies après l'incendie ?

— Êtes-vous en train de m'interroger, agent Kelly, plaisanta la Capitaine, je ferais mieux d'appeler mon avocat si tel est le cas.

Le Passé Ne Meurt Jamais [BxB] En RéécritureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant