Chapitre 2

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— Monsieur Kelly, je vais avoir besoin de tous les détails dont vous vous souvenez. Tout, du début à la fin, somma Casey.

Raphael réitéra ses propos tandis que le lieutenant les consignait sur son ordinateur. Hasna Malek qui semblait fuir quelqu'un. L'accident. La présence d'un nourrisson dans le véhicule et cette bombe au poivre dans la boite à gants qui pouvait laisser supposer que la jeune femme se sentait en danger et souhaitait se protéger.

Harris récupéra une photo dans le bac de l'imprimante, il scruta un instant le visage au teint olive et aux traits délicats de la victime, encadré par d'épaisses boucles noires. Plutôt jolie. Ses grands yeux sombres et rieurs n'auraient plus jamais l'occasion de contempler le monde. Trois jours plus tôt, à plus de 150 kilomètres de Bellwood, cette femme et sa fille s'étaient volatilisées du domicile familial. Et selon toute vraisemblance, elles étaient passées par chez eux.

— C'est elle ?

Le témoin l'observa à peine avant d'opiner en silence.

— L'avez-vous rencontrée en personne, en dehors de ce rêve ?

Le lieutenant étudia l'homme au regard fuyant. La lumière blafarde du bureau n'épargnait pas son teint déjà pâle, et il tremblait comme s'il souffrait d'hypothermie. Sans parler de cette affreuse manie qu'il avait de se triturer la peau des doigts. Il en avait rencontré des gaillards comme lui, au cours de sa carrière. Des hommes malades qui racontaient tout et n'importe quoi pour un peu d'attention. Un vilain doute s'installa chez lui. Et s'ils avaient affaire à un toxicomane qui, dans un état second, avait agressé cette femme la veille au soir dans le but de lui dérober son argent afin de se payer sa dose ? Il aurait gardé certains souvenirs, mais se serait complètement détaché des événements. C'était plausible. Plus plausible que cette histoire de rêve qui n'avait ni queue ni tête.

— Oui. Je l'ai aperçue une fois. Chez Ricky.

— Ricky, le restaurant ?

— Oui.

Harris avala une gorgée de café et grimaça quand le liquide brûlant descendit le long de son œsophage.

— Et que s'est-il passé là-bas ?

Raphael porta une main sur sa tempe gauche.

— Elle... Elle avait un œil au beurre noir.

Le lieutenant releva un sourcil face à cette révélation et le nota. Le témoin tourna la tête en direction de la vitre qui donnait sur l'open space. Casey suivit son regard et rencontra celui de l'officier Sam Greene qui discutait avec une femme aux joues diaphanes. Il se leva et tira le rideau pour apporter un peu d'intimité à la pièce avant de retourner derrière son bureau.

— Quoi d'autre ?

À son tour, le témoin porta son gobelet à ses lèvres avant de dissimuler une nouvelle fois ses doigts entre ses genoux.

« C'est le stress ou le manque qui te dérange, mon p'tit gars ? »

S'il s'agissait de la seconde option et que ce type était réellement coupable, alors il ne tarderait pas à se mettre à table et à avouer. Même les plus coriaces ne résistaient jamais longtemps sans leurs doses. Ils finissaient tous par se rouler par terre, hurlant de douleur avant de cracher les infos qu'ils attendaient d'eux.

— Son mari, commença Raphael.

— Thomas Bowman ?

— Ils se sont disputés. Il l'a frappée.

— Vous avez été témoin de la scène. Il était là, avec elle ?

— Pas de la façon dont vous l'entendez.

Le Passé Ne Meurt Jamais [BxB] En RéécritureWhere stories live. Discover now