Chapitre 41

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Au nord de Bellwood, tandis que tous les regards se tournaient vers la forêt, une masse sombre se faufila discrètement dans la nuit parmi les arbres décharnés. Elle avait contourné le mobile home à la recherche de cette foutue moto, s'assurant ainsi de l'absence du propriétaire. Ces incapables de flics l'avaient sans doute placé sous protection, le temps que ça se tasse. Grand bien leur fasse, ce petit fouille-merde ne l'intéressait pas. Pas pour le moment en tout cas.

Les marches du perron craquèrent sous ses kilos. L'ombre s'en fichait. Elle connaissait le voisinage et ses silences complices. Personne ne parlerait. Le monde était égoïste. Les gens voient, mais leurs bouches restent closes tant qu'ils n'y gagnent rien. Devant la porte, elle déposa son message, un avertissement pour son destinataire. L'ombre savait qui il était, et où le trouver. Elle l'avait laissé fuir plus tôt dans la journée, bien qu'elle aurait pu facilement le rattraper et lui tordre le cou. Si celui-ci persistait à foutre son nez dans ses affaires, elle ne le louperait pas à la prochaine occasion. Elle n'avait rien à lui reprocher, hormis sa curiosité gênante. Son travail ici n'était pas fini. Cette ville entière allait subir sa colère. L'ombre repartit silencieusement. Derrière elle, les ailes d'un corbeau empaillé dansaient dans le vent.

Dans la rue, les lampadaires venaient de s'allumer. Sam couvait des yeux Raphael, lové de l'autre côté du canapé. Sa nuit avait été difficile. L'officier s'était réveillé toutes les heures en sursaut, s'était assoupi, puis endormi et réveillé encore. Raphael ne voulait pas l'admettre, mais cette agression l'avait secoué plus qu'il ne le laissait paraître. Il parlait dans son sommeil, des mots inintelligibles, et des tics déformaient son visage. Doté d'une grande sensibilité, il se drapait dans une façade de dureté, une armure façonnée pour se protéger d'un monde qui lui avait infligé d'innombrables blessures. Sam ressentait une pointe de frustration, face à son refus d'écouter les mises en garde, de constamment se placer en danger, mais dans un sens, il le comprenait. Comment pouvait-il faire confiance à qui que ce soit ?

Il se redressa difficilement. Il n'avait pas dormi dans la plus confortable des positions et était maintenant fourbu de douleur aux épaules et aux lombaires. Il le secoua avec douceur.

— Raph. Raph, réveille-toi.

Raphael fronça les sourcils tandis qu'il s'efforçait d'ouvrir les yeux. Il toussa plusieurs fois, puis marmonna d'une voix teintée de sommeil :

— Mmm, quelle heure il est ?

— Un peu plus de six heures.

— Sam, tu commences l'après-midi. Laisse-moi, geignit-il en rabattant sa capuche sur sa tête pour se protéger de la lueur orangée et tamisée d'une lampe sur pied. Toi aussi... Dors.

— Je voudrais profiter de la matinée pour avancer sur certains points.

L'officier retira sa capuche et ébouriffa ses cheveux.

— Eh, ne te rendors pas. Va prendre une douche et habille-toi. Je t'expliquerai quand tu auras les idées claires.

Raphael repoussa le plaid et se frotta les paupières. Il se leva et râla dans sa barbe.

— J'y crois pas. T'es claqué. Ça se voit sur ta tête. Pourquoi tu ne profites pas de ton temps de repos pour te reposer justement ?

— Je pourrais te demander la même chose. Tu aurais pu rester au lit hier. Ça t'aurait évité bien des problèmes.

— Et vous n'auriez jamais su où se trouvait l'arme du crime. Un mal pour un bien.

— Allez, va te laver. Je prépare le café. Tu te souviens où est la salle de bain ?

Le Passé Ne Meurt Jamais [BxB] En RéécritureWhere stories live. Discover now