L'expiation d'un renégat

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Eiko était drapée dans un magnifique kimono blanc aux motifs floraux sur lesquels on avait cousu des fins fils d'or. Elle marchait sur des getas, des sandales traditionnelles, comme si c'étaient des simples ballerines. Sa posture était aussi élégante qu'irréelle, elle lui faisait penser à une star de Hollywood des années 20. Les gens dans la boutique ne manquaient pas de se tourner pour lui jeter un deuxième regard admiratif.

Ren qui l'accompagnait, était tout noir vêtu, le col de sa chemise légèrement ouverte laissait entrevoir des traces de sueur, malgré la fraîcheur de la matinée. Son visage était empreint de fatigue mais surtout d'une certaine inquiétude, qu'il tentait de dissimuler avec un sourire méditatif. 

- Bonjour, salua-t-elle, incertaine

Le lent sourire masculin picota les veines de son coeur.

Eiko s'inclina avec grâce, et le peigne en jade qui retenait sa chevelure et sur lequel étaient attachées des mini ornements en cloche, firent un bruit mélodieux.

- Bonjour Lilith san

La jeune fille remarqua, non sans plaisir, que tout le monde s'était mis à l'apeller par son vrai nom. Après avoir côtoyé les yakuzas, ceux-ci semblaient l'accepter par son nom et non pas celui implanté par le boss.

- Que faites-vous ici? Ne peut-elle s'empêcher de demander

Ren ne semblait pas particulièrement content de se trouver là, comme si l'endroit lui inspirait méfiance.

- Vous avez rendez-vous avec l'oyabun, fit-il, le ton aussi grave que sérieux. Je viens vous chercher

Lilith ne comprenait pas pourquoi il était chargé de cette tâche.

- Où il est?

- Il n'est pas loin, répondit Ren mystérieusement. Venez, ne traînons pas ici

Lilith hésita. Les commerçants suivaient leurs échanges avec un peu trop d'intérêt.

- Ne faites pas attendre l'oyabun, insista Eiko en s'inclinant. S'il-vous-plait

Il y avait quelque chose d'étrange dans cette requête. Mais il n'y avait aucun danger à côtoyer cette femme, Lilith avait le sentiment que les affaires des Ikeda lui tenaient à coeur.

Lilith quitta la boutique sans que Eiko eut à payer, on s'inclinait devant elle avec un cordialité et Eiko acceptait cette marque de respect comme si c'était normal. Lilith remarqua qu'au loin, quelques individus les regardaient avec un intérêt glacial. Ren les ignora, tandis que Eiko les saluait d'un signe de tête discret mais bienveillant. La voiture se trouvait derrière la boutique, Lilith monta, et fut surprise d'apercevoir qu'Eiko embarquait aussi. Ils ne partirent pas tout de suite, Ren tapotait le volant avec ses doigts, un peu impatient.

- Est-ce vraiment nécessaire? Finit-il par demander

Eiko hocha la tête.

- La pointe de l'abeille est plus douloureuse si elle est agitée, répondit la belle femme d'une voix douce et patiente

Lilith se dit qu'il faudrait qu'ils arrêtent de parler en paraboles.

La portière s'ouvrit.

Papy-amoureux-des-petites-culottes apparut, flamboyant dans son trop grand costume rayé et sa cravate de papillon. Son sourire était aussi rayonnant que celui d'un requin qui vient de dévorer une famille de phoques.

Les hommes qui l'accompagnaient étaient tout aussi charmants.

- Merci, les garçons, Ren san prendra le relais à partir d'ici, dit le vieux en les congédiant

La griffe de la panthère noireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant