Partie 35

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Une lune immense brillait dans un ciel d'encre, sans aucune étoile dans cette nuit d'été. Le château des Rois de Saillans s'endormait peu à peu. Garance était assise face à la fenêtre dans l'obscurité, vêtue d'une longue chemise de coton blanc. Elle brossait lentement ses longs cheveux bruns.

Ses pensées volèrent jusqu'à Galahaad, elle l'avait à peine croisé. Depuis deux jours, il semblait occupé à faire que leur mariage soit une fête réussie. Il passait beaucoup de temps enfermé dans le bureau accompagné du Roi et d'Eliam, pour assainir les relations des deux hommes. Ses efforts commençaient à payer, le dîner s'était relativement bien passé. La famille s'était retrouvée autour des futurs époux. Acôme n'avait fait aucune remarque à la jeune femme. Galahaad rayonnait. Eliam, passablement éméché avait régalé l'assemblée d'anecdotes amusantes sur sa vie de marin. Garance avait découvert un conteur doué et plein d'humour. Pourtant, chacun avait soigneusement évité le regard de l'autre. Même Adrissa, sombre et inquiète depuis des semaines s'était quelque peu déridée.

Garance attendit qu'il n'y ait plus un bruit avant de poser sa brosse et de se lever. Elle se glissa jusqu'à la porte et l'ouvrit en silence. Le couloir était désert, aucun bruit ne lui parvenait, que ce soit des étages ou du rez-de-chaussée. Aucune lumière sous la porte des chambres de Galahaad et d'Eliam. Les battements de son cœur se mirent à raisonner dans ses tempes. Et s'il était de nouveau partit s'enivrer toute la nuit ?

Garance referma délicatement la porte de sa chambre. Elle traversa le couloir sur la pointe des pieds jusqu'à la chambre d'Eliam. Elle n'hésita pas un instant avant de l'ouvrir et de se glisser à l'intérieur de la pièce. Plongée dans l'obscurité, seule la pâle lueur de la lune rompait la pénombre. En découvrant le lit fait, la pièce vide, son cœur s'emplit d'une immense tristesse. Elle s'adossa à la porte et poussa un long soupir; la pièce était emplie du parfum d'Eliam, l'espace raisonnait de sa présence. Elle s'avança vers le lit à baldaquin et frôla la couverture des doigts. Elle pouvait imaginer son corps massif blotti entre ses draps. Elle contourna le lit et s'avança jusqu'à la fenêtre, son regard se posa sur la ville qui s'éteignait sous ses yeux. Elle avait la sensation qu'une horloge s'était mise à résonner dans sa tête. Il ne lui restait que quelques heures avant qu'elle ne doive assumer ses choix, il ne lui restait que quelques heures pour vivre ce à quoi elle rêvait.

- Va-t-en !

La jeune femme tressaillit puis se figea, ses yeux cherchant la provenance de la voix rauque d'Eliam. Elle le devina, avachi dans un canapé qui faisait face à la cheminée. Elle ne voyait de lui qu'un bras tenant un verre.

- Je t'en supplie... Va-t-en, répéta-t-il d'une voix encore plus éraillée.

Garance ne répondit pas mais s'approcha de lui, lentement, sans précipitation. Les battements de son cœur s'apaisèrent, un étrange calme s'empara d'elle. Elle contourna le siège et le découvrit allongé, torse nu, seulement vêtu de son pantalon de cuir noir. Un sourire narquois étira les lèvres d'Eliam, mais ses yeux restèrent éteints.

- Ce n'est vraiment pas le moment de venir m'agacer, Petite Princesse.

- Je t'ai déjà dit de ne pas me nommer ainsi. Répondit-elle d'une voix calme et posée.

- Que viens-tu faire ici ? demanda-t-il alors que son sourire quitta ses lèvres.

La jeune femme ne répondit pas, elle posa ses mains sur l'encolure de sa chemise de nuit et ses longs doigts déboutonnèrent le premier bouton. Elle vit Eliam déglutir :

- Que fais-tu ? dit-il d'une voix brisée.

La jeune femme ne répondit pas plus et s'attaqua au deuxième bouton. A cet instant, un flot de lave brûlante se répandit dans les veines d'Eliam, il laissa tomber son verre à terre en se relevant brusquement. Un éclair de fureur passa dans ses yeux. Ce fut au tour de Garance de déglutir, s'il tentait de l'intimider c'était réussi entre son regard fou et son pantalon qui tombait trop bas sur ses hanches. Mais elle ne laissa rien paraître et poursuivit le déboutonnage de son vêtement. Eliam fit un pas de plus et la saisit brutalement par les épaules.

Les Royaumes d'Eredjan 1 - La Princesse de CendreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant