Elementum {Tome 5}

I

Si on m'avait dit qu'un jour la différence me vaudrait d'être séquestrée dans les souterrains du ministère de la Magie, éloignée de tout contact avec mes proches, à attendre juste qu'on me réveille de ce qui s'apparente à un cauchemar, j'aurai fortement ricané d'ironie. Car qui pouvait prédire que moi, enfant des parents Malefoy et fille adoptive de Éléona et Daniel Rogue, petite amie de George Weasley et Sorcière douée de magie, adorant les farces en tous genres et née pour le sarcasme et la rébellion - puisse un jour se retrouver dans une situation aussi délicate que celle où je me trouve ? À part moi, personne n'en aurait songé quoique ce soit, pensant qu'en me protégeant, tout irait pour le mieux. Or, ça n'a pas été le cas. Mais je ne me plains pas. Mon sort est mérité par l'attraction de pensée que j'ai toujours eu ; la peur ébranlante d'être dans une telle complication. Et tout ça à cause d'un don aussi précieux qu'effarant appelé « cinq Éléments »... Il faut le dire, ce n'est pas l'idée que je me faisais de mes vacances d'été 1995.
Mais ce n'est pas le fait d'être enfermée qui me cause le plus de soucis, ni le fait que Voldemort et Kristine soient en liberté dans la nature, loin de là, car ma véritable inquiétude est sur ce qu'il est advenu de George. Lorsqu'on était encore à Poudlard, juste après que Harry et moi avons assisté dans un cimetière au retour du troisième plus grand dégénéré qui puisse exister et être revenus à l'école de magie, George a presque menacé le Ministre de la Magie pour être emmené avec moi, afin de s'assurer qu'on ne me fasse pas de mal. Sur ce point là, il eut tort ; si mes nuits sont peuplées de cauchemars plus effrayants et hantant que les uns et les autres, où je revois mon impuissance face au sort de mort qui a frappé Cedric Diggory en pleine poitrine, mes journées sont elles aussi sujettes à de belles tentatives d'outrage à ma personne compte tenu qu'on ne cesse de vouloir me manipuler l'esprit pour se servir de mon don, me faire d'autant de tests et d'expériences que possibles pour une raison qui m'est totalement inconnue... Alors pour la conviction de sureté, il faudra repasser. Ce qui en reste que très inquiétant et irritant.
Depuis qu'on m'a jeté dans cette pièce aux murs, au plafond et au sol noir, absente de fenêtres mais aux lumières restant allumées en permanence, il n'y a rien que le sujet George qui m'obsède. Où est-il ? Qu'ont-ils fait de lui ? Est-ce qu'il va bien ? Le torturent-t-ils mentalement pour lui arracher des informations sur le fonctionnement de mon don ou encore sur mes peurs les plus profondes ? Lui ont-ils réservé le même traitement qu'à moi ? Mr Weasley a-t-il réussi à au moins le faire sortir d'ici ?
Tant de questions sans réponses qui obsèdent mon esprit. Mais même si l'on m'a pris ma baguette magique et ma montre à gousset ; pour m'apporter le même repas trois fois par jour - une tranche de jambon, de la purée, des carottes crues, un bout de pain comportant une gélule faisant dormir, de l'eau -, jamais à la même heure ; j'ai plus ou moins estimé mon enfermement à plus de seize jours. Or, j'ai bien l'impression que cela fait plus longtemps que ça. Pourtant, pour ce qui est de l'ennui, je n'en ai aucun grâce à mon pouvoir de création par la pensée. Aussi mes geôliers se sont aperçus très vite que chacun de leur plateau repas restait toujours intact (d'autant plus que je suis végétarienne, alors leur jambon, ils peuvent le garder). Dès le premier jour de mon arrivée ici, après une discussion qui est partie en vrille à cause de mon caractère inflammable, j'ai tout de suite comprise qu'ils allaient essayer de me faire des expériences pour ma différence. Sitôt remarqué, j'ai anéanti toutes leurs chances en refusant d'obtempérer à quoique ce soit, y compris d'avaler leur foutue gélule remplie de somnifères. Évidemment, mon impulsion de guerrière intérieure en prend toujours un coup en voyant mon impuissance devant une trentaine d'Aurors, mais ça me fait justement du bien d'extérioriser ma fureur par diverses manières. Comme envoyer nombre d'Aurors au sol grâce à mes arts martiaux ou mieux encore, avec mon don. Mais ces imbéciles ont été très vifs d'esprits ; ils se sont chargés de toujours me menotter avec des liens en fer, de quoi me rendre épuisée à tous les niveaux.
Mais le seul point que je retiens sans cesse est cet unique mot : seule. Dans une pièce capitonnée dépourvue de couleur, à l'exception d'une salle de douche très étroite et peu hygiénique, et une couchette inconfortable sans couverture ni oreiller. Seule dans un silence angoissant qui est souvent interrompue par l'ouverture de la porte. Je n'ai strictement rien, certes, mais cela n'a pourtant rien d'apocalyptique tant que je reste ici. Car c'est aussi là que je peux garder mon temps à méditer - si encore c'est possible d'y arriver - et enchaîner constamment des mouvements d'arts martiaux et de danse pour ne pas devenir folle, tout en découvrant quelques fois des possibilités par la matérialisation de pensées. Une fois, j'ai réussi à faire apparaître des vêtements propres et un gel douche. J'ai été stupéfaite de mon pouvoir. Celui-ci, bien qu'incroyable, a tout de même ses limites. Lorsque j'ai voulu matérialiser ma baguette magique, je n'ai réussi qu'à faire apparaître une brindille de bois, rien de plus... Quelle poisse, sérieusement !
Mais je ne suis certainement pas la plus à plaindre. Les Weasley, Daniel, Éléona, Sirius, David et tous mes amis... Ils doivent se faire constamment un sang d'encre et se méninger pour trouver un moyen afin de nous faire sortir d'ici. Et malgré toute la torture mentale qu'on m'inflige chaque jour, je ne perds pas espoir qu'on réussisse à nous venir en aide...
C'est le déclic de la porte de ma cellule « chambre » qui m'éjecte soudain de mes pensées. Mon regard s'assombri. Je lève ma tête légèrement avant de la reposer sur ma couchette, une main sous ma nuque, l'autre sur mon ventre. Les Aurors avancent à l'intérieur de la pièce, laissant la colère s'insinuer en moi lorsque j'en compte six.