Elementum {Tome 5}

VIII

  Je soupire, les écoutant d'une oreille distraite en essayant de faire abstraction de leurs pensées multiples qui me percent les tempes. En acceptant de faire partie de l'Ordre du Phénix, je m'attendais à de l'action, à de la bagarre, quelque chose de palpitant... Or, en fait, ils ne font que parler de la même chose : les prophéties, faire des rapports sur des Mangemorts qu'ils aperçoivent, le recrutement de d'autres membres et évidemment, il fallait s'en douter, Harry, qui, tu te fais bien d'y croire, n'est au courant de rien.

- Et rappelez-moi pourquoi Harry ne doit rien savoir ? soupirai-je en me massant les tempes.

- Dumbledore estime préférable qu'il ne sache rien, réitère Sirius.

- Et vous êtes sérieusement d'accord avec ça ? lâchai-je en les regardant à tour de rôle, incrédule.

- Mélody chérie, commence Mrs Weasley sur un ton qu'elle espère rendre amadouant ; tu sais très bien ce que Dumbledore a dit, on ne va pas revenir là-dessus. Il ne faut pas révéler à Harry plus de choses qu'il n'a besoin de savoir.

  J'ai une exclamation de dédain en entendant ça.

- Vous oubliez de penser au long terme, remarquai-je, les sourcils froncés.

- Qu'est-ce que tu veux dire ? demande David, sa petite voix toujours si enfantine, en terminant de lire le journal.

  Ce petit gars est vraiment très intelligent, même plus que moi à l'époque, c'est amusant.

- Quand Harry saura que vous le surveillez sans lui dire un mot, quand il découvrira la raison pathétique qui se trouve derrière uniquement parce que Dumbledore, le meilleur et soi-disant le plus grand protecteur de cette belle petite planète bleue, juge bon de lui cacher la vérité, il va nous péter un câble - et honnêtement, ça se comprend lorsqu'on voit les Dursley.

  Je sirote mon thé noir au citron avec ma paille d'un geste nonchalant, les regardant avec une évidence teintée de mépris qui m'est apparue depuis ce séjour au ministère de la Magie.

- Es-tu en train de nous dire que tu doutes des paroles de Dumbledore ? demande Remus, n'osant pas le croire.

- Exactement, confirmai-je sans m'en sentir coupable. Dumbledore a beau avoir créé l'Ordre - et encore, je soupçonne Tantine de vraiment l'avoir aidé avec sa magie -, il n'est pas aussi parfait que vous le prétendez...

- On n'a pas dit qu'il était parfait, rétorque Sirius.

- Non, mais à vous entendre, c'est comme la croyance stupide des Moldus sur le Dieu tout puissant - et désolée si quelqu'un de l'Ordre est religieux, je le respecte, ne vous méprenez pas ; sauf que vous donnez tous sans cesse l'impression d'idolâtrer un vieil homme certes puissant, mais qui n'a pas pris les meilleurs décisions qui soient au cours de cette dernière décennie. Un seul exemple, tenez : la dernière fois, parce que « Monsieur-le-plus-puissant-de-la-Terre-entière-et-plus-vieux-que-Yoda » a décidé d'installer un tournoi suicidaire, Harry et moi avons failli y laisser notre peau ! Ah. Voldemort est aussi revenu, Cedric est mort, laissant des pauvres mômes de onze ans choqués dès leurs premières scolarités, et évidemment, je ne cite pas non plus les autres merveilleuses idées qu'il a eu et qui a amené ce vieux Jedusor a boire du sang de licorne ; la Pierre philosophale, par exemple. (Je prends une gorgée de ma bouteille avant de grimacer par l'intensité du thé noir froid.) En seconde année, évidemment, Harry, Ron et moi étions encore obligés de sauver le cul de tout Poudlard - et par ailleurs du monde Magique tout entier et de leur Gouvernement corrompu - à cause d'une limace géante qui trainait dans la plomberie de l'école pour agresser des innocents sous l'ordre d'un psychopathe en série. Alors, sérieusement, avec la situation actuelle, les besoins de Dumbledore sur la sécurité, on s'en balance, ça ne résoudra pas nos problèmes notés... hum... Quoi, déjà ? Ah oui ! Kristine, que Tantine et moi avons été les seuls à avoir vu de notre vivant, et particulièrement Voldemort ! persifflai-je avec amertume en me penchant plus en avant, commençant à lâcher ma façon de penser. D'ailleurs, en parlant de ça, si Dumbledore est si puissant que vous le prétendez, pourquoi chaque fois que Harry et moi le prévenons du danger que représente Voldemort, il se voit mystérieusement appelé, et d'autres fois, il est étrangement « forcé de partir » ? Et bien sûr, j'ai tellement de choses à vous présenter pour prétexter le fait que je doute fortement de Dumbledore, que je pourrais vous en faire une liste complète. Exemple concret lorsqu'il a lui-même décider de laisser Harry avec les Dursley, malgré le fait qu'il ait été averti de leur horreur - j'ai des preuves concrètes, et je le confesse ; les pensées de McGonagall ont été très claires la dernière fois qu'elle est venue ici.