IV

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  Je suis une guerrière. Et les guerrières ne pleurent pas.
 Je ne cesse de me le répéter en tout cas. Car je pense que si j'arrêterai d'au moins penser à celle que je suis, je deviendrais vite folle, même si cette dernière supposition semble envisageable dans les conditions actuelles. Je perdure à regarder sans vraiment voir un point invisible sur le mur, assise sur mon lit, les jambes rapprochées à ma poitrine, dans l'espoir au moins de trouver du réconfort dans mes songes. Si George serait là, ou qui que ce soit à qui je tiens particulièrement, il me dirait de rester forte, de dédramatiser, que ce n'est pas de ma faute si on en est là. Or, c'est là que le doute s'installe, que la haine monte et que l'amertume augmente.
  Ils veulent me formater pour être conditionnée, afin que j'oublie qui je suis.
  Cette simple allusion me donne des frissons d'effroi. Non pas car ils veulent me contrôler puisqu'ils n'y arriveront jamais, mais seulement pour le fait d'oublier qui je suis. Si je perds la mémoire, je ne saurai même plus qui est George. Je ne reconnaîtrais pas Éléona, Daniel, Fred, David, Amy, et pire, Drago, si on m'effaçait la mémoire et que je devrais, un jour, les revoir. Ce fait là est presque impossible, ça, je le sais. Mais ma quiétude n'est que plus présente chaque minute qui passe. Si j'oublie Tantine, j'oublie ce qu'elle m'a donné, ce qu'elle m'a appris avec Daniel ; ils m'ont dit que je n'étais pas un monstre, pourtant, si le ministère de la Magie réussit à me conditionner, j'en serais un. Je serais à leurs ordres, à leur merci. Ils auront non seulement la possibilité d'intimider le monde entier, mais aussi de le détruire, tout en instaurant un contrôle total.
  Dans ma tête, j'imagine alors plusieurs scénarios les plus horribles. 
  Mais ça ne peut pas être vrai. Ça ne peut pas se passer comme ça, pas après tout ce que j'ai vécu. Et je l'oublie souvent, mais je tiens toujours à Narcissa et Lucius, même s'il m'est arrivé de le nier énormément de fois. J'ai beau les avoir hais, détesté pour ce qu'ils sont, en grande partie à cause de Lucius étant un Mangemort, je ne peux retirer le fait qu'ils comptent pour moi. D'une manière ou d'une autre, certes, mais ils restent mes parents biologiques... Et le pire que je ne veux pas oublier c'est George. C'est lui qui m'a sauvé, de toutes les façons imaginables. Il a non seulement été le premier en qui j'ai eu confiance, mais aussi le premier des garçons avec qui j'ai sympathisé (hormis Drago, Blaise et évidemment Harry et Ron). Il a été le premier à me prouver, en tant qu'ami puis en tant que petit-ami, qu'il serait toujours là pour moi et surtout qu'il m'aimait pour ce que j'étais, pas pour ce que je montrais. Et Amy... Fred, Harry, Ron, Hermione... La famille Weasley, Éléona, Daniel, Sirius... Tous ceux que j'aime... Si on m'efface la mémoire en me conditionnant aveuglément aux ordres, si tantôt le ministère de la Magie y arrive, et qu'on m'ordonne de tuer quelqu'un qui les gêne juste avec la puissance de mon don et mes facultés métapsychiques, je ne crois pas que je serais capable de résister, d'en faire qu'à ma tête.
  Je prends d'ailleurs cette dernière entre mes mains, essayant de calmer ma respiration alors que pour la première fois depuis longtemps, une réelle peur s'installe en moi. Et si ils y arrivaient ? Et si, dans un mois à peine, je vais devenir une véritable machine à tuer ?
  Moi qui ai ce don des cinq Éléments depuis ma naissance, jamais je n'aurai pu croire qu'on pourrait s'en servir pour faire le mal, encore moins m'utiliser pour asservir le monde et le mettre aux pieds du ministère de la Magie.
  Ma respiration est tellement rapide à présent que je me retrouve à être essoufflée, à sentir que mon cœur, au-delà de battre trop rapidement, est comme serrée par une main invisible.
  Et si j'étais forcée de révéler où se trouvent Daniel et Éléona ? Et si, par ma faute, on trouvait David et qu'on le mènerait ici de force pour le préparer à devenir comme moi ?
  Mes doigts tremblent à cette pensée, me piquent tellement que j'ai du mal à reprendre une parfaite contrôle de mes mains qui sont enfermées par du givre.

- Non, calme-toi ! me dis-je en me levant précipitamment, faisant les cents pas. Calme-toi, ça va aller ! Ça va aller, ça va aller, ça va... Non, ça ne va pas aller ! Non, non, non, non !

Elementum {Tome 5}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant