Chapitre XVI

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Je hère sans but précis dans les rues désertes de la capitale. En même temps, il faut être sacrément fou pour sortir par une telle tempête. La pluie s’abat sur la ville comme si la fin du monde arrivait. Et quand le seul fiacre que je croise en contre sens arrive à ma hauteur pour poursuivre son chemin, ce n’est que pour m’éclabousser. Cette journée n’aurait pas pu être pire, ce ciel gris est à l’image de mon cœur brisé.

L’avantage, c’est que même si je croise quelqu’un, personne ne verra mes larmes couler le long de mon visage.

—Hotaru ?

Je relève la tête quand à nouveau, on s’arrête à ma hauteur.

—Ath… Atheena ?!

Je ne peux cacher ma surprise quand je tombe sur la princesse à bord de son fiacre.

—Dépêche toi de grimper ! Tu es trempé !
—N…Non, je…
—Arrête un peu de faire ton idiot, s’agace-t-elle en ouvrant la porte du véhicule. Tu vas tomber malade !

Elle a raison, je suis trempé par la pluie battante qui continue de tomber. Comme mon cœur, le ciel verse toutes les larmes qu’il a accumulé.

—Alors, où est-ce que tu vas comme ça ?
— …

Assis en face de la princesse, j’ai fini par monté à bord car je sentais qu’elle me suivrait jusqu’au bout du monde si je refusais. Bordel, le malaise qui s’installe entre nous est insoutenable. Mais ce n’est pas comme ci je voulais lui parler.

Pour lui dire quoi, hein ?

Je ne vais quand même pas la féliciter pour avoir pris ma sœur pour épouse.

— Tu as décidé de jouer avec mes nerfs ?

Même si je ne la regarde pas, je sens son agacement dans sa voix. À travers la vitre de la fenêtre, je la découvre les jambes croisées, l’une qui sautille d’impatience alors que ses bras sont eux aussi entrelacés devant sa poitrine. Je n’ai pas besoin de la regarder directement. Je n’ai qu’à me concentrer sur sa respiration plus forte pour le deviner.

— Laisse moi tranquille…
—Tu pourrais au moins me regarder !

Énervée, elle m’oblige à lui faire face en m’attrapant par le bras.

—Hota… ru ?

Tous mes efforts pour ne pas pleurer devant elle volent en éclats. Là, je ressens tout un tas d’émotions m’envahir : colère, tristesse, déception, amour sans retour… je craque complètement quand je plonge mon regard dans le sien.

— Vas-y, je t’en prie ! Moque toi de moi comme tu le fais si bien depuis le début !

Il ne me reste plus que mon sale caractère maintenant que j’ai tout perdu. Si Atheena m’a pris mon cœur, elle ne me prendra pas ce qui me reste.

Jamais je ne me soumettrai à sa volonté.

—De quoi tu…
—Tu as joué avec mes sentiments ! Tu savais ce que je ressentais pour toi et pourtant, tu as décidé d’épouser ma sœur !

Je sais que je ne devrais pas dire tout ça, que c’est peine perdue mais je ressens le besoin de le faire.

— Tu te fous de moi, là ? Tu n’es pas sérieux ?

C’est la première fois que je l’entends prendre ce ton si froid avec moi.

—Qu…
—Tu me fais des reproches comme si j’étais la seule à être coupable !

Atheena m’attrape par le col de ma blouse encore trempée par les intempéries.

—Athee…
— Toi aussi tu m’as trahi !
—Ehh ??

Hein ? Trahi, moi ? Mais de quoi elle parle ?

Je tente de me défaire de sa poigne de fer mais Atheena est physiquement plus forte que moi. Dans cette situation, je peux voir son visage de près et son expression ravagée par la peine qui s’en dégage.

— Je suis parfaitement au courant pour Damien et toi !
—Quoi ?

Mes pupilles se dilatent quand elle le mentionne.

— Je n’ai fait que répondre à ta provocation, abruti fini.

Je laisse mes dents claquer et ma colère s’exprimer.

—C’est toi l’abrutie finie, idiote !
—Répète un peu ça pour voir !

Atheena comme moi laissons parler notre colère. À présent, notre discours n’est fait que de haine et de reproches.

—Idiote ! Idiote, idiote, idiote, idiote ! IDIOTE !

J’insiste sur la dernière répétition afin de lui montrer à quel point le dialogue entre nous est rompu.

—Très bien, tu m’auras cherchée.

Atheena ouvre un instant sa fenêtre pour donner des instructions à son chauffeur qui s’arrête quelques mètres plus loin sur une place.

—Qu’est-ce que tu fais ?
—Rien de plus que t’apprendre le respect et la discipline.
—Comment ?

À l’arrêt, l’alpha aux longs cheveux —noués— m’attrape de force pour m’obliger à descendre et à la suivre. Plus que la suivre, elle m’entraîne dans sa marche effrénée qui m’oblige même à légèrement courir.

—Tu me fais mal !
—Et tu n’as encore rien vu.
—Quoi ?

Atheena pénètre dans une vielle auberge et prend une chambre au hasard. La princesse me force à monter les escaliers avec elle en ignorant mes suppliques. Suppliques qui bien sur sont tournées sous forme d’ordres.

—Je vais faire ce que j’aurais dû faire dès le début.

Arrivé dans la chambre, elle me libère de sa poigne juste le temps de verrouiller la porte.

La princesse déboutonne les boutons qui retiennent le col de sa chemise.

—N’y pense pas même pas ! Me mets-je à crier. Il est pas question que tu me fasses l’amour !

Atheena se met à éclater de rire tout en se montrant menaçante. La princesse s’engage dans ma direction, se débarrassant de sa veste qu’elle laisse tomber derrière elle. Arrivée à ma hauteur, je tombe en arrière et atterris sur le lit.

— En effet, je ne compte pas te faire l’amour, me dit-elle.

Je soupire, soulagé. Mais alors que je crie victoire trop vite, l’ombre de la princesse met sa menace à exécution.

—Je vais te baiser.

Je dévisage Atheena, effrayé par ce qu’elle vient de me dire.

—Ah ah ah ! Oui, c’est ça ! Regarde moi avec cette peur sur le visage, Ho.Ta.Ru ! 🖤

Mon cœur rate un battement quand elle se jette sur moi.

L'Alpha au féminin Where stories live. Discover now