Chapitre 18

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−         Jocelyne ? s'éleva la voix enrouée de ma grand-mère.

Elle me fixa plusieurs secondes comme si j'étais une hallucination. Elle ne devait pas se douter que sa petite-fille, recherchée de tous, viendrait cogner à sa porte en premier lieu, avant même de donner des nouvelles à son père.

−         C'est bien moi, affirmai-je.

Elle porta sa main à sa bouche et balaya son regard autour de nous. Par chance, elle ne remarqua pas la présence d'Harry, qui s'était adossé contre la maison en bas du perron.

−         Que fais-tu ici ?

Sa voix était un peu rauque dût aux cigarettes qu'elle fumait depuis si longtemps. Ma mère avait souvent essayé de la convaincre d'arrêter puisque c'était mauvais pour sa santé, mais ma grand-mère n'en faisait qu'à sa tête, ne voyant pas l'intérêt de perdre une telle habitude.

« Les dommages sont déjà faits s'il y en a, de toute manière ! » répétait-elle à chaque fois qu'on abordait le sujet.

−         Je... Je suis venue te demander de l'aide.

J'avais décidé d'aller droit au but. Il était inutile de lui mentir en lui disant que je voulais avoir de ses nouvelles.

J'appréciais ma grand-mère, mais il y avait toujours eu ce froid entre nous deux qui m'empêchait de m'ouvrir à elle. Ce fait a probablement contribué à la surprise sur son visage en me voyant sur son balcon. En temps normal, je ne serais jamais passée chez elle.

Elle ne me répondit pas, attendant surement des explications de ma part.

−         Je suis venue avec un ami, précisai-je.

Qualifier Harry d'ami me procure un sentiment étrange. Je ne sais pas dans quelle sorte de relation je me trouvais avec lui. À première vue, les gens qui ne nous connaissent pas pourraient penser que nous sommes des jeunes qui aiment passer du bon temps ensemble, mais en réalité, ce qui nous unissait était très différent. Nous ne nous connaissions que très peu et notre rencontre était dût à une histoire de meurtre. En fait, nous étions les deux personnes les plus rechercher dans les villages d'Eigle, d'Helfond et de ceux avoisinants, en fuite pour des causes que seuls nous étions au courant. Personne ne savait qu'Harry s'était évadé pour sa liberté et les gens ignoraient aussi que ma disparition n'était pas liée à une fugue, un enlèvement digne des émissions télévisés ou toutes les histoires tordues qu'ils ont bien pu inventer. Elle était reliée à l'enquêteur qui dirigeait cette affaire. Le simple fait de penser à tout ça me procura un frisson dans le dos. Toute cette histoire est incroyablement absurde.

−         Il est blessé et on aurait besoin de toi pour le soigner, ajoutai-je de ma voix la plus tendre possible.

Ma grand-mère sembla suspicieuse et recula d'un pas. Elle fronça les sourcils en me regardant et je fis discrètement signe à Harry de venir. Il fallait que j'appuie mes propos avant qu'elle me ferme la porte au nez. C'était donc le moment de vérité. Mes mains étaient moites et je tentai du mieux que je le pouvais de garder un sourire plus ou moins sincère au visage. Dans un monde idéal, ma grand-mère ignorera complètement l'identité d'Harry. Nous pourrons alors nous dépêcher de soigner la plaie d'Harry et peut-être même s'empiffrer dans un délicieux repas.

Harry avança lentement, sortant de sa cachette sur le côté de la structure de bois, et monta les marches pour me rejoindre sur celle-ci.

Puis, durant un moment qui sembla être interminable, ma grand-mère le fixa de haut en bas, détaillant les moindres aspects de lui. Je jetai un regard à Harry qui essayait lui aussi de rester calme. Je voyais dans ses yeux qu'il regrettait déjà son acte et qu'il me maudissait de l'avoir traîné ici.

Whispers of EvilWhere stories live. Discover now