Retour en arrière

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Plus d'une semaine avant l'enlèvement de Jo

Harry n'avait plus eu le droit de sortir de sa cellule durant quelques jours. Il était resté séquestré nuit et jour, recroquevillé au fond de son mitard, ressemblant à une serpillère oubliée sur le sol. Il ne savait plus quoi penser, se résolvant à ignorer la voix assaillant son esprit. Il ne s'avait même plus s'il s'agissait de la sienne ou celle de Melody, lui jacassant toutes sortes de glorifications sur le geste qu'il avait posé. Était-il lui-même fier ? Il fixait le mur devant lui depuis toutes ces heures, comme si le béton effrité allait lui livrer la réponse.

Le visage ensanglanté de Mason était toujours aussi claire dans sa tête, comme imprégnée à l'encre indélébile. Il ricanait alors que du sang coulait hors de sa bouche, n'éprouvant aucune douleur. Ce n'était pas juste. Harry devait faire souffrir cet homme pour le faire payer. Il aurait ensuite dût se sentir mieux, enfin libéré. Alors pourquoi le poignard s'enfonçant sans cesse au fond de lui ne s'était-il pas dissipé ? Pourquoi est-ce que ce monstre d'Atkins, lui, pouvait-il vivre sans remords, se supporter tous les jours ?

La porte de la cellule s'ouvrit en un bruit sourd qu'Harry n'entendit même pas. Il ne cilla pas lorsqu'on l'agrippa par les deux bras en lui criant des choses qui lui étaient inaudibles. Il gardait son regard sur le mur, qui ne lui avait toujours pas répondu. Et ces gardes, le trainant de force à l'extérieur de la pièce confinée, qu'en pensaient-ils ? Le voyaient-ils comme un second Mason Atkins ou comme le frêle Boucle d'Or - le surnom que lui avaient donné les hommes du pénitencier ? C'était deux personnes qu'il ne voulait pas être, de toute manière. Ni une brute ni un pauvre garçon accablé sur son sort. Il était malencontreusement devenu les deux. À la fois muré et vulnérable. Une mauviette au cœur de pierre.

C'était son premier repas avec les autres prisonniers depuis l'incident. On avait changé l'horaire de repas des principaux concernés pour qu'ils ne se croisent plus. Harry mangeait maintenant trente minutes plus tard, dans la deuxième vague de détenus. Il était enchaîné. Encore plus qu'à l'habitude. Par précaution.

Sur son plateau avait été largué un pâté granuleux confondu dans un amas de patates en purée presque liquide et de bouts de carottes en dés. À la première bouchée, il manqua tout recracher, mais il était affamé. Il se contenta de grimacer avant que le banc devant lui ne grince et qu'un cabaret s'abatte sur la table.

Harry releva les yeux, s'arrêtant de mâchouiller la viande encore froide qui roulait dans sa bouche. C'était dégoûtant, mais il avait très faim.

Un homme quelque peu grassouillet ayant probablement le triple de son âge prit place en face de lui, ayant un air détaché, comme si c'était tout à fait normal qu'ils trainent ensembles tous les deux, voire habituel. Harry avait remarqué qu'on le regardait désormais d'un nouvel œil. On l'admirait de son courage pour avoir flanqué une raclé à la Barbichette. C'était le seul innocent dans cet établissement, mais aussi le plus intrépide. Quelle ironie ! Intrépide, mauviette et dur à cuire, ça alors ! Il avait un tas de caractères qui sommeillent en lui. Qui sait combien d'autres facettes de lui-même gardait-il enterrées au plus creux de sa poche ? Et à quel moment elles prendront le dessus sur lui et décideront de simultanément de surgir hors de leur cachette ? Il n'y pourra rien, il n'a déjà aucun pouvoir là-dessus. C'est la même chose pour tout le monde. Ce Mason devait lui aussi être un garçon bien ordinaire avec une bande d'amis avec qui faire des soirées cinéma ou jeux vidéo avant de devenir subitement le psychopathe qu'il est présentement. Un visage caché s'est réveillé en lui, c'est tout.

L'homme, il le reconnut immédiatement. Wilfred, c'est bien ça ? Le « contact » de Melody. Il avait les bras pendant de chaque côté de son corps et le fixait d'un air égaré. Harry fronça les sourcils et baissa les yeux sur le plateau du nouvel arrivant.

− Où est-ce que tu as eu cette soupe ? lui demanda-t-il soudainement.

Il haussa les épaules, regardant la ligne devant le comptoir de la cafétéria.

− Il ne restait plus de pâté, c'est souvent le cas.

Harry souffla un juron et s'efforça d'avaler sa bouchée fade et écœurante. Avoir su, il aurait donné plus de mal aux gardes l'ayant reconduit ici pour arriver quelques minutes plus tard.

− Qu'est-ce que tu me veux ? lança le bouclé. J'en ai fini avec vous deux.

Wilfred fit parcourir sa main à l'intérieur de son uniforme. Harry pinça les lèvres et se recula sur son siège. Le vieil homme en sortit un petit tas de feuilles pliées en quatre et les passa à Harry sous la table. Il regarda autour d'eux, s'assurant qu'on ne les observait pas.

Harry agrippa les papiers en l'imitant, cherchant à savoir ce que tout ça voulait dire. Il voulut jeter un coup d'œil au paquet de feuilles qu'on venait de lui donner, mais Wilfred lui fit brusquement signe de les ranger, lui faisant des gros yeux.

− Ne les sors qu'une fois dans ta cellule, l'avertit-il. Les instructions sont dessus. Prend soin de les apporter avec toi et de les garder précieusement.

Sur ce, Wilfred se leva avec son plateau dans les mains. Harry fit de même.

− Je ne comprends, se plaint-il. Quelles instructions ? Les apporter où ?

Wilfred regarda à nouveau autour d'eux et s'approcha d'Harry, son ventre rond touchant presque le bouclé. Sans savoir pourquoi, le pouls de ce dernier s'accéléra.

− Melody et moi... on va te sortir d'ici, chuchota-t-il.

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Ça faisait longtemps qu'il n'y avait pas eu de retours en arrière !

Dites-moi ce que vous en pensez surtout !

Cette partie n'est pas longue, je m'en excuse, mais elle était nécessaire. Je ferai de mon mieux pour poster le plus vite possible le prochain chapitre, mais je dois avouer qu'il s'est passé un tas de trucs dans ma vie ces derniers temps et je n'ai presque pas mis les doigts sur l'ordinateurs depuis deux semaines... Ne m'en voulez pas !

Angie.

Whispers of EvilWhere stories live. Discover now