CHAPITRE X - SCHOEMAKER, LE SAUVEUR DES AMES PERDUES

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Recopiant quelques informations sur Hawkins figurant dans le registre sur le petit carnet que je croyais bon d'amener partout avec moi, je réfléchissais à ce que j'allais à présent faire, ainsi livré à moi-même.

Rentrer pour le déjeuner j'imagine.

Le calepin corné disparut dans ma poche et j'attrapai mon manteau lourd d'eau puis rabattant mon chapeau sur ma tête, je sortis, empruntai les escaliers et me dirigeai vers la sortie béante de l'entrepôt.

Les ouvriers qui prenaient leur pause de midi me saluèrent quand je sortis dans l'air froid. Il ne pleuvait plus mais le ciel était toujours chargé de nuages menaçants. Autant ne pas traîner dehors.

Je m'éloignai des entrepôts pour retrouver une rue où je pourrais prendre un fiacre. Au détour d'une ruelle délabrée par l'humidité, quelqu'un se colla à mon dos et me tordit le bras dans une position, je vous assure, très douloureuse. Un couinement m'échappa. Un ricanement me répondit.

- Bah alors, monsieur Lévi Carlyle ?

- Toi.

- Oh, par pitié ! Épargne-moi tes boniments. Tu croyais faire quoi comme ça ?

- Je vais te... ! hurlai-je en me débattant.

Il me tordit un peu plus le bras et m'allongea un coup de genou dans les reins. Je tombai à genoux.

- Tu me prends vraiment pour un idiot ma parole ! continua-t-il en me relevant de force pour m'entraîner dans une autre rue étroite. Tu croyais vraiment, aristo de mes deux, que j'allais pas prendre mes précautions pour travailler là-bas ?!

Il semblait vexé plus qu'autre chose et je me détendis. Rien qu'un peu, mais il le sentit et resserra sa prise, je sursautai. Il approcha sa bouche de mon oreille.

- Tu crois que tu va-t'en tirer comme ça ? Ah !

Sur ce, il se tut, m'entraînant toujours plus loin dans l'imbroglio de rues de plus en plus infâmes. Immobilisé, je me contentai pour l'instant de le suivre sans résister, pas plus angoissé que ça. Je finirais bien par avoir une ouverture et puis... j'avais de l'argent, de quoi sortir indemne de n'importe quelle situation déplaisante.

Une demi-heure plus tard, je commençais à avoir mal partout, le bras toujours sauvagement tordu par ce taré m'empêchant de me tenir droit. Surtout qu'il s'avérait que le voleur boitait, entraînant des vagues de douleur dans mon épaule à chaque pas.

Il s'était remis à pleuvoir. Rien qu'une petite pluie mais fine et pénétrante.

J'étais de nouveau trempé et gelé. Autrement dit, de méchante humeur.

- Où m'emmenez-vous ? finis-je par demander alors que j'avais l'impression que je n'avais plus de jambes.

- Ferme-la.

Il me poussa en avant et je trébuchai. Il ricana méchamment et j'inspirai profondément.

Nous tournâmes à gauche d'une rue si sombre et étroite, si puante et crasseuse, à une autre rue, jumelle. L'odeur âcre de la défécation me fit tousser.

- Eh ! Qu'...

Ça m'avait échappé. Mon ravisseur s'était brusquement arrêté, tirant sur mon bras tordu. Sans me laisser terminer, il plaqua sa main sale sur mon visage ! Je me débattis un instant mais il me tint bon.

- T'as compris, gamin ?! tonna une voix dans la ruelle, rauque et méchante.

- Mais qu'est-ce que j'ai fait ? Aïe !

CUPIDITASWhere stories live. Discover now