CHAPITRE XXV - LES RATS ET LE FROMAGE

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- Hello, Willy.

Conscient d'avoir de grands cernes violacés, je rendu faiblement son salut au blond en finissant sur un bâillement à m'en décrocher la mâchoire.

Finalement, j'avais dormi sur la banquette d'un bar anonyme, caché dans un recoin sombre. Le patron avait fini par me remarquer et me fiche dehors aux aurores. J'avais déambulé dans les rues brumeuses du Soho jusqu'à MayFair, admirant la propreté des rues, les façades étincelante illuminées par les premiers rayons. Il n'y avait pas un chat dans les rues, seulement un homme qui déplaçait inlassablement son échelle de lampadaire en lampadaire pour éteindre les flammes tremblotantes.

- Eh ! William ?

- Mmh ? répondis-je laconiquement en relevant la tête.

- Mets ça et balance ton chapeau.

J'attrapai maladroitement la casquette molle qu'il me tendait. Grise, en tweed élimé. Je la fixai avec une répulsion mal camouflée. Je n'avais pas envie d'abandonner le dernier accessoire qui me rattachait à mon statut de gentleman.

- Bon, on a pas toute la journée...

A contrecœur, je retirai ce vieux chapeau sans forme et le tendis au blond qui le jeta aux ordures, et posai sur mes cheveux plus gras que la dinde de Noël de ma grand-mère (ce qui n'était pas mince affaire, veuillez me pardonnez, grand-mère).

Le blond qui, visiblement, avait pris la direction des opérations, sourit, satisfait et me refila un balai noir de suie. Puis avec une joie enfantine, il nous aligna tous et admira le tableau : une bande de gamins mal nourris armés d'outils hétéroclites. Ça ne semblait pas gêner le moins du monde Hawkins qui se servait de son propre balais comme d'une canne, mais Julian (qui se tenait le plus loin possible de moi) ployait sous le poids de son échelle.

- Pourquoi je dois venir avec vous ? se plaint-elle une fois de plus, renfrognée. J'ai fait mon boulot, le vieux aussi... ?

- J'y peux rien moi, c'est les ordres de Crow. On doit attaquer pour dix-huit heures, rétorqua le blond en haussant les épaules.

- J'aime pas ça, marmonna mon voisin. On a tous des dettes envers la SilentDead.

Personne ne lui prêta l'oreille.

Myriam nous ouvrit presque aussitôt. Dans un premier temps, elle fronça les sourcils, l'air vaguement embêtée, puis... elle devint aussi pale qu'un cadavre et entrouvrit la bouche, qui n'attendait qu'un cri pour s'animer. Elle semblait sur le point de défaillir.

- Mon... monsieur.... Bredouilla-t-elle en lissant son tablier, l'air ahurie.

Avant qu'elle ne puisse dire une bêtise, je lui lançai mon regard le plus autoritaire, revenu des restes de ma vie brisée. Elle se redressa vivement dans un sursaut et pris une expression lointaine.

- Monsieurs... que me vaut le plaisir ? demanda-t-elle poliment en s'inclinant très légèrement.

- Nous venons pour le ramonage. On nous a commandé d'urgence.

- Ah...

Elle hésitait, ses mains se tordaient sur sa robe. Je lui adressai un petit sourire d'encouragement et elle finit par s'effacer. Je pénétrai dans le grand hall d'entrée brillamment éclairé. Une nostalgie sans précédent s'empara de moi et je fus pris de l'envie subite de monter quatre à quatre le grand escalier jusqu'à ma chambre où je m'écroulerai sur mon lit douillet, prendrais une douche bien méritée et enfilerai des vêtements propres et bien taillés...

CUPIDITASWhere stories live. Discover now