CHAPITRE XVIII - COLLABORATION DIFFICILE... SUICIDE

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- Eeeh ! Carlyle ! Stop !

La poitrine en feu, je continue de courir. Je quittai Kensington en déboulant dans Hyde Park, désert à cette heure matinale.

Je ne m'arrêtai que quand mon cœur dansa la gigue entre mon estomac et ma gorge, à l'ombre de quelques chênes centenaires. D'abord je ralentis puis m'immobilisai avec l'impression d'avoir la tête plus légère que l'air, m'adossai à un arbre et m'efforçai de reprendre ma respiration.

- Carlyle !

Silence.

- Carlyle ! fit la voix, plus pressante.

Je me pris la tête entre les mains et versai quelques larmes. Tout mon corps tremblait, la peur me prenait à la gorge, j'étais terrifié. Non pas par ce qu'il s'était passé dans le bureau, mais par ce que je me voyais confier. Une nouvelle bouffée d'adrénaline fit battre mon cœur plus fort.

Sauver l'équilibre.

Quelques mots si dénués de sens si ce n'était pour moi, livré à de sombres personnages au grand rêve. Quelques mots du Diable, le Tentateur, le mal à l'état pur que j'avais appris à comprendre. Avec lui, j'avais trouvé une signification à la vie, l'Ordre des choses m'était enfin apparut clairement. Et il allait être brisé par le rêve trop grand de fanatiques.

Un sanglot gronda dans ma gorge.

- Carlyle...

Je sursautai, je ne l'avais pas entendue arriver. Elle courait plus vite qu'elle ne le laissait croire avec des côtes cassées.

- Car...

- Dégage.

Ses chevilles malingres restèrent bien plantées là, si longtemps qu'elle finit par s'assoir et moi par relever la tête. Elle grimaça.

- T'as vraiment une sale gueule, Carlyle.

- Je ne te permets pas.

- Je n'ai pas besoin de ta permission.

- Bien.

- Bien.

Blackhorn attrapa un brin d'herbe humide et le fit rouler entre ses doigts. Dans la lumière or de l'aube, sans sa casquette et ses mèches flamboyantes coincées derrière les oreilles, il n'était plus permis de se tromper. On m'avait toujours dit que j'avais un excellent sens de l'observation mais j'avais été bien aveugle. Julian, d'une voix trébuchante brisa le silence :

- Je...

Elle frotta son visage vigoureusement et reprit.

- Je sais que c'est difficile d'accepter...

- Tu ne sais rien, crachai-je méchamment.

- Qu'on n'est plus vivants.

- Qu'est-ce que tu racontes ?!

- Ne me dis pas que tu n'as pas compris, répliqua-t-elle, cinglante, en pointant un doigt accusateur sur moi. Ne te voile pas la face, Carlyle. Tu vois où ça vous mène, tous autant que vous êtes ! Vous vivez dans votre petit monde confortable, à boire et manger à s'en faire éclater la panse et quand les rats osent ouvrir la bouche, vous faites la sourde oreille.

- Pourquoi vous écouterait-on ?

Elle parut scandalisée mais je ne lui laissai pas le temps de répliquer, il y avait quelque chose qui me tournait dans la tête, une idée qui moulinait pour trouver matière à exister. Le résultat d'une équation particulièrement complexe qui ne pouvait aboutir qu'à quelques pistes. Pistes idiotes par ailleurs.

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