CHAPITRE XXII - LE LIVRE DU NEANT ET DU CHAOS

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L'eau se referma au-dessus de ma tête dans un claquement sec et je manquai de perdre connaissance quand le froid figea tous mes muscles. Je coulai comme une pierre.

J'avalai plus d'eau que mon corps pouvait en contenir, enchaînant les pirouettes folles. Une vieille godasse flasque me percuta et je repris mes esprits. J'agitai les bras, luttant pour garder les paupières ouvertes. Je jetai mes dernières forces dans la bataille contre le courant impétueux, tout mon être ne tendant qu'à atteindre ces flammes orange.

Elles n'étaient pas chaudes, loin de là.

Quand je parvins à y plonger ma main, j'eus peur que mes doigts tombent sous le coup de la morsure glaciale. Ils ne tombèrent pas, ils s'enflammèrent.

Les flammes s'agitèrent et se mirent à grimper le long de mon avant-bras.

Sans que j'aie le temps de fuir, ma tête, mes jambes, tout mon corps se retrouvèrent pris dans ces flammes glacées. Un bruit aigu vrilla mes tympans, perforant mon crâne aussi efficacement qu'une balle, non que j'aie testé.

Je hurlai.

Aucun son ne sortit de ma bouche, juste une profusion de bulles qui m'échappèrent en riant, me laissant sans air. Là, je paniquai.

Je voulus rejoindre la surface, si loin au-dessus de moi, mais mes pieds étaient comme collés au fond vaseux. Les murs s'élevèrent soudain. Puis le sol passa à hauteur de mon visage. Je découvris avec horreur que je m'enfonçai dans le sol.

Qui m'aspira.

Suivi d'une chute de plusieurs mètres, sans eau cette fois ci. Je m'écrasai avec un craquement peu encourageant, roulai plusieurs fois sur moi-même. Un bord tranchant me stoppa net. Cul par-dessus tête, je tentai de distinguer là où j'avais atterri malgré sang qui me coulait sur le visage. Notez bien que ce n'était pas facile, surtout qu'il y régnait un noir d'encre. Au bruit de l'écho, j'avais atterri dans une salle assez vaste avec une marche en marbre froide et bien carrée. L'eau ruisselait sur la pierre en claquant avec un bruit définitif en tombant, renvoyant mille échos.

Je finis par m'asseoir quand la pièce voulut bien arrêter de faire des loopings. Mon front m'élançait douloureusement. J'y posai ma main, la ramenai trempée de sang. Fasciné, j'observai le liquide rouge couler d'entre mes doigts pour former une minuscule flaque sur le sol.

Soudain, deux torches crépitèrent.

Désabusé, je pivotai lentement vers l'estrade. Ce n'est pas comme si c'était la première fois que deux torches crépitaient toutes seules sous mes yeux. Certes non. Je me levai.

La lumière tremblotante qu'elles dispensaient n'éclairait qu'un autel noir, autour, ce n'était que ténèbres mystérieuses. Au-delà du cercle lumineux, la salle semblaient résonner de murmures et de rires.

J'eus tout à coup l'impression dérangeante que je n'étais pas seul, que les ténèbres étaient vivantes et qu'elles étaient maîtres ici, dans cette étendue abyssale.

Méfiant, j'essuyai mon visage avec ma manche et m'avançai sur la première marche maculée de sang, puis sur la deuxième, la troisième, jusqu'à cet autel. Long d'un mètre soixante peut-être, sculpté d'inscriptions dans autant de langues que je pouvais en connaître et plus. Plaquée d'or, une phrase sortait du lot, succession de barres et de points qui m'était inconnue.

Je réalisai alors quelque chose. Ce n'était pas un autel. Trop long, trop ouvragé et cette soudure juste sous la surface. C'était un tombeau.

- Mais qui... ?

CUPIDITASWhere stories live. Discover now