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LOANA N'AVAIT jamais aimé faire les courses pour le repas de Noël. Acheter des cadeaux, ça allait. Elle savait que ça allait faire plaisir, et puis, c'était chaque année quelque chose de différent.
Mais le repas de Noël, c'était tous les ans la même chose. Et elle n'avait pas tout à fait envie de le vivre, cette année.
Ça faisait deux ans que personne ne venait l'agacer en lui demandant « quand est-ce qu'elle allait se caser », puisqu'elle était avec Zakari. Sauf que cette année, plus de Zakari.
Cette séparation n'avait rien de dramatique. Elle voulait se poser pour de bon et avoir des enfants, pas lui. Et elle respectait son choix, c'est pour ça qu'ils s'étaient séparés.
Loana soupira en arrivant au rayon des bûches glacées.
-Loana ?
Elle se retourna lentement, ayant reconnu la voix de Zakari.
-Comment tu vas ? demanda-t-il comme si ça ne faisait pas trois mois qu'ils avaient mis fin à leur relation.
-Euh...Ça va. Et toi ? renvoya-t-elle poliment--parce qu'elle n'en avait en vérité plus rien à faire--, et il rit.
-Moi je trouve que ça a pas l'air d'aller.
Elle le dévisagea silencieusement.
-Je te manque trop, c'est ça ? continua-t-il, et là, elle comprit qu'il ne tirait pas des conclusions hâtives ; il s'inventait carrément une vie.
-Écoute, j'ai réfléchi...
Mauvaise nouvelle.
-Tu sais, on s'est séparé bêtement. Je veux dire, tu veux des enfants maintenant, pas moi, est-ce une raison valable ? Je me suis dit que si tu veux, je te mets enceinte, tu accouches et tout, et tu t'occupes de ton enfant. On fait comme si c'était pas le mien, et moi je ne m'occupe pas de lui.
-Mais t'es vraiment mala--
-Hey, bébé, tout se passe bien ?
Loana mit quelques secondes à réaliser que c'est à elle que l'homme parlait, étant donné qu'elle ne le connaissait pas du tout.
-Bonjour, vous êtes qui ? C'est qui, ce mec, bébé ? continua-t-il, et là, enfin, Loana comprit qu'il était en train de la sauver de sa situation.
-C'est un vieil ami, répondit-elle en souriant à l'homme, qui tendit sa main à un Zakari choqué.
-Loana, tu sors avec Corentin Tolisso ?
-Oui, répondit-elle comme si c'était logique, et Zakari secoua la tête.
-Bah je...vais vous laisser finir vos courses. Passez un joyeux Noël.
Et il s'éclipsa. Loana soupira de soulagement.
-Merci beaucoup, comment j'peux vous remercier d'avoir fait ça pour moi ?
-Je vous en prie, haussa-t-il les épaules. J'ai pas entendu toute la conversation, mais le peu que j'ai entendu m'a suffi pour intervenir.
Elle hocha la tête.
-Mais vous inquiétez pas, j'ai besoin de rien. En fait, euh...vous faites quelque chose le 24 au soir ?
-Non, secoua-t-elle la tête. Sa famille se réunissait toujours le 25 à midi, pour échanger les cadeaux et manger ensemble.
-C'est super chelou, mais moi aussi j'ai besoin que quelqu'un prétende sortir avec moi pour rassurer ma famille, alors...
🎄
C'est comme ça que Loana se retrouva chez les parents de Corentin Tolisso le 24 au soir. À sa grande surprise, la famille de ce dernier avait réagi exactement comme la sienne lors de la rencontre avec Zakari : bon nombre de réflexion sur le fait qu'il se casait enfin. Mais elle avait été très bien accueillie, comme si ils la connaissaient depuis très longtemps, comme si elle faisait partie des leurs.
-Ça va ? demanda la voix de Corentin dans son dos, et elle se retourna, surprise. Elle était sortie prendre l'air sur le balcon afin de les laisser un peu en famille--après tout, elle était un peu une impostrice--, elle ne pensait pas qu'il la suivrait.
-Oui oui, lui assura-t-elle, et il s'approcha encore plus, la prenant dans ses bras.
-Ils nous regardent, dit Corentin, et elle hocha la tête. Tu passes une bonne soirée ?
-Ils sont vraiment super gentils. Tous. Corentin sourit.
-Ils savent reconnaître les gens bien pour moi en un regard.
Elle fronça les sourcils, et quand elle quitta l'étreinte pour lui demander ce qu'il voulait dire, elle n'eut pas le temps d'en placer une que Corentin était en train de l'embrasser. Elle l'embrassa en retour et c'est lui qui s'éloigna le premier, collant son front à celui de Loana.
-C'est bon, ils regardent plus ? demanda-t-elle avant de tourner la tête vers la porte-fenêtre...et de réaliser que personne ne les regardait. Il y avait de grands stores noirs qui empêchait les gens à l'intérieur de voir quoi que ce soit. Elle reporta son attention sur Corentin, qui avait la tête baissée. Pourquoi t'as fait ça ?
-Parce que j'en avais envie, répondit-il honnêtement, et il soupira en voyant qu'elle secouait la tête. Pardon, je sais qu'on se connaît pas, mais je...
-Je suis restée trois ans avec Zakari, et même si je ne retournerais jamais avec lui, je...j'ai besoin d'un peu de temps pour...moi.
-J'ai tout mon temps, Corentin haussa les épaules, et elle sourit.
-Dis pas ce genre de trucs que tu pourrais regretter.
-On parie ? il lui tendit sa main d'un air de défi, et elle rit.
-C'est un pari ou une promesse ?
-Vois ça comme tu veux. Ma famille t'a déjà adoptée, et moi, j'ai tout mon temps.
Peut-être que finalement, faire les courses pour le repas de Noël n'était pas si redondant que ça.
