Chapitre 15

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   Alors que tout ce beau monde avait l'air obsédé par l'idée de me toucher, Heïtan se remit à me labourer de coups. Mon corps n'était plus que douleur et je commençais vraiment à paniquer avec tous ces gens qui me collaient.

   Pourtant, malgré cela, aucune vision ne pointait le bout de son nez. Quelque chose là dedans clochait. J'essayai de mettre de côté ma répulsion et ma peur incontrôlée en prenant de grandes inspirations. La sophrologie était une pratique qui m'aidait à me calmer dans la plupart des cas. Cela ne restait malheureusement accessible qu'aux moments où j'étais assez calme pour penser à contrôler ma respiration.

   Une fois que mon mal-être fut atténué, je me concentrai sur les personnes m'encerclant. Elles étaient tout ce qu'il y a de plus matériel mais leur expressions étaient vide. C'est à ce moment là que je me rendis compte que je ne ressentais pas vraiment leur touché. Je pouvais voir leur doigts sur mon épiderme mais le contact paraissait inexistant.

   Je jetai alors un regard en direction des adultes nous encadrants et me rendis compte qu'ils m'observaient attentivement. L'une avec une attention et une curiosité malsaine, qui se révélait à travers l'étincelle de folie que je pouvais lire dans son regard. L'autre ne laissait rien paraître, comme à son habitude si ce n'est peut-être une certaine indifférence.
Ils ne semblaient pas voir ce qu'il se passait autour de moi. Normalement, vu le nombre de personnes amassées autour de moi, ils n'auraient pas pu me voir, ou, tout du moins leur vue en aurait été gênée, ce qui ne semblait pas être le cas.

   M. Sanders se pencha à l'oreille de Zélia et lui chuchota quelque chose. Il avait du voir que mon comportement avait changé puisque la seconde d'après, l'amoncellement de corps qui me collait se volatilisa et je fus à nouveau libre de tout mouvement. Enfin, c'était sans compter Heïtan qui décida de me porter le coup fatal. Il empoigna ma masse de cheveux tout en remontant son genou à une vitesse fulgurante, ce qui mena inévitablement à la rencontre fortuite de mon visage et de son genou. Je basculai en arrière en ayant l'impression que mon nez s'était décroché de mon visage et que mes incisives avaient quittés mes gencives. Je sentis un liquide chaud et poisseux couler sur mon visage et dans ma bouche. J'eus la mauvaise idée d'essayer de respirer par mes voies nasales, je me retrouvai donc à inspirer mon propre sang. Une quinte de toux me prit à la gorge, m'obligeant a me relever en position assise. Je portai la main à mon nez pour essayer de stopper l'écoulement de mon liquide vital. Bien entendu cela n'eut pas l'effet escompté puisque au contact de ma paume de main, un éclair de douleur traversa tout mon nez.

   Bientôt, mes mains furent tâchées d'écarlate et la souffrance atteignit un point fulgurant. Je n'avais même pas l'énergie de pleurer tellement j'étais obnubilée par la zone blessée de mon visage. Plus rien n'était cohérent dans ma tête et mes pensées éparpillées ne laissaient la place qu'au mal qui me rongeait.

   Lorsqu'enfin quelqu'un se décida à m'amener à l'infirmerie je n'en eu pas tout à fait conscience, ni même lorsqu'on m'appliqua une poche de glace sur le nez. Quand la douleur se fut calmée et que j'avais repris mes esprits, j'analysai mon environnement d'un regard encore hagard et repérai la soigneuse de l'autre fois. Comment s'appelait-t-elle encore? Laura? Laure? J'étais persuadée que c'était quelque chose dans ces eaux là. Elle dut  lire la confusion sur mon visage puisqu'elle entreprit de me rappeler certaines informations.

"Je suis Elora, la soigneuse de la dernière fois, tu te souviens? Tu t'es prise un gros coup dans le nez et tu étais plus ou moins dans les vapes jusqu'à maintenant, tu te sens comment ? "

   Je ne pouvais pas vraiment dire que je me sentais mieux car mon nez me faisait affreusement souffrir et je me sentais nauséeuse. Heureusement, je pouvais encore réfléchir correctement contrairement à quelques instants plus tôt. Je répondis de manière platonique que ça allait. L'infirmière m'informa que j'avais eu de la chance puisque mon os ne s'était pas déplacé. Moi je pense que j'aurais eu encore plus de chance si ce taré d'Heïtan n'avait pas essayé de m'exterminer! En même temps c'est moi qui avais choisi de me mettre dans ce bourbier toute seule. La soigneuse me fit ingérer des plantes qui eurent un effet radical. En moins d'une minute je me trouvais en train de ronfler sur le coussin de mon lit de repos. Je roupillai une petite heure et me réveillai en douceur. La souffrance émanant de mon nez avait reflué pour ne laisser qu'une désagréable impression de ne plus pouvoir respirer par le nez, un peu comme s'il était bouché.   

EnchanteresseWhere stories live. Discover now