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musique à écouter : no right to love you (Rhys Lewis)

"Cause I have no right to love you
When I chose to walk away
I have no right to miss you
When I didn't wanna stay
And I have no right to need you
And I knew what my heart was gonna lose"

Olivia

-          Envoyer ? Ne pas envoyer ?

Voilà que je me parle à moi-même maintenant.

Je suis allongée sur le ventre sur mon lit, un coussin sous le menton. Mon téléphone au bout de mes bras tendus. Je me bats avec mes pensées.

Parler, comprendre, savoir. C'est tout ce que je demande. Après tout ce temps, je suis prête.

Cela doit bien faire une vingtaine de minutes que j'hésite. Je fixe l'écran de mon téléphone comme s'il allait mystérieusement choisir à ma place. Avant de prendre ma décision, mon pouce vient remonter de plus en plus haut dans la conversation.

C'est dingue à quel point certains de ces messages ont le pouvoir de me faire sourire bêtement. Me remémorant ainsi les bons moments, aussi minimes furent-ils.

Et malheureusement, il y a les autres. Des messages d'incompréhension de mon côté, des réponses vagues et agressives du siens.

Pour rien au monde, je ne voudrais revenir à cette période.

Tu te voiles la face. Vas-y, envoies.

Ma voix intérieure me fait lever les yeux au ciel. Je m'arrête un instant sur mon calendrier et remarque que la date entourée en rouge se rapproche, plus qu'une semaine. Un sourire malicieux s'installe sur mon visage.

Mon anniversaire.

Appuyer sur la touche Envoyer s'avère alors être plus fort que moi. Mon message est parti et il n'y a pas de retour en arrière possible. Je sais que rien de tout ça ne pourra bien finir, mais je ne peux pas résister à cette sensation.

Garett

De Olivia
J'ai besoin de te voir.

Mon cœur manque un battement à la lecture de ce message, empêcher mes lèvres d'afficher un sourire satisfait est impossible.

Sans même attendre, je lui réponds que je suis en chemin.

J'attrape instinctivement ma guitare au passage, c'est ce qui est surprenant justement. Ça fait un an que je n'y ai pas touché. L'effet qu'a cette once d'espoir sur moi est étrange, j'ai presque l'impression de me retrouver. À tel point que je ne pense même pas à prendre quoi que ce soit avant de partir, même pas un joint pour faire la route.

Je peux bien m'en passer le temps d'un instant, non ?

En arrivant devant chez elle, je me questionne. Est-ce vraiment une bonne idée que je sois ici ?

Après tout, je suis venu sans savoir pourquoi elle voulait me voir. Si ça se trouve elle veut juste me faire comprendre encore une fois que je suis le pire des connards.

Je sens ma main hésitante lorsque je la lève pour frapper à la porte. Mais je n'en ai pas le temps. Cette dernière s'ouvre sur Olivia. Elle a dû me voir arriver.

Ma magnifique Olivia.

:::

La chambre d'Olivia n'a pas changé. En entrant mon regard est attiré par un cadre photo, où je découvre une photo d'elle avec mon frère. Je ne peux pas m'empêcher de lever les yeux au ciel, un léger soupir s'échappe de mes lèvres. Sur toutes les personnes de l'univers, il fallait que son meilleur ami soit mon propre frangin.

Mais sans lui, tu ne l'aurais jamais connu, alors...

-          Tu as racheté une guitare, c'est bien. Je me souviens encore quand tu as fracassé la derni...

-          J'ai écrit une chanson dernièrement.

Je lui coupe la parole. Loin de moi l'envie de me remémorer ce moment. Et comme si elle lisait dans mes pensées, elle acquiesce.

Mes doigts viennent gratter les cordes de ma guitare, et pour la première fois depuis si longtemps, les paroles sortent de ma bouche :

'Cause I have no right to love you
When I chose to walk away
I have no right to miss you
When I didn't wanna stay
And I have no right to need you
And I knew what my heart was gonna lose
I have no right to love you
But I do
I still do
I still do

Je n'arrive pas à déchiffrer son regard sur moi. Sa main se pose sur mon bras. Et tout d'un coup, mes pensées se mélangent dans ma tête. J'ai soudainement très chaud, de la sueur a commencée à se former sur mon front. Je sens mes mains tremblantes sur ma guitare. Je n'arrive plus à penser, comme si j'étais paralysé.

- Si je t'ai demandé de venir, Garett, c'est parce que j'aimerais que l'on puisse discuter de ce qu'il s'est passé entre nous. Et je voulais aussi te dire que j'organise une soirée la semaine prochaine, je... J'espère t'y voir, peut-être...

Les paroles qui sortent de la bouche d'Olivia sont incompréhensibles, rien n'a de sens à mon oreille. Je suis en manque. Seule cette idée m'obsède.

-          Je ne peux pas, O. Je dois rentrer.

-          Tu sais quoi Garett, je ne suis même pas surprise. C'est ça rentre chez toi, redeviens cet homme que je ne reconnais pas, cet homme contre qui je suis en colère, cet homme que je déteste par-dessus tout. Après tout, c'est moi l'idiote dans cette histoire, je m'évertue à aimer quelqu'un qui... qui...

Je sens l'amertume dans sa voix. Elle est déçue. Mais malgré cela, je ne retiens qu'une partie de sa phrase.

-          Alors tu m'aimes toujours ?

Ses yeux deviennent humides et je ressens toute sa douleur. Et lorsqu'elle parle, c'est comme si elle était brisée, à cause de moi.

-          Je ne sais rien faire d'autre que ça. T'aimer. Même quand mon cœur vole en un million d'éclats à chaque fois que tu me blesses. Car toi, le nouveau toi je veux dire, il ne sait rien faire d'autre que ça. Je t'aime, mais c'est toi qui n'as pas le droit de m'aimer, comme le dit ta stupide chanson, tout est de ta faute. Tu es celui qui a tout détruit. C'est toi qui à choisi pour nous deux.

Elle se rapproche de moi, une larme se met à perler sur sa joue, je l'essuie avec mon pouce. Olivia est face à moi, vulnérable. Et je me maudis d'être dans un tel état, un véritable déchet. Elle se hisse sur la pointe des pieds et dépose un baiser sur mes lèvres, je me sens tellement mal que je ne sens même pas sa bouche sur la mienne. Si je reste encore une minute de plus, je vais craquer. Et je refuse de lui faire du mal physiquement juste parce que je suis incapable de me gérer. Alors je parviens à dire quelque chose, mais cela ne m'excuse en rien.

-          Je suis désolé.

Contre ses lèvres, mes mots sont presque inaudibles. J'enfile ma veste, récupère ma guitare. Je lance un dernier regard vers elle, son corps est recroquevillé près de son lit et elle fait tout pour étouffer ses sanglots. Et je la laisse seule dans cette grande maison.

Rien ne pourra être comme avant. Je suis pourri de l'intérieur maintenant.

Mais je sais très bien qu'il m'est impossible de rester loin d'elle.

sans ténèbres, les étoiles ne brillent pas (français)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant