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musique à écouter : au bord du temps (Lindolfo Gargiulo)

Cassi

« Ne fais pas de bruit... »

« N'essaye pas de crier... »

Je sens ses mains calleuses sur mon corps qui était pourtant vêtu, il y a quelques instants. Il s'est glissé dans mon lit tel un prédateur piège sa proie. Ce n'est pas la première fois. Personne ne m'avait jamais touché là où lui le fait, et je n'aime pas ces sensations que je ressens.

À cet instant, je voudrais partir, devenir un oiseau libre, rejoindre les étoiles. Je voudrais que tout ceci ne me soit jamais arrivé. Je sens son souffle dans mon cou, une larme coule le long de ma joue.

« Te débattre ne sert à rien... »

« Tu es à moi... »

« Tu le sais. »

Je m'assieds brusquement dans mon lit, me réveillant en sursaut. Ma respiration est forte et j'ai très chaud. Il me faut du temps pour me rendre compte de l'endroit où je me trouve. Je ne crains rien ici, je suis en sécurité.

« Tu le sais. »

Sa voix résonne dans ma tête. C'est trop pour moi, je fonds en larmes.

Cela faisait des mois que je n'avais plus fais de cauchemars. Je repense à la façon dont Garett m'a observé et ça me dégoûte encore plus. Ce regard qui insinuait que je n'étais seulement qu'une chose, un objet, et certainement pas une personne à part entière. Le voir me regarder ainsi a fait ressurgir mes démons...

Maintenant, je n'ai plus aucune envie de dormir. Je ne veux pas que ces mauvais rêves reviennent me hanter chaque nuit, mais si cela devient finalement le cas, je vais devoir accueillir à bras ouverts mes vieilles amies les insomnies.

J'essaye un maximum d'étouffer mes sanglots, je ne veux pas réveiller Hope ou Linda et je veux encore moins qu'elles s'inquiètent pour moi. Je peux gérer ça toute seule.

Mon regard est attiré par la poignée de porte qui semble tournée, et même si je sais que je ne suis plus en plein cauchemar, je suis effrayée.

La porte s'ouvre légèrement, puis se referme après que quelqu'un se soit introduit dans la pièce.

- Tu pleures.

Cette affirmation est douce et pleine de compassion, tout comme la voix qui vient de prononcer ces mots, même si je sens tout de même de l'agacement dans le ton utilisé.

Mes yeux s'écarquillent quand je me rends compte de qui il s'agit.

- Hunter ?

Une question inutile, je connais déjà la réponse puisqu'il est là. Dans ma chambre, la même pièce où je me trouve. Je me sens un peu honteuse lorsque je me souviens m'être mise en soutien-gorge devant lui, et le rouge me monte aux joues, mais la pénombre fait que ça ne se voit pas. Tout comme il ne peut pas voir mes yeux gonflés à cause de mes pleurs. Je dois avoir une tête affreuse.

- Qui d'autre ça pourrait être à 3h du matin ?!

Il rit. Et c'est un rire sincère, il ne cache aucun sarcasme.

- Tu pleures, tu veux me dire pourquoi ?

Et maintenant, c'est à mon tour de rire.

- Tu es un vrai con, tu veux me dire pourquoi ?

Je suis fière de moi pour cette réplique, je pense que je n'aurais pas pu dire mieux. Mais je suis surprise lorsque je le vois avancé pour s'asseoir sur le lit afin de pouvoir me regarder dans les yeux.

- Aïe ! Je pense que je le mérite.

Instinctivement, mes yeux viennent s'ancrer dans les siens. Et sans même y penser, je dis :

- C'était un cauchemar. C'est pour ça que je pleure.

Son regard s'assombrit, mais je n'arrive pas à décrire ce qu'il s'y passe. De l'inquiétude ? De la crainte ?

- Est-ce... Est-ce que c'est à cause de moi ?

Sa main s'approche de mon bras marqué, et comme s'il avait peur de me briser, il a un mouvement de recul avant même de m'effleurer. J'aperçois sur ses propres bras, des tatouages que je n'avais pourtant pas remarqué (mon esprit était sûrement trop préoccupé), mais il fait trop sombre, et je n'arrive pas à distinguer ce qu'ils représentent. Sa voix est presque imperceptible, il semble avoir peur de prononcer ces mots, et peur de ma réponse ? Alors je comprends ce qui vient de passer dans ses yeux. De la culpabilité.

À chaque fois que je le vois, j'ai l'impression de rencontrer un Hunter différent. Et celui de cette nuit, paraît presque... Gentil.

- Non, ça... ça n'a rien à voir. Ce n'est pas ta faute. Ça m'arrive de temps à autre, c'est tout.

Il semble m'observer avec attention, comme s'il essayait de percevoir chaque détail.

- Et puis, si je suis un con, c'est que je suis comme ça, c'est tout.

Je souris pour le remercier du changement de sujet. À cet instant, je remarque même que c'est bien la première fois qu'il ne sent pas l'alcool, ce qui me surprend davantage. Son odeur est à la fois boisée et mentholée.

- Si je peux me permettre de te dire quelque chose. Les cauchemars ne sont pas la réalité. Ça se passe dans ton esprit, et tu peux être maître de tout cela. Ça ne peut pas te blesser, tu es plus puissante que ça. Après tout, c'est ta tête. Tu m'as l'air d'être une personne forte, alors ne laisse pas la peur tout détruire.

Est-ce que c'est réellement le même Hunter ? Je suis totalement déboussolée face à toutes ses facettes aussi différentes les unes que les autres.

- Tu ne te souviens pas ? Je n'ai pas peur.

Ma voix est pleine d'assurance, et je souris à l'idée qu'il sache à quoi je fais allusion. Puis un magnifique sourire illumine son visage avant qu'il ajoute :

- Aaah, oui, c'est vrai. Ça me revient. Et bien, si c'est le cas, tu devrais essayer de te rendormir à présent.

Ce côté bienveillant me surprend de nouveau.

Il se lève de mon lit et se dirige vers la porte. Je l'observe sans un mot. Et au moment où il ouvre la porte, ma voix sort sans que je ne m'en rende compte, détruisant ainsi le silence qui s'était installé.

- Est-ce que... Est-ce que tu veux bien rester ? Le... Le temps que je m'endorme ? S'il te plaît.

Je demande, mais je sens ma voix presque supplier. Je n'ai pas envie de me retrouver seule. Sans répondre, il referme la porte, puis se dirige vers le fauteuil installé près de la fenêtre. Il s'assied de sorte à pouvoir me voir, avant d'ajouter :

- Je reste, alors endors-toi, Cassiopée.

sans ténèbres, les étoiles ne brillent pas (français)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant