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musique à écouter : i'm lonely (Luz)

"Another day, another welcome mat
A door engraved with twenty-eight, I won't remember that
These corridors, they never lead to anywhere"

Cassi

J'ai toujours eu horreur des déménagements. Devoir mettre toutes ses affaires dans des boites. Vider les pièces dans lesquelles on a des souvenirs. Seulement, c'est tout ce que je connais, depuis trois ans. En l'espace de ces trois années, j'ai connu sept déménagements, dans sept États différents, dans sept familles différentes. C'est pourquoi, je ne prends même plus la peine de prendre toutes mes affaires. Seulement ce dont j'ai besoin, des vêtements, quelques livres, et mes photos avec mes parents.

De toute façon, quand on est dans le système, c'est dur d'en sortir. Les familles d'accueil ne peuvent pas garder les enfants éternellement, et les adolescents encore moins, c'est trop « compliqué ». Nous avons beaucoup moins de chance de nous faire adopter, il ne faut même pas parler de chance, puisqu'elles sont nulles.

J'ai arrêté d'espérer retrouver une famille après la troisième qui m'a accueilli. Donc une de plus ou une de moins, je serais majeur dans un an. Alors, je ne pense plus à ma potentielle adoption au sein d'une famille aimante.

Je suis actuellement en route pour la huitième. Je passe du Kentucky à Tallahassee en Floride. Parfois, j'ai juste l'impression d'être une marchandise transportée d'un bout à l'autre du pays. Cependant, c'est la première fois que je me rends dans un État où j'ai déjà vécu. Deux mois, certes, mais j'avais aimé la Floride. Je pourrais peut-être rendre visite à la famille qui m'avait accueilli trois ans plus tôt. Ils ne m'ont pas gardé, mais je comprends pourquoi. Ils avaient déjà quatre enfants, et Jodie, la mère, attendait son cinquième. J'ai apprécié passer ce peu de temps avec eux. Ils étaient gentils.

- Je suis sûr, cette fois, c'est la bonne ! S'exclame Todd au volant de sa Ford.

Todd est mon accompagnateur, il se charge de la section des orphelins. C'est toujours lui qui nous conduit au sein de nos familles d'accueil. Même s'il doit traverser des centaines de kilomètres, il tient à le faire. Il n'est pas très grand, un peu rondouillet et il semble perdre davantage de ses cheveux à chaque fois que je le vois. C'est aussi l'une des personnes les plus optimistes que je connaisse.

Son ton enjoué me fait sortir de mes pensées. Je lui rends son sourire, j'aimerais le croire. Vraiment. Mais je me sens plus comme une cause perdue qu'autre chose.

Presque instantanément mon regard se perd de nouveau à travers la vitre. Le ciel se teinte peu à peu de jaune, rouge et orange, et bientôt, il laissera part au plus beau des spectacles. Les étoiles. La passion que mes parents m'ont transmise. Il n'y a rien de mieux que de s'allonger dans l'herbe en plein été et contempler la voûte céleste.

J'ai dû m'assoupir quelques instants, puisque lorsque j'ouvre de nouveau les yeux, la nuit commence à tomber, et la voiture semble ralentir. C'est alors que je comprends que nous sommes arrivés.

- Tu es prête ? Me demande Todd en enclenchant le frein à main.

- Comme quelqu'un qui va découvrir sa huitième famille d'accueil. Dis-je d'un ton ironique, en lui souriant.

A l'extérieur, je découvre une belle maison aux volets bleus. Il y a beaucoup de fleurs dans le jardin, c'est superbe. Et, d'ici, je peux presque voir une balançoire et un trampoline. Je remarque qu'il y a de la lumière à presque toutes les fenêtres, je trouve cela chaleureux. Dans l'allée du garage, je distingue une moto qui me rappelle celle qu'avait mon père, et un vélo jaune pâle allongé sur le côté. Quelqu'un devait être pressé de rentrer. Pensais-je avec un sourire nostalgique.
En tournant la tête, je découvris sur la boîte aux lettres le nom des personnes qui allaient à présent partager ma vie : BLAKE.

sans ténèbres, les étoiles ne brillent pas (français)Where stories live. Discover now