Chapitre 16

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- Voilà le dernier plateau...

Marianne est en train d'accrocher un truc en plastique qui de loin ressemble vaguement à une branche de gui.

- Et ce soir ! J'aurais mon baiser !

Elle redescend en contemplant son œuvre qui, il faut dire, n'est pas si mal.

Tout est prêt et nous rejoignons nos chambres. Je frappe pourtant à la mienne, mais aucune réponse, tiens, mon compagnon de cellule n'est pas là.

Je rentre et découvre effectivement une pièce vide, mais cela ne m'étonne pas, il est rarement présent en journée, préférant retourner dans sa chambre attitrée. Je m'avance vers le miroir et ouvre le placard, c'est à cet instant que mes yeux tombent sur la robe noire qu'il m'avait offerte, c'est bien l'occasion de la porter. Elle me va comme un gant et je me trouve plutôt jolie avec, il a clairement bon gout. J'inspecte la trousse de maquillage et fais tout pour oublier que nous sommes abandonnés de toute civilisation.

Quelques touches de mascaras plus tard, je me contemple et tourne sur moi-même pour en apprécier le résultat. C'est alors que j'entends la musique au loin... J'enfile une paire d'escarpins noirs et m'apprête à sortir quand on frappe à la porte. Je m'avance timidement et l'ouvre sur un costume qui m'impressionne. Je recule un peu pour l'estimer, il est presque méconnaissable, ses vêtements l'ont transformé, et le rendent particulièrement séduisant. Mais lorsque je glisse lentement jusqu'à son visage, il semble troublé. Je ne me l'explique pas et pourtant il ne dit rien, je me noie dans ses iris vert clair tout en détaillant chaque trait fin qui marque son teint mat. Confuse tout à coup, virant au rouge carmin, j'ose un faible mot.

- Naël...

Aucun son ne filtre entre ses lèvres indécemment sensuelles ce soir. Aussi je baisse les yeux, car j'ai beaucoup de mal à garder mon sang froid, et de petits picotements s'isolent sous mon épiderme.

- Déborah... tu es... éblouissante. Tu permets ?

Alors je me redresse pour suivre sa main qui se rapproche de ma poitrine en tenant une rose rouge. Il l'accroche à ma robe avec délicatesse puis me tend son bras pour me conduire jusqu'à la fête qui bat son plein.

Nous arrivons tous les deux dans la pièce où il y a déjà tout le monde : Marc, Luca, Alex, Doc, Marianne, Belinda et Sara... Mais lorsque Naël est à portée de vu, toutes les filles sauf Alex, qui les regarde en lançant ses yeux vers le ciel, se précipitent pour l'accueillir. Elles lui sautent littéralement au cou. Je suis donc tout bonnement séparée de lui, je m'éloigne en l'entendant rire avec elles. Devant la table bien fournie, je saisis un verre de champagne.

- Pfff, elles sont complètement hystériques... c'est à celle qui l'aura la première dans son pieu.

J'avale une gorgée pour essayer de libérer la boule qui bloque le passage.

- Tu as raison Alex...

- Et toi, tu ne dis rien ?

- Pourquoi ? Tu voudrais que je lui saute au cou moi aussi ?

- Je ne sais pas, je pensais que tu pouvais tenir à lui.

- N'importe quoi !

- Vous êtes deux bons amis ?

- Oui, il n'y a rien entre nous. Je te rappelle que mon fiancé a été assassiné il n'y a pas un mois !

- Alors tant mieux, car je crois que ce soir, les filles se sont donné le mot. Elles ne vont pas le lâcher d'une semelle avant qu'il ne choisisse l'une d'entre elles.

Je crispe mes doigts sur ma coupe et le regarde en train de se faire complètement alpaguer. Il parait gêné quand elles s'accrochent à son bras pour ne plus effectivement le lâcher. Je tourne les talons vers Marc qui discute avec Luca et Doc, mais n'ose pas pour autant intervenir. C'est alors que la musique devient plus forte, Alex a décidé visiblement de réveiller toute la prison. Les filles gloussent et entrainent de force Naël sur une piste improvisée. Je remarque à quel point elles sont sur leur 31, c'est le cas de le dire, Belinda particulièrement, qui avec sa chevelure d'or semble être sortie d'une gravure de mode. Je finis ma coupe et m'en sers une autre quand une main se tend vers moi.

- M'accorderais-tu cette danse ?

C'est Luca, il parait timide tout à coup, aussi je lui souris et lui fais une petite révérence.

- Oui, avec joie.

Nous entamons des pas de danse plutôt rythmés et je commence à me détendre. Nous sommes en sécurité, la fête est digne d'un Nouvel An comme les autres et tout le monde prend du plaisir.

Les heures défilent, je ne compte plus les coupes de champagne et n'arrête pas de rire aux bêtises de Luca ou de Marc. Doc, seul, parait bien plus sérieux que nous tous et semble de temps à autre piquer du nez sur sa chaise.

Je ne suis pas bien fière finalement de finir ce chat perché à moitié ivre. En temps normal je crois que j'aurais eu plus tenue, mais qu'importe, vu la conjoncture, il vaut mieux prendre du plaisir là où il est, et clairement je m'amuse comme une petite folle.

Puis quelqu'un tape sur un verre et demande le silence, c'est Belinda.

- Attention, il est bientôt minuit et je propose une chose ! Nous ne comptons pas commencer l'année sans un baiser masculin langoureux, donc messieurs, mettez-vous sous ce magnifique gui !

Ils s'exécutent, visiblement, trop saouls pour rechigner. Marc, Luca, Doc et Naël sont côte à côte et attende la suite du jeu avec beaucoup de discipline.

- Bien ! Et maintenant, chaque fille va choisir son cavalier de bisou !

On entend déjà des Naël, il fallait s'en douter.

- Comme il y a moins de garçons que de filles, il y a la possibilité de choisir le même garçon ! Alors, moi je choisis Naël !

Marianne et Sara sans surprise disent la même chose, puis Alex s'avance lentement vers Marc et lui saisit le bras. Il ne reste plus que moi. Je vois Doc qui semble plus que blasé par cette situation, je sens bien qu'il n'a nullement envie de se faire désigner, sauf que Luca, lui, affiche une telle mine contrite que je ne peux m'empêcher d'avoir de la peine pour lui. Je lance un regard à Naël qui parait attendre mon choix, même s'il a un bras autour du cou de Belinda. Aussi, je lève mon nez et me déplace vers Luca en ne le quittant pas des yeux. Le sourire qu'il me rend est empli de reconnaissance tout à coup.

- 5... 4... 3... 2... 1...

Un « bonne année » est chanté en cœur, alors que Belinda tire Naël pour se jeter sur sa bouche sans complexes. Je contemple la scène comme si je venais de prendre un coup dans le ventre, ça me fait mal, c'est évident, mais j'entends doucement :

- Bonne année, Déb.

Avec beaucoup de délicatesse, Luca me saisit le visage et m'amène à lui. À peine ses lèvres sont-elles sur les miennes qu'il me colle plus encore. Je ne sais pas ce qui se déroule en moi, je me laisse faire, j'oublie où je suis et avec qui j'échange ce baiser qui finalement devient plus langoureux que prévu. Peut-être au fond, ai-je juste besoin de passer à autre chose, alors je plaque mes mains sur sa nuque et l'embrasse plus intimement avant de reprendre doucement conscience de ce que je fais. Aussi je me détache, comprenant pourtant que Luca ne comptait pas en rester là.

- Bonne année Luca.

Puis je le laisse dans cette position les joues rosies par un désir naissant. Il parait presque sonné, mais je le quitte pour aller faire la bise à tous les autres. Lorsque j'arrive à Alex, elle me regarde en biais, comme si elle voulait que je raconte un petit secret bien gardé, mais je fais mine de ne pas le remarquer. Doc est presque expéditif, et visiblement compte déjà aller se coucher. Marc est enjoué comme jamais, et quand je me détourne en bouffant de rire un corps me bloque le passage et je déchante d'un coup.

- Bonne année Déb !

Son ton était froid et acéré.

- Bonne année Naël !

Je ne vois pas pourquoi je ne lui répondrais pas sur le même ton ! Alors il me prend par mes épaules et me fait deux bises plutôt rapides sur les deux joues puis retourne vers le buffet où Belinda, cillant ostensiblement, lui tend une autre coupe de champagne.

Fait chier ! 

MB MORGANE - Pari(s) Z [Terminé]Where stories live. Discover now