Chapitre 31

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Je suis assise à même le sol et mon sang recouvre le carrelage blanc de la pharmacie, j'ai des flashs dans les yeux. Mon cœur est maintenant trop rapide et manque régulièrement des battements. Douze est en train de vider les placards, il cherche à l'évidence de quoi arrêter l'hémorragie. Je vais finir par me sentir mal.

- Déb ? Parle-moi !

- Va te faire foutre...

Il sourit.

- Bien continue.

Il s'accroupit et retire mon pull pour regarder la plaie qui saigne toujours abondamment. Mon corps me brule, je crispe mes mains. Il y a des coups contre la baie vitrée et contre la porte, les crieurs sont attirés par le sang et veulent défoncer la devanture. J'ai les yeux mis clos et je tente de parler :

- Ils vont rentrer, on va mourir...

- Non, c'est bon, j'ai tout sécurisé ! Je commence à avoir l'habitude.

Il arrache des morceaux de gaze, il est terriblement rapide.

- La balle est ressortie, mais tu perds pas mal de sang.

- Je vais mourir alors comme Marc...

- Non, pas encore, et arrête de dire ça sans cesse, c'est pénible.

Il appuie avec force sur le trou et je réagis en lâchant un son grave et en toussant, puis il m'aide à boire un verre d'eau.

- C'est toi qui es pénible, douze...

- Mouais, sans doute. Prends ça !

J'avale des cachets blancs et il commence à refermer les deux plaies en débutant par mon dos. Je ne ressens pas l'aiguille, étant trop dans le coaltar. Les minutes passent et je me trouve étrangement mieux, je n'ai plus mal, je serais même dans une sorte de nuage cotonneux tout brillant. Il s'affaire maintenant à recoudre ma peau de l'autre côté. Je glisse un peu vers le sol, mais il me rattrape.

- Hey ! Ne tombe pas dans les pommes.

- T'inquiètes douze, je tombe pas dans les pommes... je suis hyper bien... je ne me suis jamais sentie aussi bien d'ailleurs.

Je crois que je parle comme si j'avais pris la plus grosse cuite de toute ma vie. Il s'en amuse.

- J'ai peut-être forcé la dose sur les tranquillisants, tu vas planer...

- Planer, mouais, ça me va. Planer dans les nuages, voler comme un putain de pigeon...

Il bouffe de rire.

- Ha ouais quand même... Faudra que j'essaye à l'occasion, ça a l'air sympa.

- Toi t'as pas la gueule d'un junkie... Ton machin, c'est peut-être pas mal pour Alex, elle aime bien l'herbe et comme elle va avoir un bébé zombie, ça sera plus cool pour elle...

Mes yeux ont du mal à faire le point.

- Si tu le dis.

Mais je revois par intermittence les images du mur et je saisis des deux mains le pull de douze.

- Naël ! Marc ! Mais c'est horrible... Marc est mort... C'est horrible, comment elle va faire sans lui.

- Ne bouge pas, j'ai pas fini.

- Marc... le pauvre Marc... et toi arrête avec tes ordres. Tu es un emmerdeur... Au fait, c'est quoi ton prénom douze ? Tu as bien un prénom ?

- Oui, j'ai un prénom.

Mais il ne répond pas tout de suite au lieu de ça, il coupe le dernier fil avant de m'entourer fermement de bandes. J'ouvre la bouche comme une demeurée et l'observe de plus près. Il est particulièrement mignon, je remarque ses traits fins, son corps d'athlète et ses lèvres très sensuelles. Je me penche pour regarder ses fesses sans retenue et siffle à ce que je vois.

- Je suis sure que tu es un mec à nana, tu es sexy.

- Oui donc tu ne planes pas, tu es sur orbite...

- Ben non, je dis la vérité. Tu sais, je suis une fille qui dit toujours la vérité. Tu es sexy, mais vachement chiant...

- C'est bien, je suis ravi de l'apprendre.

- Ton prénom c'est quoi ? Tu as peur de me dire parce qu'il est moche ?

Je suis complètement stone, je n'entends presque plus les crieurs qui se ruent constamment sur les vitrines. En fait, à l'heure actuelle, je m'en fous totalement, je me sens tellement bien. J'éclate de rire quand je le vois se lever pour aller prendre des barres protéinées.

- Ouais tu es un coquin, tu fais gaffe à ce que tu manges comme une gonzesse qui fait un régime... C'est pour ça que t'es beau gosse. Hein ? Avoue... Ton truc c'est la muscu. Est-ce que tu te passes de l'huile après ? Parce que si c'est le cas, je veux bien t'aider...

Il s'accroupit et en ouvre une pour me le mettre dans la bouche.

- Mange, tu diras moins de conneries.

Je m'étouffe à moitié et je peste d'autant plus.

- Fais chier ! J'ai pas faim !

- Si, il le faut !

J'essaye de le repousser avec ma main, mais elle est faible.

- Douze, je suis certaine que tu t'appelles Gontran !

Il souffle.

- Non, je ne m'appelle pas Gontran.

- Haaaaaa, ou alors, tu t'appelles Hector comme le chien de Naël...

Il se vexe d'un coup et finit par lâcher dans une demi-colère.

- Franck ! Je m'appelle Franck comme ton ex !

À ce simple mot, je divague complètement et je me mets à pleurer. Je le vois devant moi, il est vivant et tout remonte en bloc.

- Franck, tu es revenu, ne m'abandonnes pas. Tu m'as tellement manqué...

- Non, attends.

- Comme tu es gentil, tu es là avec moi. Je ne t'ai jamais dit tout ce que je ressentais pour toi...

- Tu me prends pour lui, mais regarde-moi ! Je ne suis pas lui...

- Si tu savais comme je t'ai aimé, mais je ne te l'ai pas dit. J'ai besoin de toi maintenant tout de suite...

Et je commence à vouloir retirer mon soutien-gorge, mais il m'en empêche avec fermeté.

- Arrête ça, c'est franchement pas une bonne idée et...

Mais il n'arrive pas à finir sa phrase que j'ai déjà posé mes lèvres sur les siennes et demande qu'il me rende mon baiser. Je ne sais pas combien de temps cela a duré, mais à l'évidence, je me suis endormie en l'embrassant.

MB MORGANE - Pari(s) Z [Terminé]Where stories live. Discover now