8/ Sanction injustifiée

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Allegra, toujours pleine d'espoir et inconsciente de la situation dans laquelle elle se trouve réellement, arrive à être étonnée par la convocation de M. Fukushima dans son bureau, vitré, il va sans dire. Jamais, en tant que responsable, il ne se serait permis de rencontrer une jeune femme seule dans un bureau fermé.

— Miss Muller veuillez-vous asseoir, dit-il dans un français impeccable malgré le léger accent qui lui fait mouiller les « r ».

Oui, parce que Fushukima ne lui parle qu'en français. Il refuse depuis le début de lui reconnaître la moindre notion de japonais correct – alors qu'Allegra est parfaitement habilitée à le traduire et le parler - et prétend qu'il ne comprend rien quand elle parle sa langue. Il refuse donc de l'utiliser avec elle, comme si ça avait pu la profaner de le faire. Fushukima n'est pas seulement un type désagréable, il est aussi assez mesquin.

— M. Fushukima.

— J'imagine que vous savez pourquoi vous êtes là.

— Heu... Non...

— Vous avez encore eu un comportement déplacé. Un de trop.

— Un comportement déplacé, M. Fushukima ?

— Je me vois contraint d'écourter votre séjour parmi nous. J'ai déjà fait un rapport à la direction générale. Vous pouvez d'ores et déjà prendre un billet retour pour...

Allegra est stupéfaite, mais n'entend pas se laisser marcher sur les pieds par ce petit bureaucrate stupide ! Elle s'est relevée comme si une punaise s'était trouvée sur sa chaise.

— Pardon, Monsieur ! Mais en quoi mes vêtements relèvent-ils d'un comportement déplacé ?

— Vos vêtements ? répète M. Fushukima. Vos vêtements ! Il ne s'agit pas de ça, même si je désapprouve également. Il s'agit de votre comportement dans la rue hier soir, avec cet homme !

Malheureusement pour Allegra, son responsable, très à cheval sur le respect des usages, emprunte pour rentrer chez lui, la rue dans laquelle Matthew Fox l'a embrassée. Il a donc tout vu et n'en déduit qu'une chose : Allegra est une jeune femme dépravée. Ce qu'il ne peut tolérer dans son entourage immédiat. Surtout au travail, où il pense que chacun doit être exemplaire.

Allegra entreprend alors d'expliquer la situation, mais en vain. Elle entend, abasourdie, M. Fushukima lui asséner un :

— Même si vous n'étiez pas l'initiatrice de ce comportement inapproprié, vous en êtes en partie responsable. Et vous devez être sanctionnée pour cela.

Responsable ?! Non, mais c'est pas croyable ! Foutu pour foutu, elle va lui dire ce qu'elle pense à ce nabot confit de principes surannés et injustes.

— Pardon ?! En quoi la faute d'un homme devrait être payée par une femme qui en est victime ? Vous vous croyez encore au moyen âge où, pour payer ses dettes, un homme vendait son épouse, ou sa sœur, à un bordel ? Non, mais il faudrait atterrir ! lance-t-elle avec force. Et puis, en quoi, mon comportement à l'extérieur de ces murs vous concerne-t-il ? Vous vous prenez pour qui !? Je fais un travail irréprochable ici. Et je pense que l'équipe pourrait confirmer, si elle n'avait pas si peur de représailles !

— Miss Muller ! Reprenez-vous !

— Pourquoi ? Parce que vous avez honte ? Mais j'espère bien ! Parce que ce que vous venez de faire est honteux ! Et croyez-moi quand je vous dis que ça ne va pas s'arrêter là ! Parce que je ne vais pas rester les bras croisés sans rien faire ! hurle-t-elle en ouvrant grand la porte du bureau avant de la claquer avec force devant les yeux agrandis de surprise de Makoto.

Nom de nom que ça fait du bien !


Les tribulations d'Allegra MullerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant